Alors que des milliers de stations-service sont en rupture totale de carburants, les automobilistes font la chasse aux pompes ouvertes et approvisionnées pour pouvoir se rendre au bureau. Selon le code du Travail, le salarié a l’obligation de se rendre par tout moyen au travail, à moins d’en être empêché par un cas de force majeure. Mais est-ce le cas pour une pénurie d’essence ?
Depuis la fin du mois de septembre, plusieurs raffineries et dépôts de carburant sont en grève, car leurs salariés réclament une hausse globale des salaires. Ce mercredi 12 octobre, le mouvement de grève a été reconduit chez TotalEnergies et Esso-ExxonMobil, a indiqué la CGT.
Ainsi, trois des six raffineries françaises sont toujours à l'arrêt, selon la CGT, dont la plus grande raffinerie de TotalEnergies, en Normandie, ainsi que les deux raffineries françaises de l'américain Esso-ExxonMobil.
«Le mouvement a été reconduit partout», a expliqué Eric Sellini, coordinateur CGT chez TotalEnergies, «en l'absence de réponse de la direction générale» à la lettre ouverte adressée samedi au PDG du groupe Patrick Pouyanné.
Au total, 1.416 stations sont actuellement en rupture partielle de carburant, 2.611 en rupture totale, selon les derniers chiffres du site collaboratif penurie.mon-essence.fr.
Dans ce contexte, de nombreux salariés tributaires de leur voiture ont éprouvé des difficultés à s’approvisionner en carburant, entraînant des retards et des absences au travail. Beaucoup se sont alors demandé si cela pouvait constituer pour l’employeur un motif de licenciement valable ?
Se rendre au travail par tous les moyens
Le Code du travail impose au salarié de se rendre au travail par tout moyen. Ce dernier peut dès lors, afin d’éviter un conflit avec son employeur, effectuer les trajets à vélo ou à pied, faire du covoiturage, prendre les transports en commun ou, solution plus extrême, dormir dans un hôtel à proximité de son lieu de travail.
L’absence ou le retard dû à une grève n’est généralement pas constitutif d’une faute, dès lors que le salarié se trouve dans l’incapacité de se rendre sur son lieu de travail (éloignement du domicile de plusieurs kilomètres, contraintes familiales, absence de transports en commun, etc.). Il doit néanmoins être en mesure de justifier son absence dans le délai prévu par sa convention collective, à savoir, le plus souvent, 48H. Pour connaître ce délai, consulter sa convention collective.
Evoquer la force majeure pour justifier son retard
La force majeure est définie comme étant un événement imprévisible et insurmontable, en somme, complètement indépendant de la volonté. Cela est facilement envisageable pour un salarié qui ne parvient à trouver aucun moyen pour se rendre sur son lieu de travail du fait de la pénurie d’essence et de la distance à parcourir entre son travail et son domicile.
La Cour d’appel de Paris a toutefois déjà jugé qu’en raison de la mise en place de transports en commun de substitution le rapprochant de son lieu de travail, le salarié ne pouvait invoquer la force majeure pour justifier son absence et son refus de reprendre le travail après plusieurs injonctions de l’employeur. Une telle absence pouvant conduire au licenciement pour faute.
Suspension du versement du salaire
En cas d’absence due à un cas de force majeure avéré ou un retard important, l’employeur n’est pas tenu de rémunérer le salarié.
Dans tous les cas, le montant retenu sur le salaire doit être strictement proportionnel à la durée de l’absence. Le salarié dispose néanmoins de solutions pour éviter que la situation n’impacte sa rémunération.
Il peut notamment poser des jours de congés payés ou de RTT afin de bénéficier du maintien du salaire, rattraper les heures de travail manquées, avec l’accord de l’employeur, ou encore faire du télétravail, dès lors que la fonction du salarié le permet et après acceptation. C’est une alternative offerte par le Code du travail en cas de «circonstances exceptionnelles» (Article L1222-11 du Code du travail), telle qu’une grève.