Le déboulonnage de la statue de Joséphine de Beauharnais, qui fut la première épouse de Napoléon, à Fort-de-France (Martinique), dimanche, a suscité des réactions contrastées. Certains, notamment au sein de l'extrême droite, dénoncent ce qu'ils considèrent comme un acte de vandalisme, alors que les militants antiracistes se félicitent de la fin d'un symbole de l'esclavage dans les Antilles.
La statue, qui depuis 20 ans était déja privée de tête, a été mise à terre grâce à des cordages que les militants avaient installés, se relayant pour faire basculer le momument.
La statue de Joséphine qui se trouve sur la Savanve @fdfville a été mise à terre par un groupe de militants ce dimanche matin pic.twitter.com/MCR5qOJFVt
— RCI Martinique (@RCI_MQ) July 26, 2020
Les militants à l'origine de cette action mettent en avant le rôle joué par Joséphine de Beauharnais dans le rétablissement de l'esclavage en Martinique. Dans le Mémorial de Saint-Hélène, Napoléon avait en effet affirmé avoir pris cette décision sous la pression des colons esclavagistes et notamment de sa première épouse.
Joséphine de Beauharnais a possédé 123 esclaves
Cette dernière est issue d'une riche famille de planteurs établis en Martinique depuis 1726. Elle aurait ainsi possédé, via l'héritage de ses parents, 123 esclaves.
L'historien Christophe Pincemaille est revenu sur sa position vis-à-vis de l'esclavage pour le site des musées nationaux : «Joséphine, relativement à la question de l’esclavage, qui appartenait à la réalité de son environnement familial, n’a jamais formulé en public la moindre opinion qui laisserait supposer que ce système sur lequel reposait l’économie des îles, et dont les Tascher de La Pagerie et leur entourage profitaient pleinement, était condamnable sur le plan moral et humain. Elle ne l’a ni désapprouvé ni justifié, elle s’en est seulement accommodée comme d’une évidence, s’en remettant à la tradition, qu’il ne lui revenait pas de contester. La possession d’esclaves ne la gênait nullement et elle en conservera à son service jusqu’en 1814, sans qu’on sache quand - ou même si - elle leur avait rendu leur liberté (...) Elle partageait probablement la conviction de ses compatriotes de la Martinique que le noir est dangereux et qu’il mérite le plus sévère des châtiments, s’il est présumé coupable de quelque crime. Il est certain, en revanche, qu’elle intervint auprès du ministre des Colonies pour appuyer les demandes d’affranchissements que recommandait sa mère, mais elle agissait par pur sentiment, pour récompenser des esclaves dévoués à leurs maîtres, indifférente aux considérations politiques et à leurs enjeux. En ce sens, elle appartient sans l’ombre d’un doute au petit monde des colons blancs, aveuglés par leurs prérogatives et convaincus qu’ils ne survivraient pas à l’abolition de l’esclavage, une question qui rencontrait pourtant alors en métropole d’ardents défenseurs.»
La statue de Joséphine de Beauharnais constitue donc bien un symbole de l'esclavage dans les Antilles. Mettre à bas sa statue est donc un moyen pour les opposants à l'esclavage d'effacer l'un des symboles de ce qui constitue un crime contre l'humanité.
Certains, toutefois, ont exprimé leur colère face à cette action, allant jusqu'à comparer les militants antiracistes à des talibans, les extrêmistes islamistes qui avaient détruit en partie les bouddhas de Bamiyan lorsqu'ils étaient au pouvoir en Aghanistan, avec l'objectif d'effacer toute trace d'une autre religion que l'Islam dans leur pays. Marine Le Pen a reproché pour sa part à Emmanuel Macron de ne pas avoir tenu sa promesse de ne pas déboulonner de statues.
Pourquoi @EmmanuelMacron laisse t’il les NOUVEAUX TALIBANS détruire ces monuments Historiques ?
Que fait @R_Bachelot ?
Les deux statues de l’impératrice Joséphine de Beauharnais première femme de Napoléon 1er déboulonnées hier à Fort-de-Francepic.twitter.com/ct8jB4Ttzn— Laurent Alexandre (@dr_l_alexandre) July 27, 2020
Emmanuel Macron le 14 juin : « aucune statue ne sera déboulonnée »... MLP https://t.co/Mz6VbQLUoL
— Marine Le Pen (@MLP_officiel) July 27, 2020
La statue de la martiquaise Joséphine Tascher de la Pagerie, veuve d’Alexandre de Beauharnais, épouse de Napoléon Bonaparte, impératrice des Français, grand-mère de Napoléon III, a été détruite hier matin, 26 juillet 2020, à Fort-de-France. Pourquoi ? pic.twitter.com/vSpK4QVHYg
— Yves d'Amécourt (@yvesdamecourt) July 27, 2020