À compter de ce jeudi 24 août et pour trois jours, les écologistes d'Europe Ecologie Les Verts se réunissent au Havre (Seine-Maritime) pour leurs «journées d'été». Un événement de la rentrée politique marquée par la venue du rappeur controversé Médine.
Un parti englué dans la polémique. Europe Écologie Les Verts (EELV) fait sa rentrée politique ce jeudi 24 août au Carré des Docks, au Havre. Officiellement et pour une durée de trois jours, les écologistes auront l’occasion d’éclairer leurs partisans sur leurs ambitions.
À cet égard, le parti entend ainsi proposer différentes formations et ateliers. Mais c'est la prise de parole attendue du rappeur controversé Médine, ce jeudi, qui concentre toutes les attentions. Une invitation à l'initiative de la secrétaire nationale d'EELV, Marine Tondelier, qui a créé le malaise, l'artiste étant au coeur d'une polémique après un tweet antisémite qu'il a ensuite regretté.
Le 10 août dernier, s'exprimant sur le réseau social X (ex-Twitter), Médine avait ainsi qualifié l’essayiste Rachel Khan, juive et petite-fille de déportés, de «resKHANpée». Dans une interview accordée au Parisien ce mercredi, le rappeur a de nouveau plaidé des erreurs et des maladresses dans certaines de ses prises de positions et affirmé que «l'antisémitisme est un poison», mais la polémique est loin de retomber.
Une rentrée gâchée selon les ténors
Entre «mauvais buzz» et «erreur», l’invitation de Médine aux journées d'été d'EELV divise d'ailleurs au sein même des écologistes. Plusieurs ténors ont ainsi fait part de leur malaise. «Je suis une écologiste et une femme de gauche, viscéralement attachée au respect des gens, à la liberté, l'égalité, la solidarité et la laïcité. Dès lors, je ne peux soutenir et encore moins cautionner, l’invitation de Médine», a par exemple écrit l’eurodéputée écologiste Karima Delli sur le réseau social X.
La députée écologiste Sandrine Rousseau a aussi estimé, mardi 22 août, que son parti «aurait pu réfléchir au fait que Médine ne vienne pas» aux journées d'été d'EELV cette semaine, après la polémique provoquée par le tweet litigieux du rappeur.
«Je crains qu'on ne retienne que cette polémique», a regretté, à son tour, l'ancien candidat vert à la présidentielle Yannick Jadot, alors que ces journées d'été devaient à la fois «être la démonstration que les écologistes peuvent gouverner ce pays» et «lancer la campagne des européennes de 2024».
Puis, la tête de liste aux européennes 2024, Marie Toussaint, a estimé ce mercredi que l’«on a eu tout faux de A à Z» jugeant que «le problème ce n'est pas Médine, c'est nous». «On a cherché le buzz, on l'a eu, de la pire des manières possibles» et «nous nous sommes tendus à nous-mêmes un piège», a-t-elle insisté, constatant que les écologistes «se (font) accuser à la fois par les amis de Médine et par (ses) ennemis», ce qui «prouve bien qu’il y a quelque chose qui ne va pas».
Mise sous pression, Marine Tondelier a, elle, souhaité que cette polémique «serve au moins à faire en sorte de faire reculer l’antisémitisme» en France. «Je serai extrêmement attentive à ce que Médine dira le 24 (août) et à ce qu'il dira tous les jours qui suivront», a ainsi déclaré la responsable écologiste à propos de l'«explication de texte» à laquelle le rappeur est invité.
Du côté de la Nupes, enfin, les avis divergent. D’une part, les Insoumis ont évacué le problème. «Médine n’est pas raciste», a jugé le triple candidat à la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon, tout en estimant les autres partis de gauche «soumis au qu’en-dira-t-on des hypocrites».
D’autre part, les socialistes ont invité à la prudence quant à ce type d’invitation. Le chef des sénateurs PS, Patrick Kanner, s’en est mêlé en affirmant que «la gauche ne doit jamais cultiver l’ambiguïté sur les valeurs».
Plusieurs absences remarquées
Cette polémique a, également, poussé quelques maires écologistes à boycotter l’événement, dont Pierre Hurmic, maire de Bordeaux ou Jeanne Barseghian, maire de Strasbourg. De son côté, le président d'Horizons et maire du Havre, Edouard Philippe, ville qui accueille donc l'événement, a aussi préféré décliné.
Dans ce contexte, l'intervention de Médine, antifascite autoproclamé et proche de la Nupes, sera en définitive particulièrement scrutée. Outre ses propos antisémites, le rappeur a tenté ce mercredi de défendre son parcours, admettant avoir «traîné un certain nombre de boulets», comme d'anciens propos homophobes – «une erreur de langage», selon lui - ou en jugeant le morceau «Don't Laïk», «une ode à la laïcité qui n'a pas été comprise», estime-t-il. Le rappeur a cependant rejeté l'étiquette islamiste : «Je ne suis pas communautariste (...) Je ne veux pas de créneaux pour les musulmanes dans les piscines (ni) de menus spéciaux dans les cantines», a-t-il affirmé.
S'il fait amende honorable, l'artiste a quoi qu'il en soit été déprogrammé d’un festival en Belgique. «Aujourd’hui, à la suite d’un tweet - dont nous ne partageons pas le contenu - et malgré les excuses et les explications de l’artiste, une vague de réactions, tantôt haineuses, tantôt plus pondérées, a déferlé sur la Toile et ont été relayées par la presse. Malgré nous, le festival en est aujourd’hui victime», ont écrit les organisateurs.