Soupçonnés d'être à la tête d'un réseau international de trafic de cocaïne transitant via le port du Havre (Seine-Maritime), six hommes comparaissaient depuis mercredi 1er février devant la cour d'assises spéciale du Nord. Les accusés ont été condamnés de dix à vingt ans de prison, ce vendredi 10 février.
Des peines exemplaires avaient été requises contre les prévenus. Soupçonnés d’être à la tête d'un réseau international de trafic de cocaïne transitant via le port du Havre, en Seine-Maritime, six hommes comparaissaient, depuis mercredi, devant la cour d'assises spéciale du Nord à Douai. Ils ont été condamnés, ce vendredi 10 février, pour «importation et trafic de stupéfiants en bande organisée», ainsi que pour «association de malfaiteurs».
Les peines vont de dix à vingt ans de prison avec interdiction de séjour en Seine-Maritime et dans le Calvados pendant dix ans. Par ailleurs, les six accusés et deux autres individus sont condamnés à une amende douanière s'élevant à plus de 40 millions d'euros. Une somme correspondant à la valeur de la drogue saisie.
Trois des prévenus, âgés de 31 à 42 ans, sont des amis originaires de quartiers populaires situés près du port du Havre. Ils sont considérés dans cette affaire comme des donneurs d’ordre «associés» au réseau démantelé en 2017. Deux d’entre eux ont déjà été condamnés en 2015 à quatre ans de prison ferme pour trafic de drogue.
Les trois autres accusés étaient soupçonnés d’avoir exercé les rôles respectifs de commanditaire, de dealer concurrent temporairement allié et d’intermédiaire incontournable sur le port.
Le kilo de cocaïne revendu jusqu'à 4.000 euros
L’affaire démarre début 2017 lorsqu’une «source enregistrée» informe la police judiciaire que des délinquants organisent la «sortie» régulière du port d'importantes quantités de cocaïne, en provenance d'Amérique du Sud. Ce tuyau donne aux forces de l’ordre la possibilité d’ouvrir une information judiciaire. Cette dernière ouvre l’accès aux géolocalisations et aux surveillances via l'installation de micros dans les logements de l'équipe.
Cette technique permet aux enquêteurs de découvrir l’ensemble des activités criminelles menées, ainsi que les modes opératoires, les complices et les prochaines opérations prévues. Grâce aux conversations enregistrées, les policiers en charge de l’affaire ont saisi 1,3 tonne de cocaïne et 445 kilogrammes de résine de cannabis sur plusieurs bateaux.
Ce business est très lucratif pour les délinquants puisque le kilo de cocaïne «sorti» du port du Havre se vend entre 2.500 et 4.000 euros. Les profits démentiels récupérés leur permettent de rémunérer grassement tous leurs complices, avec des sommes allant jusqu’à 150.000 euros pour des employés portuaires en situation de pouvoir.
La technique la plus utilisée par ces trafiquants pour organiser leur méfait est celle du «rip off». Elle consiste à payer des dockers corrompus pour récupérer la marchandise, stockée dans des sacs de dizaines de kilos et placée dans des containers de marchandises légales, à l’arrivée des cargos. Une fois récupérée, la cocaïne transite soit dans un container vide sorti ultérieurement grâce à de faux documents, soit via un chauffeur jusqu’à un entrepôt.
Un docker mis en examen retrouvé mort en 2020
Dans cette affaire, huit «petites mains», dont du personnel portuaire, ont déjà été condamnées en correctionnel ou en appel et trois autres ont été relaxées. En juin 2020, un des dockers mis en examen a été retrouvé mort après un enlèvement à son domicile. L’instruction est toujours en cours dans ce dossier.
Selon l’enquête de la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Lille, les sorties étaient effectuées «pour le compte» de Dione Mendy, un ex-videur de discothèque devenu patron d'une entreprise de BTP. Louis Bellhacène, un ancien gérant d'une entreprise de tuyauterie en invalidité, est soupçonné d'être «l'ancien», un intermédiaire aux précieux contacts sur la zone.
Les deux hommes sont soupçonnés de blanchiment d’argent. Ils ont contesté cette accusation lors de leurs interrogatoires mais ils ont peiné à expliquer la provenance des nombreuses voitures de luxe et des achats immobiliers en inadéquation avec leurs revenus.