Le ministre de la Justice a affirmé ce jeudi matin que l’homme accusé du viol d'une adolescente de 17 ans, six mois après avoir été libéré par anticipation de prison, n’avait pas bénéficié de raisons liées au Covid-19 mais de «critères traditionnels».
Eric Dupond-Moretti a expliqué sur RMC que le juge d’application des peines ayant ordonné la libération de l’accusé l’avait donc fait après un processus habituel, qui comprend notamment «une expertise psychologique» ou «le travail des services d’insertion et de probation» (dont la principale mission est de prévenir la récidive et de favoriser la réinsertion des détenus, ndlr). La veille, il avait déjà indiqué que le juge avait estimé que «les feux (étaient) au vert».
Un constat largement critiqué par l’avocat de la famille de la victime, qui affirme que l’homme, condamné à de multiples reprises, dont une fois en 2018 pour violence, agression sexuelle, enlèvement et séquestration sur sa compagne, «était reconnu comme présentant un risque de récidive non-négligeable». Il constituait également «un risque de passage à l’acte hétéroagressif, c’est-à-dire de viol ou d’agression sexuelle».
«La justice a relâché un individu dangereux»
Une plainte contre l’Etat, pour faute lourde, doit être déposée. La mère de l’adolescente, aujourd’hui âgée de 18 ans, a déploré que «la justice a relâché un individu dangereux et notre fille en a subi les conséquences. Les risques sanitaires liés à la Covid-19 ne sont pas un motif valable pour la libération de cet individu. Cette affaire est un véritable scandale».
Avant Eric Dupond-Moretti, le parquet de Lyon avait déjà indiqué que l’accusé ne faisait pas partie des 6.600 prisonniers libérés grâce à l’épidémie de Covid-19. Il s'agissait «d'une décision de placement sous libération conditionnelle prise sur requête du condamné, et après avis favorable du Service pénitentiaire d'insertion et de probation de Lyon, de l’administration pénitentiaire et du parquet de Lyon», a-t-il déclaré dans un communiqué.
Reste que si le rôle de la crise sanitaire est exclu par les autorités, la question concernant les raisons qui ont permis à la justice la libération d’un tel profil se pose d’autant plus. Le parquet s’explique en disant que le détenu semblait «prendre conscience de la gravité des faits et du dommage causé à la (précédente) victime», et que l’expert psychiatre pointait un risque de récidive «faible».
Cette explication, dans un contexte où la justice française est déjà très souvent considérée comme laxiste, pourrait ainsi déplacer le débat sur ses manquements permettant un tel drame. Un constat rapidement combattu par Eric Dupond-Moretti, qui, s’il a reconnu «un échec» avec cette récidive, a cependant qualifié de «populiste» le fait de dénoncer via cette affaire les failles de l’institution.