Face à la vague de suicides survenue en janvier parmi les effectifs de police (11 morts), le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a reçu ce vendredi leurs syndicats et deux associations de soutien. Il a annoncé plusieurs mesures.
A ces onze décès de policiers, s'ajoutent ceux d'un gendarme dans les Ardennes et d'un agent administratif au commissariat de Rennes. Samedi dernier encore, un fonctionnaire de 55 ans en poste au commissariat de Herblay (Val-d'Oise) s’est donné la mort avec son arme de service à son domicile d'Ermont, puis un brigadier-chef de 50 ans affecté à la police aux frontières (PAF) de Roissy a été retrouvé mort le lendemain à son domicile de Saint-Martin-Longueau (Oise).
Le symbole d’un mal-être au sein de la profession, en proie aux difficultés de ses missions sur le terrain et aux attaques qu’elle subit sur les réseaux sociaux ou dans les médias, de la part de certaines personnes.
Une mission confiée à l'IGA
Dans un communiqué dévoilé à l'issue de la réunion, Gérald Darmanin a annoncé le lancement d'une mission, confiée à l'Inspection générale de l'administration (IGA), qui visera à «veiller à la bonne articulation et au renforcement de la médecine de prévention et du réseau de psychologues de la police nationale». Cette mission devrait notamment permettre le recrutement de psychologues dans les endroits les plus difficiles de la police nationale, pour augmenter les effectifs du service de soutien psychologique opérationnel (SSPO). Un service qui avait été créé en 1996, année marquée par le triste record de 70 suicides.
Le ministre de l'Intérieur va également envoyer une instruction aux préfets «pour rappeler la nécessité de réunir chaque année au moins 3 CHSCT» (Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail). Les préfets devront par ailleurs organiser «sous un mois» un CHSCT extraordinaire dans chaque département et consacré spécifiquement à la question des suicides.
Enfin, Gérald Darmanin va envoyer la semaine prochaine un courrier à l'ensemble des policiers «pour leur témoigner un message de soutien et appeler à la vigilance collective».
Des «Sentinelles» pour repérer les plus fragiles
Une première mesure avait été prise il y a deux semaines lors d'une réunion avec le directeur général de la police nationale, Frédéric Veaux. A savoir : l’accélération de l'extension du réseau «Sentinelles», un dispositif de repérage par des policiers (formés à la détection des personnes en situation de fragilité) qui veillent sur leurs pairs.
En 2021, une quarantaine de ces Sentinelles ont été formées. La DGPN (Direction générale de la police nationale) souhaite en former près de 2.000 fin 2022, afin d'avoir une Sentinelle pour 70 à 90 agents. Elle va également rappeler la nécessité de la pratique sportive - deux heures minimum par semaine - et renforcer la médecine de prévention, qui ne compte aujourd'hui que 70 professionnels (en équivalent temps-plein) pour tout le ministère de l'Intérieur (qui compte près de 300.000 personnels).
En moyenne, trente à soixante policiers se suicident chaque année. En 2019, dernière année noire, 59 fonctionnaires s'étaient donné la mort (plus d’une trentaine en 2020 et 2021).
Deux lignes d'écoute ont été mis en place par le ministère de l'Intérieur. Depuis septembre 2019, une cellule de soutien psychologique disponible 24h/24 est joignable au 0805 230 405, assurant des appels «anonymes, confidentiels et gratuits». Depuis l'été 2020, les policiers victimes d'agressions et de menaces peuvent joindre le 0800.95.00.17, tous les jours, de 5 heures à 23 heures.