Plus de 5 mois après avoir déposé une plainte contre X pour pollution aux métaux lourds, le maire de Carrières-sous-Poissy (78) Eddie Aït renouvèle son besoin de justice, et s'est constitué partie civile, afin d'«obtenir réparation». Il réclame 80 millions d'euros au titre du préjudice subi par sa commune.
«Je compte sur la justice pour faire appliquer le principe du pollueur-payeur dans cette affaire», a ainsi expliqué l'élu divers écolo Eddie Aït, à la tête de Carrières-sous-Poissy depuis 2020, dans un communiqué. Dans son viseur, le ou les pollueurs qui ont déversé pendant des dizaines d'années leurs eaux usées et polluées à Carrières-sous-Poissy. Au total selon le maire, ce sont plus de 330 hectares de terre qui auraient ainsi subi une pollution aux métaux lourds, notamment au plomb, au zinc, au mercure et à l’arsenic, sur sa commune.
Dans l'attente de l'instruction
Comme la justice le lui permet plus de 3 mois après le dépôt de sa première plainte en septembre, Eddie Aït – qui est aussi président du groupe des écologistes et progressistes au conseil régional d'Ile-de-France – veut maintenant aller plus loin. Il y a une semaine, il a donc déposé «une plainte avec constitution de partie civile» devant le doyen des juges d’instruction du Tribunal judiciaire de Versailles.
«Maintenant, c'est sûr que ça va avancer», explique-t-il ce jeudi 18 février, confiant que «l'instruction» menée par le juge permettra «de trouver le ou les responsables de cette pollution endémique qui a complètement hypothéqué la vocation agricole de cette plaine, déséquilibré la faune et la flore de notre territoire et mis en danger la vie de nos habitants».
80 millions d'euros de préjudice
Il espère également «obtenir réparation du préjudice écologique» et réclame près de 80 millions d'euros. Une somme conséquente qui doit venir combler, d'après ses calculs, «le manque à gagner des taxes» qui auraient dû être reversées à sa commune au titre des taxes générales sur les activités polluantes. Mais aussi, dans une moindre partie, les «coûts de confinement et d’évacuation des terres polluées», les «frais de travaux de dépollution», les «pertes de taxe foncière et de taxe d’habitation» mais encore le «préjudice moral», estimé à... un euro symbolique.
Et les dégâts sont importants selon Eddie Aït, puisque – comme il le rappelle – la plaine de Carrières-sous-Poissy «a servi d’égout géant de l’agglomération parisienne pendant plus d’un siècle». Pire «l'épandage des boues du Syndicat interdépartemental pour l’assainissement de l’agglomération parisienne (SIAAP) a provoqué une concentration en plomb des sols qui varie de 138,2 à 640 mg/kg quand la concentration maximale en Ile-de-France est de 53,7 mg/kg», explique-t-il, soulignant que cette pollution est restée «sans traitement jusqu’en 1995», puis «partiellement jusqu’en 2006».
C'est une «pollution emblématique de ce que la grande couronne ne veut plus» témoigne le maire écologiste, qui souligne le besoin de sa ville – qui a déjà été durement touchée par la pollution à plusieurs reprises notamment à cause de la présence d'une décharge à ciel ouvert surnommée la mer de déchets – «d'avancer sur un chemin positif et bienveillant» et «de sortir du statut imposé depuis des décennies».
Il envoie d'ailleurs un message clair aux autorités publiques : «Nous ne voulons plus être un territoire servant, où l’on recueille les eaux usées, les déchets et les gravats d’un Grand Paris qui nous aurait oublié, mais un territoire ressource». «On ne peut pas nous demander de lutter contre l’étalement urbain, construire des logements, préserver les espaces naturels, organiser des transports en commun, dynamiser le commerce local et être à la fois la poubelle de l’Ile-de-France», conclut-il.