Après avoir suscité la méfiance, le vaccin russe Spoutnik V semble désormais avoir convaincu les Européens. Mais le chemin vers une autorisation en France est encore long.
Le vaccin développé par l'institut Gamaleïa, un centre de recherche géré par Moscou, a déjà franchi une première étape en vue d'une autorisation dans l'UE. Le 4 mars, l'Agence européenne des médicaments (EMA) a démarré l'«examen continu» des résultats de ses essais cliniques, une procédure d'urgence permettant d'accélérer la décision sur l'autorisation du vaccin.
«Bien que l'EMA ne puisse pas donner de calendrier précis, l'évaluation d'une éventuelle demande (d'autorisation) devrait prendre moins de temps que d'habitude en raison du travail effectué pendant l'examen continu», a fait savoir l'agence européenne dans un communiqué.
Mais ce processus ne se fait pas en un claquement de doigts. Pour les quatre vaccins autorisés jusque-là dans l'UE (Pfizer/BioNTech, Moderna, AstraZeneca/Oxford et Johnson & Johnson), le temps écoulé entre le début de l'examen continu et l'autorisation européenne, rapidement suivie par l'autorisation française, a oscillé entre deux mois (pour Moderna) et quatre mois (AstraZeneca).
Deux autres vaccins sont par ailleurs en phase d'étude continue depuis plus longtemps que Spoutnik V (3 février pour Novavax, 12 février pour CureVac), et n'ont pas encore été autorisés.
Appels à accélérer le processus d'autorisation
L'avis européen sur le vaccin russe, fierté de Vladimir Poutine, n'est donc pas attendu avant début mai au plus tôt. Mais certaines voix en Europe s'élèvent pour demander à l'UE d'accélérer encore l'examen de Spoutnik V, déjà approuvé dans une cinquantaine de pays et efficace à 91,6 % selon une étude du Lancet. C'est le cas par exemple du ministre-président de Bavière Markus Söder, possible candidat à la succession d'Angela Merkel, en Allemagne, ou du maire de Nice (LR) Christian Estrosi en France.
Certains Etats européens (Hongrie, République tchèque et Slovaquie), lassés de l'attentisme de Bruxelles, ont déjà passé commande auprès de la Russie pour obtenir des doses de Spoutnik V. La Hongrie a même déjà commencé à vacciner sa population avec le produit russe, dès la mi-février.
Une politique vivement déconseillée par l'EMA il y a deux semaines, expliquant que les données sur les effets secondaires du vaccin étaient encore insuffisantes. Du côté de la France, on affirme attendre l'avis de l'agence sanitaire européenne, refusant de faire cavalier seul sur ce dossier.
Ceci étant, même si l'EMA cède à la pression et autorise plus rapidement le vaccin russe, se posera la question de sa disponibilité. Les autorités russes ont en effet indiqué qu'elles pourraient fournir 50 millions de doses aux Européens à partir du mois de juin seulement. Et si un accord de production a déjà été trouvé avec l'Italie, les premières doses ne sortiront des usines italiennes qu'en juillet prochain.