Le 12 juillet 2013, le train Intercités Paris-Limoges numéro 3657 déraillait à la gare de Brétigny-sur-Orge, faisant 7 morts et plus de 400 blessés. Près de 9 ans après, le procès de cette catastrophe ferroviaire s'est ouvert ce lundi 25 avril, durant lequel la SNCF et un cheminot vont être jugés pour homicides et blessures involontaires.
Un procès ouvert pendant huit semaines, jusqu'au mardi 17 juin. Un temps long qui doit permettre de comprendre ce qu'il s'est passé le 12 juillet 2013 et ce qui a conduit au déraillement de ce train Intercités, au niveau de la gare de Brétigny-sur-Orge, en Essonne (91).
2 personnes morales et 1 physique devant le juge
A l'issue de l'information judiciaire et de 7 longues années d'enquête, la SNCF, le gestionnaire des voies SNCF Réseau ainsi qu'un cadre de la SNCF – seule personne physique à comparaître – avaient été renvoyés devant le tribunal correctionnel d’Evry-Courcouronnes (91) pour «homicides involontaires» et «blessures involontaires».
Tout l'enjeu sera de déterminer si ce sont «les fautes» ayant «conduit à l'absence de renouvellement anticipé» de la voie – commises par la SNCF Réseau – ou «l'insuffisance des effectifs», ainsi que les défaillances «dans l'organisation, le contrôle et la réalisation des opérations de maintenance» – imputables à la SNCF – qui ont été à l'origine du drame.
Quant au cheminot, ce directeur de proximité de 24 ans au moment des faits devra, lui, répondre d'«une appréciation fautive», celle notamment d'avoir effectué «seul la dernière inspection des voies», avec un «niveau d'attention manifestement insuffisant».
L'éclisse comme pièce maîtresse
Au cœur du dossier : l'entretien d'une éclisse. Barre métallique faite d'acier, cette pièce permet de solidariser deux rails grâce à des boulons. Le 12 juillet 2013, l'une d'entre elles avait cédé, provoquant le déraillement du train au moment où le quatrième wagon passait au-dessus.
La pièce serait «venue se loger dans le cœur de l'appareil de voie, servant en quelque sorte de tremplin à la roue du wagon qui arrivait sur cet équipement», avait d'ailleurs expliqué le directeur de Réseau ferré de France (RFF) de l'époque, Jacques Rapoport, quelques jours après le drame.
Selon la justice, la rupture de cette éclisse est due «par fatigue» à un lent processus de dégradation combiné à une surveillance défaillante des agents, tandis que les expertises mandatées par la SNCF soutiennent une rupture soudaine, indécelable. Cette dernière hypothèse ayant été écartée.
Pour la SNCF, la catastrophe de Brétigny-sur-Orge était de fait imprévisible. Dans son argumentaire, la direction du groupe continue d'expliquer qu'un tel accident n'était jamais arrivé et ne s'était jamais reproduit.
Et si elle reconnaît néanmoins la vétusté du réseau à cet endroit, elle écarte tout de même toute incidence sur la sécurité des voyageurs. Lors des interrogatoires, les représentants de SNCF Réseau ont affirmé qu'un projet visant à désengorger le trafic de Brétigny-sur-Orge avait été lancé, mais qu'il n'avait pas encore été formellement approuvé.
LA SNCF «Responsable de la vie de ses clients»
De son côté, la SNCF avait assuré – par la voix de son PDG Guillaume Pépy – se sentir profondément «responsable de la vie de ses clients» et avait lancé, deux jours après le drame, une campagne nationale de contrôle qui n'a pas détecté de problèmes majeurs. En parallèle, elle aurait versé jusqu'à 12 millions d'euros d'indemnisations à ses victimes et familles de victimes.
Thierry Gomes, qui a perdu ses parents durant le drame, espère obtenir des réponses à ses questions. Lui qui est désormais le président de l'association Entraide et défense des victimes de la catastrophe de Brétigny «attend que la SNCF soit jugée coupable».
«On attend que tout soit remis à plat, qu'on comprenne ce qu'il s'est passé et évidemment, d'en déduire les chaînes de responsabilité», explique-t-il à CNEWS, se disant en «colère» et se sentant «trahi» par la SNCF.