L'agression de Yuriy, un adolescent de 15 ans lynché le 15 janvier dernier à Paris, est un drame qui malheureusement en rappelle plusieurs autres. Les rixes de jeunes et affrontements entre bandes rivales se multiplient en effet ces dernières années en Ile-de-France, et plus largement dans le pays.
Ce sont des noms et des visages qui illustrent l'expression - terrible mais malheureusement tellement révélatrice - de ces jeunes présents «au mauvais endroit, au mauvais moment».
Sous prétexte d’une querelle autour d’un territoire ou d’un motif futile, les affrontements très violents de groupes de jeunes deviennent de plus en plus réguliers. Prenant avec eux des victimes qui n'avaient rien demandé.
Othman, 17 ans (2018)
L'histoire d'Othman résonne comme un effroyable écho à celle de Yuriy.
Le 26 septembre 2018 sur un parking du quartier de la Dame Blanche à Garges-lès-Gonesse (Val d'Oise), le jeune homme, alors âgé de 17 ans, se fait lyncher par d'autres adolescents.
Othman est roué de coups par une dizaine de jeunes armés de barres de fer et de béquilles en représailles à une rixe ultra-violente qui s'était déroulée plus tôt et à laquelle il était pourtant étranger.
Le jeune s'en sort avec 67 points de suture. Un riverain avait filmé la scène et diffusé la vidéo sur les réseaux sociaux, provoquant un émoi national.
aboubakar, 13 ans (2018)
Aboubakar est mort à 13 ans à peine. Il a été roué de coups le 13 octobre 2018, aux Lilas (Seine-Saint-Denis), par une bande de jeunes munis de barres de fer. Il est décédé à l’hôpital le lendemain.
Aboubakar était originaire de la ville voisine de Bagnolet et venait régulièrement aux Lilas rendre visite à sa cousine.
D'après les différents témoignages recueillis auprès des jeunes du coin, il s’agit d’un rendez-vous qui a mal tourné entre deux collégiens qui «s’insultaient» dès qu’ils se croisaient.
«Ils devaient se voir pour régler ça en face-à-face, mais le garçon des Lilas a ramené toute sa bande», expliquera notamment une adolescente dans une enquête parue dans Le Monde.
Richard, 26 ans (2016)
Le quartier où Aboubakar avait trouvé la mort est situé à la frontière de trois communes : Les Lilas, Romainville et Bagnolet.
Un secteur connu de longue date pour être le théâtre d'une guerre de territoires sur lequel les riverains n'ont cessé d'alerter.
Deux ans avant la mort d'Aboubakar, ce secteur de la Seine-Saint-Denis avait déjà été endeuillé avec la mort de Richard.
En octobre, Aboubakar, 13 ans, perdait la vie à la suite d’une rixe aux Lilas. Deux ans plus tôt, Richard mourait au même endroit.
13 ans, mort pour rien
#Cdenquete ce soir 22h50 pic.twitter.com/Ko435skARv— Complément d'enquête (@Cdenquete) November 8, 2018
Ce jeune homme de 26 ans avait été poignardé alors qu’il tentait de s’interposer lors d’une rixe opposant une bande des Lilas à celle de la cité Youri-Gagarine, à Romainville. Une rue seulement sépare les deux quartiers.
Son histoire, mais aussi celle d'Othman et d'Aboubakar, avait d'ailleurs donné lieu à un reportage diffusé dans l'émission Complément d'Enquête, sur France 2.
Aman, 16 ans (2020)
Aman était un adolescent de 16 ans. Il est mort tué par balles à Epinay-Sur-Seine (Seine-Saint-Denis) le 6 juin 2020.
Dès le départ, les enquêteurs sont démunis devant cette affaire, pour laquelle ils ne trouvent «aucun motif», selon une source proche du dossier.
Les investigations montreront en effet rapidement qu'Aman, inconnu des services de police, n’était pas ciblé et n’avait rien à voir avec les conflits réguliers qui émaillent son quartier d'Orgemont face à celui des Raguenets, situé dans la ville voisine de Saint-Gratien (Val-d'Oise).
Il était juste là «au mauvais endroit au mauvais moment», résumeront, selon la formule tristement consacrée, les enquêteurs. Deux hommes de 18 et 19 ans avaient par la suite été mis en examen et écroués pour «homicide en bande organisée».
Lionel, 16 ans (2021)
Le 2 janvier 2021, le quartier des Aubiers, à Bordeaux (Gironde), avait été le théâtre d'une fusillade dans laquelle cinq jeunes avaient été visés à l'arme automatique.
Quatre personnes, dont trois mineurs, avaient réussi à prendre la fuite mais Lionel, 16 ans, n'a pas survécu.
Parce que le quartier est populaire et a déjà été le théâtre d'actes de délinquance, rapidement, des rumeurs avaient évoqué des règlements de compte et des histoires de stupéfiants.
Maître Yann Herrera, l'avocat de la famille de Lionel, a néanmoins dénoncé des fausses informations qui ont rapidement circulé à son sujet.
«Lionel était un enfant très impliqué dans la vie sportive, il jouait dans un club de foot du quartier, il suivait une scolarité classique, souligne l'avocat. En classe de seconde au lycée des Chartrons, l'adolescent souffrait de dyslexie», a-t-il déclaré à France 3 Nouvelle-Aquitaine.
Peu après les faits, la police avait elle aussi indiqué que les tirs semblaient attester que les jeunes avaient été pris au hasard, sur fond de rivalités entre quartiers minés par le trafic de drogue.
Selon le ministère de l’intérieur, il y avait, en 2018, 90 bandes organisées répertoriées en France, dont près de la moitié à Paris (seize) et dans sa proche banlieue (vingt-neuf).