Le mouvement présidentiel à deux doigts de la dépression nerveuse. Au lendemain du premier tour de six élections législatives partielles à l'issue desquelles la République en marche (LREM) n'a encaissé que des défaites, le parti majoritaire a, lundi soir, pas eu d'autre choix que d'acter, lors d'un bureau exécutif électrique, le départ de son numéro 2, Pierre Person, démissionnaire de ses fonctions de direction au sein de LREM.
Dans une interview au Monde, publiée plus tôt lundi après-midi, ce jeune député de Paris (sixième circonscription) avait déjà fait part de sa volonté de jeter l'éponge tout en donnant le ton.
Visiblement désabusé, ce macroniste fidèle, qui réitère quoi qu'il en soit son soutien à Emmanuel Macron, a ainsi jugé le parti présidentiel pas aussi dynamique qu'à ses débuts quatre ans plus tôt, raison pour laquelle LREM «ne sera pas en mesure d'affronter les échéances électorales de la fin du quinquennat», en l'occurrence la présidentielle 2022 mais aussi, avant cela, les régionales de l'an prochain.
Pour Pierre Person, ex-numéro deux de LRM, le parti n’est pas « en mesure d’affronter la nouvelle étape du quinquennat » — via @lemondefr https://t.co/ejjLkmA9nC
— Schneider Vanessa (@schneidervanes) September 21, 2020
En laissant vacant son poste de délégué général adjoint, et en décidant de ne plus siéger au bureau exécutif, Pierre Person fait ainsi le choix de «redevenir militant parmi les miliants», ce qui ne l'empêche pas de solder, au passage, quelques comptes.
Selon lui, le mouvement est en effet «resté dans sa logique de 2017», qui, dit-il «était de porter le projet présidentiel». Or, Pierre Person affirme que LREM «ne produit plus d’idées nouvelles», ou du moins, «le travail dans ce domaine est insuffisant».
Souhaitant créer, par son départ, une forme «d'électrochoc», il préconise donc que le parti «ait enfin des débats politiques» en son sein et - plus largement - que tout le mouvement retrouve «sa raison d'être, sans porter uniquement en 'copier-coller' le message du gouvernement».
«Cette réunion, c’est l’horreur, la déprime totale»
Si la démission de Pierre Person, macroniste de la première heure, ne constitue pas en elle-même une surprise - dans la mesure où il s'était mis en marge de LREM depuis plusieurs mois déjà - son annonce dans la presse a, en revanche, donné lieu lundi soir à une mémorable confrontation, digne des plus grandes sagas familiales.
Selon plusieurs participants, les attaques ont ainsi fusé de toute part et une sortie a été particulièrement remarquée : celle de Sacha Houlié. Alors que le secrétaire d’Etat au numérique Cédric O relativisait les déboires de LREM, propres selon lui à tout parti majoritaire, le député de la Vienne l'a en effet taclé : «J’espère que tu seras plus convaincant sur la 5G que tu l’as été ce soir». Un propos abondamment relayé et commenté dans la presse ce mardi. «Cette réunion, c’est l’horreur, la déprime totale», a de son côté résumé, sous couvert de l'anonymat, un témoin de la scène.
Cofondateur avec Pierre Person des Jeunes avec Macron en 2015, Sacha Houlié a par ailleurs lui aussi lâché lundi soir les instances du mouvement. De même que la députée des Yvelines, Aurore Bergé, tenante de l'aile droite de la macronie, qui s'est opposée à la proposition de Stanislas Guérini, le patron du mouvement présidentiel, de voir reporter le renouvellement des membres du Bureau exécutif (BurEx), prévu en novembre, après les élections régionales, au printemps 2021.
«Si tu maintiens ce calendrier reporté, alors je ne resterai pas», avait prévenu Aurore Bergé, selon qui «le BurEx n'a pas la légitimité à mener les combats à venir».
Puis, au terme d'une réunion de quatre heures particulièrement âpre, les membres du bureau ont finalement approuvé la nomination d’un binôme pour numéro deux composé de la députée de l’Essonne Marie Guévenoux, ancienne juppéiste, et du président du groupe d’entrepreneuriat social SOS, Jean-Marc Borello.
Cet homme d'affaires de 62 ans, soutien de la première heure d'Emmanuel Macron, traîne derrière lui une réputation sulfureuse en étant accusé de harcèlement et d'agressions sexuelles au sein de son entreprise de la part de plusieurs anciens employés.
Devant le résultat du vote qui a porté ce binôme aux instances du mouvement (19 voix pour, 1 contre et 4 abstentions), Aurore Bergé a immédiatement confirmé sa démission de ses fonctions de porte-parole. Une preuve, s'il en fallait une, que la crise au sein de LREM est loin d'être terminée.