Embouteillages sur les routes, transports remplis et pistes cyclables prises d'assaut... En pleine reprise de l'épidémie de coronavirus, le télétravail semble bien peu mis en place en Ile-de-France, malgré les recommandations du gouvernement.
Le trafic routier francilien est en effet quasiment revenu à son niveau habituel, si l'on se fie aux données du baromètre de la circulation «Sytadin» de la Direction des routes d'Ile-de-France (Dirif). Ce mardi 13 octobre au matin, pas loin de 500 km de bouchons étaient notamment enregistrés.
Et même si ce niveau «exceptionnel» de congestion doit être nuancé par l'organisation de plusieurs manifestations routières ce mardi, la Direction des routes d'Ile-de-France (Dirif) confirme la tendance. Une «augmentation progressive en septembre 2020» du niveau de congestion sur les routes franciliennes a été enregistré, «pour atteindre un niveau habituellement haut de congestion en fin de mois».
Un retour «quasi à la normale» également constaté par Airparif. L'observatoire de la qualité de l'air en Ile-de-France a en effet détecté que des émissions de polluants, la plupart liés au trafic routier, ont atteint 80 ou 90 % des niveaux mesurés avant le confinement.
Même constat en ce qui concerne les trajets en transports en commun à Paris. La RATP indique que son réseau est revenu à environ 70% de sa fréquentation habituelle. L'algorithme de l'application CityMapper montre d'ailleurs des pics à 90 % certains jours, pour un niveau comparable à celui de l'avant crise :
Ce retour des voyageurs sur les réseaux de la RATP et de la SNCF dans la capitale est bien plus marqué que dans plusieurs autres métropoles européennes. Berlin, Londres ou Madrid, qui sont dans une situation sanitaire similaire à la nôtre, n'enregistrent qu'une fréquentation des transports de 56 %, 48 % et 39 % par rapport à leur moyenne pré-coronavirus. Les transports à Paris sont ainsi les 3e plus fréquentés du monde en ce moment, selon le baromètre de CityMapper.
Quant aux pistes cyclables parisiennes et en proche-couronne, celles-ci n'ont jamais été autant utilisées qu'aujourd'hui. Selon l'association Vélo et Territoires, le nombre de vélos sur les routes a progressé de 72 % à Paris entre mai et septembre. D'autant que nombre de nouveaux cyclistes sont sans doute des anciens usagers des transports en commun.
Une situation dans les transports et sur les routes de la région paradoxale quand on sait que le gouvernement «recommande» au maximum le recours au télétravail. Même Valérie Pécresse, la présidente de la région, qui avait un temps appelé les Franciliens à retourner sur leurs lieux de travail en prenant le métro, plaide désormais pour qu'ils restent davantage chez eux.
Trafic "exceptionnel" aujourd'hui encore en Ile-de-France. Trop peu d'entreprises autorisent le télétravail malgré la situation sanitaire alarmante
On demande des efforts aux citoyens, restaurants et cafés, mais les employeurs eux ne jouent clairement pas le jeu... pic.twitter.com/5MMj2qh3gI— Mathieu Chassignet (@M_Chassignet) October 13, 2020
«On continue de "recommander fortement" aux entreprises de mettre en place le télétravail. Mais ces chiffres montrent qu'elles le font peu», commente Mathieu Chassignet, ingénieur spécialiste de la question des transports à l'Agence de la transition écologique (ADEME). Ce dernier met en doute l'efficacité du discours politique, alors qu'aucune obligation contraignante n'a été formulée envers les entreprises.
«Trop peu d'entreprises autorisent le télétravail, malgré la situation sanitaire alarmante», a-t-il en effet constaté, soulignant que «les employeurs ne jou[ai]ent clairement pas le jeu», alors que «des efforts sont demandés aux citoyens, restaurants et cafés».
Pourtant, le 4 octobre dernier, alors que Paris et sa proche-couronne passait en «zone d'alerte maximale», la ministre du Travail Elisabeth Borne avait elle-même appelé «les employeurs et les salariés à recourir autant que possible au télétravail pour ralentir la circulation du virus».
Alors pourquoi ne pas imposer le télétravail plutôt que de le «recommander» ? Tout simplement parce que le statut d'alerte maximale – à la différence de l'état d'urgence sanitaire – ne donne pas la possibilité légale à l'Etat de s'immiscer dans la gestion d'une entreprise.
La région parisienne est actuellement confrontée à une très forte reprise de l'épidémie. Alors que les hôpitaux ont déjà remis en place le plan blanc, avec des déprogrammations d'opérations, le taux d'occupation des services de réanimation est monté à 42 % lundi 12 octobre.