Un rapport de l’Institut pour la Justice montre que les aménagements de peine permettent à quatre condamnés à de la prison ferme sur dix de ne jamais passer derrière les barreaux.
Une prison pas si ferme que cela. Selon une étude de l’Institut pour la Justice dévoilée ce jeudi, la multiplication des recours aux aménagements de peine pour les condamnés leur permet à 41 % de ne pas être enfermés.
Les chiffres, issus du ministère de la Justice et portant sur la période 2016-2020, montrent en effet que seulement 59 % des personnes recevant une peine de prison ferme vont réellement en cellule (les détentions provisoires et les applications différées ne sont pas prises en compte). Une statistique qui correspond à l’utilisation des aménagements de peine, comme la semi-liberté, les placements extérieurs ou l’usage du bracelet électronique.
Une personne condamnée à de la prison « FERME » a 4 chance sur 10 de ne même pas y mettre les pieds. Notre système pénal est en déliquescence.
C’est le résultat de l’étude de l’@InstitutJustice publiée aujourd’hui dans le @Le_Figaro.https://t.co/WrPBo6ZImy— Pierre-Marie Sève (@pierremarieseve) February 2, 2023
Par ailleurs, l’Institut pointe que parmi ceux allant réellement en prison, la proportion de leur peine qui y est passée est de 62 %. En d’autres termes, une personne devant aller dix ans en prison n’y sera finalement qu’un petit peu plus de six ans.
Un vocabulaire qui prête à confusion
Qu’il s’agisse d’idéologie de la part des magistrats, d’une application de la loi (qui favorise les aménagements pour les peines de moins d’un ou deux ans) ou d’une façon de s’adapter au manque de place de prison, le chiffre vient appuyer les reproches fait à l’institution. En octobre 2022, un sondage CSA pour CNEWS indiquait ainsi que 81 % des Français estimaient que la Justice est trop laxiste.
Par ailleurs, le rapport pointe qu’en 2020, 8 % des peines d’emprisonnement (soit environ 10.000 cas) n’étaient tout simplement pas appliquées, qu’il s’agisse de dossiers en cours de traitement par le juge d’application des peines ou de personnes ayant pris la fuite.
Par ailleurs, l’Institut pour la Justice a dénoncé l’ambiguïté du vocabulaire utilisé. Ainsi, une personne «écrouée» ne se trouve pas forcément dans un établissement pénitentiaire, mais seulement «prise en charge» par l’administration pénitentiaire.
De même, un «détenu» peut parfaitement se trouver en régime de semi-liberté ou en placement à l’extérieur. Une peine de prison, même ferme, peut donc être considérée comme exécutée en liberté. L’IPJ pointe aussi le terme de prison à «perpétuité», qui est en réalité le plus souvent assortie de périodes de sûreté (18 ans, 22 ans, 30 ans) et est rarement véritablement à vie.
En conclusion de son travail, l’Institut dénonce le manque de consultation des victimes, avant de décider des aménagements de peine.