Quand «Lotharå» s'abat deux heures durant sur Versailles, le 26 décembre 1999, c'est le désastre... Mais il est suivi très vite d'une extraordinaire mobilisation, qui se poursuit aujourd'hui, pour reboiser ce joyau forestier.
Sous l'effet des vents soufflant à 210 km/h, plus de 18.500 arbres seront touchés, fendus, déracinés au point de devoir être abattus, sur un total de 350.000. Des allées, routes, murs, grilles et canalisations, seront abîmés.
Le château lui-même sera touché mais bénignement: dizaines de vitres brisées, éléments de toiture arrachés.
Au total, la facture s'élèvera à 20 millions d’euros de travaux sur le domaine de 800 hectares et à 15 millions sur le château et ses bâtiments.
«La tempête passée, tout le monde était figé devant le spectacle de désolation; personne ne parlait, certains pleuraient devant les arbres arrachés, les trous béants», rapporte Samantha Boersma, alors chargée de la communication.
La photo du parc du Grand Trianon dévasté fera la une du New York Times. Comme Notre-Dame, Versailles est un symbole de la France à l'étranger.
Lothar confirme la fragilité des arbres centenaires et le bien fondé de l’intensification du programme de replantation lancé après une précédente tempête en 1990 (1.800 arbres abattus).
«10.000 arbres pour Versailles», souscription internationale lancée dès janvier 2000 par l'établissement public du musée et du domaine national de Versailles, va être un grand succès en trois ans. Collectivités, entreprises, fondations et particuliers réuniront plus de 2,5 millions d’euros. 10.000 arbres sont replantés.
Sur le site internet du château, un appel est lancé: «Adoptez un arbre». Moyennant 150 euros (1.000 francs d'alors), chaque donateur peut «adopter» un arbre et recevoir un certificat calligraphié à son nom ou au nom de la personne à laquelle l’arbre est dédié. Un plan est envoyé à chaque donateur afin de localiser l’arbre adopté.
5.000 particuliers français (40%) et étrangers (majoritairement américains) répondent à la souscription.
Une importante aide de l’État s'ajoute. Les mécènes apportent leur contribution à la restauration des bosquets, allées et parterres.
Le 21 octobre 2000, est organisée au Grand Trianon une vente aux enchères des plus beaux arbres abattus. Près de 50.000 euros sont récoltés pour remplacer des essences historiques par des espèces identiques.
De nombreuses plantations symboliques ont aussi lieu: à l’initiative du président slovaque, du chef indien Raoni, du Premier ministre du Canada, de la commune suisse d’Erables, etc...
Vingt ans après, les traces de Lothar sont largement effacées.
La recomposition de l’Allée de Saint-Cyr et la renaissance du Bosquet de la Reine parachèveront ce travail d'Hercule.
Des campagnes d'adoption sont proposées en 2020 pour la replantation de 450 chênes dans l’Allée de Saint-Cyr (1.500 euros par arbre) et pour celle des tulipiers de Virginie dans le Bosquet de la reine (1.000 euros). Une part de ces fonds vont à l'arbre lui-même, le reste à l'entretien global de ces espaces.
Lothar aura permis une régénération complète d’une végétation sénescente et la reconstitution des jardins dans leur état du XVIIe ou du XVIIIe siècles.