Foudroyées par le coronavirus, les entreprises françaises ont pu compter sur Bpifrance pour passer ce cap compliqué. A l’heure du déconfinement, Patrice Bégay, directeur exécutif de la banque française d’investissement, entend toujours les accompagner, en confiance, dans leurs projets. Et pour y parvenir, la communication, mais aussi les médias, ont, selon lui, un rôle fondamental à jouer.
Pour soutenir les entreprises face au coronavirus, le gouvernement a lancé, le 25 mars dernier, le Prêt Garanti par l’Etat (PGE). Quel bilan tirez-vous de ce dispositif, alors que le déconfinement a commencé ?
Le prêt garanti par l’Etat a été mis en place en un temps record par les banques et les pouvoirs publics. Ce dispositif a permis d’accompagner les entreprises de façon tout à fait exceptionnelle.
Les banques ont fourni un soutien incroyable et le défi a été relevé. Après deux mois, on compte plus de 500.000 demandes pour plus de 100 milliards d’euros, pour les entreprises et professionnels dont l’activité économique a été frappée par le coronavirus et la période de confinement.
Chaque entrepreneur peut demander le PGE à son banquier habituel jusqu’au 31 décembre 2020. Dans cette guerre contre l’épidémie, le PGE a permis de préparer le rebond tout en sauvegardant des milliers d’emplois, en complément du chômage partiel.
D’un point de vue économique, comment voyez-vous le fameux «jour d’après» ? Sur quelles bases les entreprises peuvent-elles ancrer leur reprise ?
Comme je le dis souvent, le jour d’après, c’est déjà hier. Nous faisons face non pas à un nouveau monde, ou une nouvelle ère, mais au démarrage d’un nouveau projet, d’une nouvelle histoire.
N'attendons pas que les choses se passent. La crise sanitaire a mis l’économie à genoux mais a révélé la vraie fraternité. La solidarité a aussi été très forte entre les chefs d’entreprise et tous ceux qui font revivre la France.
Cette crise nous aura au moins appris une chose : revenir à l'essentiel en prenant conscience que nous abîmions notre bien le plus précieux : notre planète. Alors maintenant que nous avons ouvert les yeux, relevons-nous, regardons dans la même direction et soyons prêts à faire front.
C’est d’ailleurs pourquoi, je vous l’annonce, Bpifrance a décidé de lancer, dès aujourd’hui, lundi 25 mai, une nouvelle campagne baptisée : «Entrepreneurs, on se relève et on se révèle», qui porte précisément ce message.
En quoi cette nouvelle campagne va-t-elle consister ?
Cette campagne consiste principalement en un spot radio et télé d’une quinzaine de secondes pour dire aux entrepreneurs : «Entrepreneurs, on se relève et on se révèle ; Bpifrance et votre région croient en vous». Elle sera également visible en presse écrite et durera un mois environ.
La crise sanitaire a beaucoup détruit sur son passage. Ce sont des millions de gens qui vont devoir se relever et en même temps se révéler. Demain, un nouveau modèle économique doit émerger, fondé avant tout sur la solidarité.
Bpifrance lance une grande campagne de communication au moment-même où les marques, Covid-19 oblige, réduisent drastiquement leurs investissements en communication. C’est aussi une dynamique de confiance que vous voulez insuffler ?
Absolument. La communication est véritablement un déclencheur de confiance. Et si aujourd’hui, la confiance fait défaut, communiquer permet de retrouver confiance. La communication est vraiment centrale.
En période de crise, les vieux réflexes ont parfois la vie dure. Les investissements en communication sont revus à la baisse alors que c’est justement lors de ces périodes, comme celle que nous vivons, qu’il faut aller encore plus de l’avant pour atteindre de nouveaux prospects.
C’est dans ces moments-là qu’il faut davantage convaincre, transmettre, et donc communiquer. Il est fondamental d’innover par différents biais pour préparer l’avenir.
Lors de la crise sanitaire, les Français ont d’ailleurs largement plébiscité les chaînes d’info alors que celles-ci ont vu leurs revenus publicitaires s’effondrer. Est-ce là un paradoxe qui doit être corrigé ?
Pour moi, le message est clair : plus les marques peuvent continuer à investir en communication, durant la crise économique et en sortie de crise, plus les relances économiques seront soutenues. Cela a été démontré partout.
Pour vous donner un chiffre : un euro investi en communication génère en moyenne 7,85 euros de produit intérieur brut (PIB) en France. Ce qui fait de l’Hexagone, le pays dans lequel les investissements en communication sont les plus profitables.
Les Français ont besoin de leurs marques et les marques ont besoin des Français. Et cela très vite, dès maintenant. La baisse de l’encombrement publicitaire, est, selon moi, aussi une opportunité pour lancer une offensive en termes de parts de marché et commencer à poser les bases de la future reprise.
L’investissement dans les médias est à ce point primordial, qu’il répond à quatre principes fondamentaux :
Il faut soutenir les médias en période de crise d’abord parce qu’ils contribuent à la démocratie. Et il n’y a pas de relance économique possible sans une démocratie en bonne santé. Ensuite, s’il y a un affaiblissement des médias traditionnels, cela ne peut que profiter aux Fake news.
On constate également que beaucoup d’annonceurs rééquilibrent leurs investissements vers des marques de presse nationale parce que cela leur évite des dépendances trop fortes vis-à-vis des géants du Web. Enfin, les médias sont des tiers de confiance avec les lecteurs, les téléspectateurs, qui sont aussi des consommateurs.
En résumé, la relance profitera d'abord à ceux qui investissent dans leur communication et, qui, surtout, font preuve d’audace.
Ces investissements dans les médias que vous encouragez sont-ils valables pour tous les supports ?
Bien sûr ! Que ce soit dans le digital, les plates-formes de live, en print, à la télévision ou à la radio... toutes celles et ceux qui font vivre les marques, en consommant leurs produits et leurs services - et qui donc les soutiennent - ont besoin d’avoir de leurs nouvelles, de savoir ce que font les marques et où elles vont.
Pour moi, il est d’ailleurs impératif de continuer à communiquer via la presse papier, qui est le support que nous avons connu depuis notre enfance, celui qui, à travers la presse quotidienne nationale ou régionale, est resté au plus près des territoires.
Les quotidiens régionaux, de par leur proximité, leur service proposé, sont très prisés dans cette période de crise sanitaire. En communiquant dans ces journaux, les entreprises font la démonstration de leur utilité sociale au-delà même de la valorisation d’un produit ou d’un service.
Vous l’avez évoqué : cette crise a fait plus que jamais naître un besoin de revenir à l’essentiel et de prendre soin de notre planète. Concilier écologie et relance, c’est possible, selon vous ?
C’est non seulement possible mais c’est fondamentalement nécessaire. Si demain c’est l’urgence économique, c’est aussi et avant tout l’urgence sanitaire.
La planète a tiré la sonnette d’alarme pour nous rappeler que ce monde n’était et ne sera jamais dirigé par nous.
La planète Terre est de loin notre bien le plus précieux. C’est donc ensemble que nous devons lui faire honneur, en changeant nos comportements et nos mentalités pour bâtir un avenir stable aux générations futures.