Seule une dizaine de jours sépare le lundi 22 juin, où tous les élèves du primaire et du collège devront revenir en classe, et le vendredi 3 juillet, veille des vacances scolaires. Cette période très courte interroge certains parents, qui se demandent si la présence de leurs enfants, même obligatoire, est réellement utile.
A cette question, enseignants et professionnels de santé sont pourtant catégoriques : le retour à l'école n'est pas seulement bénéfique aux enfants, il est fondamental.
«C'est toujours utile que les enfants reprennent l’habitude de l’école. C'est important de ne pas couper si longtemps avec l'environnement scolaire», explique par exemple Francette Popineau co-secrétaire générale et porte-parole du SNUipp-Fsu (Syndicat national des instituteurs, professeurs des écoles, majoritaire).
Sylvie Dieu Osika, pédiatre attachée à l'hôpital Jean-Verdier de Bondy (Seine-Saint-Denis), abonde : «Pour ma part, c'est une rentrée que j'attendais avec impatience. Pourquoi ? Parce que tous les enfants ont besoin de reprendre un rythme normal. C'est valable pour les plus petits, en primaire, comme pour les plus grands, au collège».
«Chaque jour compte»
Pour cette professionnelle de santé, l'excuse d'une rentrée trop courte pour ne pas fait revenir les enfants ne tient donc tout simplement pas la route.
«C'est vrai qu'il s'agit d'une période courte au point que certains en ont fait un argument pour s'y opposer. Ils disent : "pour un jour, ça ne vaut pas le coup". Or, c'est faux. Les enfants ont eu une coupure trop longue avec la normalité d'auparavant. Chaque jour compte. D'ailleurs, on le constate avec les enfants qui sont déjà retournés en cours, même si c'est pour un ou deux jours par semaine : ils vont mieux par rapport aux autres», explique-t-elle.
Sylvie Dieu Osika, qui a écrit un livre sur l'impact des écrans auprès du jeune public («Les écrans», mode d'emploi pour une utilisation raisonnée en famille chez Hatier Editions), s'alarme notamment des changements intervenus pendant le confinement. Beaucoup de jeunes, à l'emploi du temps totalement déréglé, ont passé beaucoup trop de temps devant leurs smartphones et les autres écrants.
Selon la pédiatre, les adolescents sont même «les victimes collatérales de cette pandémie» car, dit-elle, «ce sont eux qui le plus complètement perdu le rythme en se couchant à pas d'heure et en étant beaucoup sur les jeux vidéo ou les réseaux sociaux».
Un décalage constant entre la nuit et le jour, déjà connu des soignants pour ne pas être pas bon pour le moral, mais qui s'accentue d'autant plus dans le contexte déjà anxiogène de l'enfermement.
Réduire les inégalités
Un autre enjeu, soulevé cette fois par Francette Popineau, est le retour de l'école obligatoire pour tous les élèves. Une décision qui va permettre de réaffirmer que «l’école de la République est une école égalitaire» et contribuer à lutter contre les inégalités.
«Il est clair qu’on ne récupérera pas ce qui a été perdu au cours des trois derniers mois», nuance-t-elle. «Mais on espère, en revanche, qu'avec des enfants plus socialisés, on va pouvoir leur donner l'envie de revenir à l’école. Dans le même temps on va pouvoir mieux préparer la rentrée de septembre pour voir comment on remet à plat les apprentissages et les programmes», explique-t-elle.
De son côté, Sylvie Dieu Osika a aussi remarqué que ce sont plutôt les familles les plus défavorisées qui sont les plus anxieuses à l'idée de remettre leurs enfants à l'école.
«Ce sont des familles très angoissées qui ont reçu des informations en pagaille sur le virus. Et étant donné que, jusqu'à présent, elles n'étaient pas obligées d'emmener leurs enfants à l'école, elles ont pu parfois les laisser aussi trop longtemps devant les écrans», dit-elle.
Un cas de figure qui s'est également retrouvé chez beaucoup de parents qui, pour pouvoir télétravailler dans de petits logements, se sont souvent retrouvés à «mettre une tablette entre les mains des enfants».
Reste l'argument sanitaire, avec la crainte d'attraper le virus qui conduire certaines familles à ne pas vouloir remettre leurs enfants à l'école, malgré l'obligation.
«Les enfants ne sont pas très contagieux, voire pas du tout. Il y a, selon moi, plus de risques à les laisser à la maison du point de vue de leur développement personnel que l'inverse», balaie Sylvie Dieu Osika.
Un message que la pédiatre répète d'ailleurs souvent aux familles venant la voir en consultation. Et il «est plutôt bien reçu dans l'ensemble», assure-t-elle.