Dans sa sélection de nouveaux mots, le dictionnaire «Le Petit Robert» a décidé d'intégrer le néo-pronom neutre «Iel», contradiction de «il» et de «elle». Un choix qui a fait bondir certains politiques, dont le ministre de l'Education nationale.
«C'est un pronom personnel sujet de la troisième personne du singulier et du pluriel, employé pour évoquer une personne quel que soit son genre. L'usage du pronom iel (s'inscrit) dans la communication inclusive», a expliqué Le Petit Robert.
Chaque mois, les lexicographes du dictionnaire y ajoutent des mots et expressions. Si «antivax» ou «passe sanitaire» n'ont pas fait réagir, le nouveau pronom à caractère inclusif a fait bondir certains politiques.
François Jolivet, député LREM de l'Indre a déploré cette «initiative malheureuse» du Petit Robert et l'a fait savoir sur Twitter. L'élu a également demandé l'avis de l'Académie française via une lettre manuscrite partagée sur ses réseaux sociaux, dénonçant notamment «une intrusion idéologique manifeste qui porte atteinte à notre langue commune et à son rayonnement».
Le Petit Robert, dictionnaire que l'on pensait être une référence, vient d'intégrer sur son site les mots « iel, ielle, iels, ielles ». Ses auteurs sont donc les militants d'une cause qui n’a rien de Français : le #wokisme. J'ai écrit à l'Académie française. #LePetitRobert pic.twitter.com/ixFIP7s0It
— François Jolivet (@FJolivet36) November 16, 2021
François Jolivet a, une petite heure plus tard, obtenu le soutien de Jean-Michel Blanquer. Le ministre de l'Education nationale a, lui aussi, regretté ce nouveau pronom, ajoutant que l'écriture inclusive «n'était pas l'avenir de la langue française».
Je soutiens évidemment la protestation de @FJolivet36 vis-à-vis du #PetitRobert
L’écriture inclusive n’est pas l’avenir de la langue française.
Alors même que nos élèves sont justement en train de consolider leurs savoirs fondamentaux, ils ne sauraient avoir cela pour référence: https://t.co/09thJzQ7iN— Jean-Michel Blanquer (@jmblanquer) November 16, 2021
Le Robert explique son choix
Sur Twitter, les Éditions Le Robert ont réagi à la polémique sur l'introduction de ce mot dans leur dictionnaire en ligne, en partageant un communiqué de Charles Bimbenet, directeur général des éditions.
Les Éditions Le Robert réagissent à la polémique sur l’introduction du mot « iel » dans leur dictionnaire en ligne et offrent un éclairage sur les critères et circuits de décisions qui président à l’intégration des mots au dictionnaire.https://t.co/viln4m2eQh#iel #PetitRobert
— Le Robert (@LeRobert_com) November 17, 2021
«Depuis quelques mois, les documentalistes du Robert ont constaté un usage croissant du mot "iel", peut-on lire dans le communiqué. La fréquence d’usage d’un mot est étudiée à travers l’analyse statistique de vastes corpus de textes, issus de sources variées. C’est cette veille constante qui nous permet de repérer l’émergence de nouveaux mots, locutions, sens, etc. Le mot "iel" a été discuté début octobre en comité de rédaction Le Robert, au cours duquel il a été décidé de l’intégrer dans notre dictionnaire en ligne : si son usage est encore relativement faible (ce que nous avons souligné dans l’article en faisant précéder la définition de la marque "rare"), il est en forte croissance depuis quelques mois.»
«De surcroît, le sens du mot "iel" ne se comprend pas à sa seule lecture – dans le jargon des lexicographes, on dit qu’il n’est pas "transparent" –, et il nous est apparu utile de préciser son sens pour celles et ceux qui le croisent, qu'ils souhaitent l’employer ou au contraire… le rejeter. Est-il utile de rappeler que Le Robert, comme tous les dictionnaires, inclut de nombreux mots porteurs d’idées, présentes ou passées, de tendances sociétales, etc. ? Ce qui ne vaut évidemment pas assentiment ou adhésion au sens véhiculé par ces mots. Dit plus clairement : ce n’est pas le sujet pour nos lexicographes. La mission du Robert est d’observer l’évolution d’une langue française en mouvement, diverse, et d’en rendre compte. Définir les mots qui disent le monde, c'est aider à mieux le comprendre», conclut le communiqué.