L'annonce a été faite, mercredi 5 mai au soir, par le Premier ministre Jean Castex en personne. Un policier, qui intervenait quelques heures plus tôt près d'un point de deal à Avignon (Vaucluse) a été tué par balles par un tireur qui s'est enfui. Quatre personnes ont été interpellées dimanche soir et lundi matin, dont le tireur présumé.
Des recherches ont été menées tout le week-end pour retrouver le tireur et des potentiels complices. Dimanche soir, trois personnes ont été arrêtées au péage de Remoulins (A9), à une vingtaine de kilomètres d'Avignon. Lundi matin, la soeur du présumé tireur a également été placée en garde à vue. Voici ce que l'on sait pour le moment de ce drame qui endeuille, une fois de plus, les forces de l'ordre et qui vient remettre le thème de la sécurité au coeur de l'actualité.
une opération anti-drogue qui a mal tourné
Les faits ont eu lieu mercredi vers 18h30, lors d'une opération anti-drogue qui a mal tourné.
Le policier décédé et les quatre autres membres de l'équipage avaient été envoyés «pour un attroupement sur la voie publique autour d’un point de deal», selon Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur.
A leur arrivée sur les lieux, un «lieu très sensible en matière de stup'» selon le délégué syndical Unité SGP-Police Grand Sud Bruno Bartocetti, l’équipage n'a rien remarqué mais se sont placés en observation. Ils ont notamment suivi une femme semblant acheter de la drogue. C'est au moment où ils ont parlé à cette femme que deux individus se sont approchés et que l'un a ouvert le feu «à plusieurs reprises» sur le fonctionnaire de police. Le procureur a affirmé que le tireur savait parfaitement le statut de policier de la victime, puisqu'il s'était identifié en tant que tel et avait son brassard à la main.
Il a également indiqué que la victime, comme ses collègues, avaient retiré son gilet pare-balles car il rentrait d'une mission et devaient retourner au commissariat, avant d'être appelé en urgence.
Les autres policiers présents ont riposté, sans pouvoir interpeller l'auteur des tirs qui a pris la fuite «en trottinette», selon une source policière. Malgré l’intervention de ses collègues et des sapeurs-pompiers, le policier visé est décédé sur place.
Des centaines de policiers mobilisés
Aussitôt après les faits, alors que le ministre de l'Intérieur se rendait sur les lieux, des centaines de policiers ont été déployés, lourdement armés, autour des lieux du crime.
Le drame s'est déroulé dans une petite rue située à l'intérieur des remparts de la Cité des Papes, dans le centre-ville d'Avignon.
Arrivé sur place en fin de soirée, au côté du directeur de la police nationale, Gérald Darmanin a salué un policier «mort en héros dans la lutte contre les stupéfiants».
Gérald Darmanin à Avignon : «La lutte contre le trafic de stupéfiants, partout sur le territoire, s'apparente à une guerre» pic.twitter.com/joXSFN5pRg
— CNEWS (@CNEWS) May 5, 2021
Cette lutte, a ajouté le ministre de l'Intérieur, se joue «partout sur le territoire», s'apparentant «a une guerre».
Alors que les officiels quittaient les lieux, un enquêteur de la police scientifique faisait encore des prélèvements sur place dans le but de récupérer le maximum d'éléments susceptibles d'être utiles à l'enquête.
Le policier tué : un père de famille de 36 ans
Outre la dimension sécuritaire, le drame a particulièrement ému l'opinion publique.
Le policier tué, prénommé Eric, était âgé de seulement 36 ans. L'homme, issu d'une famille de policiers, était pacsé et père de deux enfants. Il laisse deux fillettes âgées d'à peine 5 et 7 ans.
Un de nos policiers a été mortellement blessé, ce soir, à Avignon, alors qu’il était en intervention.
Mes premières pensées vont à ses proches et à la grande famille de la @PoliceNationale, à nouveau endeuillée.
Tout est mis en œuvre pour que cet acte odieux ne reste pas impuni.— Jean Castex (@JeanCASTEX) May 5, 2021
Sur Twitter, le Premier ministre, Jean Castex, a qualifié ce drame «d'acte odieux» et assuré que «tout est mis en oeuvre pour qu'il ne reste pas impuni».
Deux principaux suspects âgés de 19 et 20 ans
Jusqu'à présent, peu d'informations ont filtré quant au profil du tireur dans la mesure où il est en attente encore d'être identifié. Lundi, le procureur Philippe Guémas a donné quelques éléments sur le tireur et son complice, âgés de 19 et 20 ans. Ils sont connus des services de police pour violence et trafic de stupéfiant.
Selon le procureur, le cas du conducteur est «différent». Son âge n'a pas été révélé mais il a également été interpellé, tout comme la soeur du tireur présumé.
Dans ce contexte, entre 50 et 60 fonctionnaires ont étudié les images des caméras de vidéosurveillance du quartier et ont procédé à des enquêtes de voisinage pour récolter d'éventuels témoignages.
Dans le même temps, les fonctionnaires se sont rapprochés de leurs homologues des services de renseignement territorial pour savoir quelles sont les personnes qui fréquentaient en temps normal ce point de deal. Enfin, les policiers ont continué à ratisser la scène de crime et au-delà à la recherche du moindre indice.
Le contenu des auditions n'a pas été révélé par le procureur d'Avignon. «Il est trop tôt pour tirer des conclusions», a-t-il ajouté avant de préciser que les deux juges d'instruction attendent la fin des gardes à vue pour de probables mises en examen.
L'exécutif mis à nouveau sous pression sécuritaire
D'un point de vue politique, le drame d'Avignon vient - une fois encore - replacer l'enjeu sécuritaire au coeur de l'agenda politique.
Alors que l'exécutif a érigé la lutte contre les trafics en priorité, et que l'insécurité s'annonce comme un thème majeur de la campagne présidentielle, la majorité au pouvoir est une fois de plus mise sous pression d'une partie de l'opinion publique plus que jamais excédée par ce qu'elle considère être comme une impuissance, voire une passivité, des pouvoirs publics.
L'affaire d'Avignon s'inscrit d'ailleurs dans une séquence sécuritaire chargée, quelques jours seulement après l'assassinat par un Tunisien récemment régularisé de l'agente administrative Stéphanie M. à Rambouillet (Yvelines) et au moment où plusieurs quartiers de villes de France sont secoués par des troubles à l'ordre public.
Le week-end dernier dans le quartier de Stalingrad à Paris (19e) des toxicomanes au crack ont notamment été visés par des tirs de mortiers d'artifices qui pourraient être le fait d'habitants à bout, mais cette thèse n'est pour l'heure pas confirmée.