La Commission européenne avait déjà rappelé Londres à l'ordre, mercredi dernier, lui demandant de régler le contentieux post-Brexit sur les licences de pêche avec la France d'ici au 10 décembre. Les pêcheurs français ont décidé de faire monter la pression d'un cran en organisant des actions de blocage, ce vendredi 26 novembre.
Tôt ce matin, des dizaines de bâteaux se tenaient prêts à bloquer l'entrée de ferries venant de Grande-Bretagne dans trois ports de la Manche française. D'abord à Saint-Malo (Bretagne), le matin (8h), puis à Ouistreham (Normandie), le midi, et enfin à Calais (Nord), aux alentours de 14h.
L'accès au tunnel sous la Manche pour les marchandises, par l'autoroute A16, sera quant à lui occupé par les pêcheurs, à bord de leurs camionettes, entre 14h et 16h. L'idée est d'empêcher les camions de marchandises de s'acheminer jusqu'au terminal fret. Plutôt symbolique à l'entrée des ports, la mobilisation se jouera davantage aux abords du tunnel, par lequel transitent 25% des échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et l'Europe.
La patience des pêcheurs «trop éprouvée»
Le président du comité des pêches des Hauts-de-France, Olivier Leprêtre, explique que le mot d'ordre est «de laisser passer les passagers et de bloquer le fret». Il s'agit d'entraver «les exportations [...] vers l'Angleterre, pour atteindre la population britannique et faire prendre conscience de ce qui se passe. Ils ont accès au marché européen et nous toujours pas à leurs eaux».
Interrogé par le Figaro, le président du comité national des pêches, Gérard Romiti, estime que la «patience» des pêcheurs «a ses limites» et «n'a été que trop éprouvée». Aussi, il indique que ces professionnels «demandent la résolution immédiate du litige qui nous oppose au Royaume-Uni dans l'interprétation de l'accord de Brexit».
Pour rappel, de nombreux pêcheurs français n'ont plus accès aux eaux britanniques, ni à celles des îles de Jersey et de Guernesey, depuis la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne. En vertu de l'accord de Brexit signé fin 2020 entre Londres et Bruxelles, les pêcheurs européens peuvent continuer à travailler dans les eaux britanniques à condition de pouvoir prouver qu'ils y pêchaient auparavant. Mais Français et Britanniques se disputent sur la nature et l'ampleur des justificatifs à présenter. Il est notamment question de relevés GPS que les petits bateaux de pêche et nouveaux propriétaires disent ne pas pouvoir fournir.
Au total, depuis le 1er janvier 2021, la France a obtenu «plus de 960 licences» de pêche dans les eaux britanniques et des îles anglo-normandes. Mais Paris réclame encore plus de 150 autorisations, selon le ministère français de la Mer. La situation est particulièrement dramatique pour quelques dizaines de navires qui n'ont plus aucun accès aux eaux britanniques, avec des pertes allant de 20 à 50% de chiffre d'affaires, notamment dans le Boulonnais.
La Commission européenne est intervenue mercredi après avoir été solliscitée par la France, qui lui demandait d'intervenir dans la résolution du conflit. La ministre de la pêche, Annick Girardin, jugeait ainsi que «l'espace de dialogue doit avoir une date limite et cette date limite, la Commission doit la donner au Royaume-Uni». Ce sera donc le 10 décembre.