Roxana Maracineanu conserve son portefeuille des Sports dans le gouvernement du nouveau Premier ministre Jean Castex, mais avec un statut de ministre déléguée auprès de Jean-Michel Blanquer, ministre de l'Éducation nationale. Retour sur le parcours atypique de cette éminente représentante de la natation française.
de bucarest à Mulhouse
Née à Bucarest, le 7 mai 1973, dans la Roumanie du dictateur Nicolae Ceausescu, Roxanna Maracineanu quitte pour la première fois son pays natal en 1984 pour rejoindre son père, ingénieur en travaux publics, parti réaliser une mission en Algérie. Pas de billet retour : les parents de Roxana décident de tenter leur chance et demande l'asile politique en France.
Une terre d'accueil, remontée en R16 par la petite famille, de Marseille, où elle était arrivée par bateau, jusqu'à Paris. «On dormait la nuit à quatre dans la voiture, se rappelle-t-elle dans Ouest France. On se lavait aux fontaines. Je trouvais ça rigolo, sauf que j'ai fini par comprendre que c'était un voyage sans retour.»
Prochain arrêt, le Finistère. La famille trouve refuge dans un village de vacances de Riec-sur-Belon, devenu un centre d'accueil pour les réfugiés politiques. Elle en garde un souvenir «merveilleux» et un goût prononcé pour les langues étrangères : elle en parle cinq.
Un exil dont elle tire également une appréciation vigoureuse de la politique migratoire actuelle. «La France pourrait être beaucoup plus accueillante et plus cool, plaidait-elle dans Le Parisien, en décembre dernier. Quand je vais chercher mon permis de conduire à la préfecture et que je vois des gens qui font la queue des journées entières pour un papier sans avoir même un verre d'eau, j'ai mal au coeur.»
Trois titres à la chaîne
Un an après, les Maracineanu finissent par poser leurs valises à Mulhouse. Roxana découvre les chewing-gums et les bonbons, gomme son accent et plonge dans la natation, balayant sa première passion, la gymnastique.
Elle rêve aussi de devenir astronaute, confiait-elle au micro de Jacques Vendroux sur France Info : «C’est dans la natation que j’ai eu les mêmes sensations peut-être que dans l’espace. J’ai senti comment on flottait dans l’eau. Et finalement je suis arrivée à aller toucher les étoiles.»
Au Mulhouse Olympic Natation, elle enchaîne les entrainements et les compétitions, encadrée par Lionel Horter. «95% de ce qu'elle a fait plus tard, elle le faisait déjà [dans son club de Mulhouse]. Un vrai talent. (...). Elle passait dans l'eau comme un bateau», se souvient son ancien entraîneur sur France Inter.
En remportant le 200m dos à Perth en 1998, Maracineanu devient à 22 ans, la première nageuse française championne du monde de natation.
Elle confirme sa place parmi les grands dossistes dans la foulée en remportant le titre européen à Istanbul en 1999, sur la même longueur, avant de ramener une médaille d’argent des Jeux Olympiques de Sydney l’année suivante, arrivée juste derrière ... une Roumaine.
«Le retour de bâton, c'est que, quand j'ai dû concurrencer une Roumaine, je n'ai pas été capable de la battre, confie-t-elle. Je n'ai pourtant jamais été autant émue qu'en entendant l'hymne roumain sur le podium. Il ne m'était pas destiné, mais je l'ai aussi pris pour moi. »
Un engagement politique au service du sport
Après avoir mis un terme à sa carrière en 2004, c'est à la télévision que l'on retrouve l'ex-dossiste. Entre 2007 et 2015, elle couvre toutes les grandes compétitions de natation pour France Télévisions ou au micro d'Europe 1.
En 2010, elle fait également son entrée en politique, élue conseillère régionale d'Ile-de-France sur la liste socialiste de Jean-Paul Huchon. A la fin de son mandat, elle est candidate à la succession de son ancien entraîneur, Lionel Horter, au poste de directeur technique nationale de la Fédération française de natation, mais se fait ravir le poste sur la dernière marche.
Mariée au journaliste sportif Franck Ballanger, mère de trois enfants, elle s'engage avec vigueur pour défendre l'apprentissage de la nage dès le plus jeune âge et lutter contre l'aquaphobie.
Après un cri d'alerte lancé dans les colonnes du Parisien, elle est repérée pour la première fois par l'équipe gouvernementale. Edouard Philippe lui confie la mission de muscler le plan de lutte contre les noyades chez les enfants et la formation à la nage dans les écoles.
«C'est une évidence : les enfants doivent apprendre à nager le plus tôt possible»
➡ Le cri d'alerte de la championne de natation Roxana Maracineanu sur les noyades pic.twitter.com/PYdkSOHs0Z— Le Parisien (@le_Parisien) 12 juillet 2018
Celle qui a ouvert la voie à une nouvelle génération de nageurs titrés, Laure Manaudou en tête, reprend aujourd'hui le flambeau d'une autre championne, Laura Flessel, qui lui laisse la vaste tâche de préparer l'Hexagone aux Jeux Olympiques de 2024.