«Un fait de campagne massif», résume un proche du candidat EELV David Belliard : le retrait inattendu et soudain de Benjamin Griveaux rebat les cartes à Paris à un mois du premier tour des municipales, selon experts et politiques.
Le candidat investi par LREM en juillet, et proche d'Emmanuel Macron, a annoncé son retrait vendredi matin après la diffusion d'une vidéo intime via les réseaux sociaux.
Les Marcheurs sont atterrés, mais ne veulent pas se résigner à une défaite annoncée : la voix tremblante d'émotion, Marie-Laure Harel, une des porte-parole de campagne, veut croire que «la situation est récupérable». «Il y a une forte envie collective de continuer, c'est notre projet qui va gagner !»
La députée LREM Olivia Grégoire l'a assuré, plus tôt dans la matinée, à la nuée de caméras agglutinées devant le quartier général de campagne de l'ex-strausskahnien de 42 ans : il y aura «quoi qu'il arrive» une liste LREM aux élections municipales à Paris.
Au cours des multiples conciliabules qui s'enchaînent depuis la mi-journée, au siège du parti, plusieurs personnalités sont citées. «Celui d'Agnès Buzyn revient, mais on ne sait pas si elle en a envie», indique à l'AFP un des participants aux réunions, sous couvert d'anonymat. «C'est une personnalité intéressante» et «personne n'est contre», précise celui-ci.
Mais la ministre de la Santé a précisé vendredi n'avoir «ni réfléchi, ni d'avis à donner sur la situation à Paris».
Les autres noms sont ceux de «Jean-Louis Borloo, Marlène Schiappa, mais elle a dit qu'elle n'était pas intéressée», et ceux d'élus locaux comme «Delphine Bürkli (maire du IXe arrondissement, ex-LR), et du député Agir Pierre-Yves Bournazel», ancien candidat à la mairie de Paris, qui avait rejoint Benjamin Griveaux en janvier.
L'ancien candidat à l'investiture, Mounir Mahjoubi, s'est dit lui «disponible», après avoir envoyé dans les boucles Telegram, dans la nuit de jeudi à vendredi : «Si Benjamin Griveaux annonce qu'il se retire, je suis candidat et j'y vais, et j'aurai besoin d'un véritable soutien».
Les troupes poursuivent leurs réunions au siège du parti, se donnant «jusqu'à 48 heures» pour trouver un remplaçant, assure auprès de l'AFP un cadre.
Du dégoût
Pour le directeur général adjoint de l'Ifop, Frédéric Dabi, «LREM doit trouver un candidat extrêmement vite». Et pour cause : «On est à un mois du premier tour, et on est dans un cas totalement inédit (...). Le parti présidentiel arrivé en tête à Paris lors de la présidentielle, des législatives en 2017, et des élections européennes en mai, n'a pas de candidat».
Deux scenarii s'opposent : «Si c'est un membre du gouvernement qui est investi, ça donne alors une coloration nationale au scrutin», estime M. Dabi, et LREM peut ainsi espérer «remobiliser l'électorat macronien, mais avec un risque de vote sanction contre l'exécutif». Autre choix, celui d'investir «une maire bien implantée dans son arrondissement».
Chez les écologistes, on se désole : «La campagne va être parasitée par un élément presque de caniveau alors qu'on a tous des offres politiques très différentes», regrette-t-on dans l'entourage de David Belliard. Et le candidat EELV de déplorer l'intrusion dans la campagne d'«éléments qui n'ont rien à voir avec l'avenir de Paris».
«Quelle sera la configuration ?», s'interroge aussi un proche de la maire PS sortante Anne Hidalgo, jugeant dans tous les cas «l'offre de LREM très affaiblie».
«Nous avons des sujets très opérationnels à gérer», assure un membre de l'équipe de campagne sortante chez Benjamin Griveaux. «Pour des questions statutaires», la Commission nationale d'investiture devra se réunir pour choisir un candidat, assure-t-il.
«LREM a fait la promesse d'apporter une solution et un projet à Paris», rappelle ce cadre, conscient que l'équipe «a eu du mal» avec la dissidence de Cédric Villani. «Reste qu'aujourd'hui, l'épisode rebat les cartes», conclut-il, évoquant notamment la situation des écologistes d'EELV, «qui sont beaucoup plus haut que ce qu'on imagine».