Alors que le confinement dû à la pandémie de Covid-19 est déjà difficile à vivre pour la majorité des Français en bonne santé, on peut imaginer que cette période de crise sanitaire est une véritable épreuve pour les personnes hypocondriaques. Mais qu’en est-il vraiment ?
L’hypocondrie se caractérise par une peur excessive et obsessionnelle de la maladie. Dès le moindre symptôme suspect, une personne hypocondriaque «va s’imaginer atteinte d’une maladie rare et grave, possiblement mortelle, ce qui va envahir son champ de conscience», explique la psychologue et sophrologue Michèle Declerck.
Mais contrairement à ce que l’on peut penser, le risque d’être infecté en ces temps de pandémie n’a pas forcément multiplié leurs angoisses. Cette situation n’est pas si différente de ce qu’ils vivent depuis des années, a constaté la spécialiste, auteur de L’hypocondrie (éd. In Press), qui a réalisé une enquête auprès de ses patients au début du confinement.
pas de réel changement de comportement
«Ils n’étaient pas plus inquiets que d’habitude. Ils sont entrés dans un cercle qui ne les touche pas directement. Un hypocondriaque ne se concentre que sur sa propre santé, il n’est soucieux que de lui-même. Il a un tel niveau d’égocentrisme, qu’une maladie qui concerne tout le monde, les concerne ainsi beaucoup moins.», a-t-elle expliqué.
Malgré ce contexte particulièrement anxiogène, une personne atteinte d’hypocondrie «va continuer à être préoccupée, comme avant le confinement, par son estomac, ses crampes, ses maux de têtes…», a-t-elle souligné, précisant qu’il y a deux catégories d’hypocondriaques. Il y a ceux qui se soucient de ce que leur corps peut leur réserver de l’intérieur, et ceux préoccupés par ce qui pourrait venir de l’extérieur.
Et ce sont les personnes appartenant à cette deuxième catégorie qui sont le plus susceptibles de céder à la panique. «Or, cela n’a pas été spécialement le cas. Je n’ai pas noté un changement de comportement spécifique lié au contexte actuel. Le moindre petit symptôme du coronavirus ne les angoisse pas plus que tout un chacun.», ajoute la sophrologue.
Après six semaines de confinement, Michèle Declerck précise toutefois que, «L’hypocondriaque ayant besoin que l’on s’occupe de lui et d’être choyé, par la famille ou les professionnels de santé, peut se sentir délaissé. Dans un tout premier temps, ils ont vu le confinement comme une protection, mais maintenant il le voit comme une prison.»
les anxieux davantage impactés
De son côté, le psychologue Antoine Spath affirme également que «L’hypocondriaque n’a pas besoin d’un climat délétère pour pouvoir avoir une inquiétude quant à sa santé. Ce ne sont pas eux les plus angoissés.» Le spécialiste s’inquiète davantage pour «les personnes anxieuses que les hypocondriaques au sens classique du terme».
Selon lui, «Ce sont surtout ces personnes-là qui sont victimes de l’inquiétude générale actuelle. Le contexte réveille des crises de panique liées à la peur de la contamination, la peur d’être infecté, mais surtout la peur de transmettre le virus à autrui. Toute personne qui a une anxiété va développer une forme d’hypocondrie avec ce confinement.»
C’est pourquoi il est nécessaire «de parler et ne pas rester seule avec son angoisse. Il faut contacter sa famille ou des professionnels. Dès le moment où l’angoisse est mise en mots, elle a déjà tendance à se limiter», explique-t-il. On peut également faire des exercices de respiration, qui vont permettre «de réguler le rythme de sa vie émotionnelle, conseille Antoine Spath. Quand on contrôle sa respiration, on maîtrise ses angoisses.»