La mobilisation contre la réforme des retraites entre dans sa troisième semaine, sans grand espoir de compromis entre les syndicats et le gouvernement, qui reçoit jeudi les partenaires sociaux tous ensemble et veut encore croire à une trêve de Noël dans la grève des transports.
Les difficultés continuent pour les usagers de la RATP et de la SNCF : au 15e jour d'une grève illimitée, le trafic restera très perturbé sur les deux réseaux, même si une légère amélioration est attendue.
La compagnie ferroviaire devrait faire circuler 2 TGV sur 5 (contre 1 sur 3 mercredi), 4 TER sur 10 et un Transilien sur 4. La régie des transports parisiens a prévu de maintenir 6 lignes de métro fermées, 2 de moins que la veille. Les RER A et B ne rouleront qu'aux heures de pointe, qui s'annoncent à nouveau compliquées pour les automobilistes en Ile-de-France.
La CGT, Force ouvrière, la CFE-CGC, Solidaires et la FSU, qui réclament le retrait pur et simple du projet de système universel de retraite à points, se sont entendues pour organiser des actions jusqu'à fin décembre.
Et ce dès jeudi: des cortèges sont prévus dans plusieurs villes, même si ces initiatives à caractère local seront forcément moins massives que les manifestations des 5 et 17 décembre (806.000 et 615.000 personnes dans toute la France, selon le ministère de l'Intérieur). A Paris, un défilé reliera deux gares (Lyon et Est) à partir de 14H00.
Mais c'est vers Matignon que tous les regards vont rester tournés. Après avoir reçu les organisations syndicales et patronales les unes après les autres mercredi, le Premier ministre les réunit ensemble autour de la table jeudi après-midi pour une dernière "multilatérale" avant les vacances de Noël.
Edouard Philippe va-t-il indiquer la porte d'une sortie de crise?
«On a compris que sa détermination était complète, la nôtre l'est aussi», a lâché le secrétaire général de Force ouvrière, Yves Veyrier, à la sortie de sa bilatérale mercredi soir.
«Je ne suis pas sûr que, d'ici demain, quelque chose aura avancé, mais ce sera au Premier ministre de nous le dire», a dit un peu plus tôt le numéro un de la CFDT, Laurent Berger, «un peu fatigué» et «préoccupé».
«Très, très loin»
«On est très, très loin, encore, d'être accord», a résumé le responsable cédétiste, globalement favorable à la réforme mais toujours vent debout contre l'âge d'équilibre, assorti d'un bonus-malus, que le gouvernement veut introduire dès 2022 pour inciter à travailler plus longtemps et équilibrer les comptes.
Or le chef du gouvernement «tient» à cette mesure budgétaire, a déploré Laurent Berger.
Le camp réformiste a cependant senti «une volonté de discussion». A l'image de Laurent Escure (Unsa), qui a noté «des ouvertures» sur «la pénibilité, les fins de carrière, le minimum de pension», même si elles «restent à confirmer».
Edouard Philippe est en première ligne, aux côtés de Laurent Pietraszewski. Le nouveau «M. retraites» du gouvernement, tout juste nommé secrétaire d'Etat, a été jeté dans le grand bain à remous d'un conflit social au long cours.
Le dossier de son prédécesseur Jean-Paul Delevoye est, lui, déjà dans les mains de la justice: la Haute autorité pour la transparence a saisi mercredi le parquet pour ses «omissions" en «nombre».
Emmanuel Macron, pour sa part, surveille le devenir d'une réforme-clé de son quinquennat sans s'exprimer directement. Il a tout de même fait savoir mercredi qu'il était «disposé» à «améliorer» le projet, qui doit être transmis au Conseil d'Etat avant Noël et présenté en Conseil des ministres le 22 janvier.
«C'est dans l'ordre des choses qu'il y ait des avancées d'ici la fin de la semaine», a relevé l'Elysée, précisant que le chef de l'Etat s'était fixé pour «objectif d'obtenir une pause du mouvement social pendant les fêtes».
Un trêve ? Les Chambres de commerce et d'industrie la réclament, en faisant valoir que «les grèves actuelles dans les transports ont un impact négatif sur tous les secteurs de l'économie de notre pays».
En assemblée générale, les grévistes ne parlent pourtant pas de trêve mais de «lutte de Noël», à l'image de Bérenger Cernon, de la CGT-Cheminots.
A mesure que «les jours passent», a prévenu le patron de sa confédération, Philippe Martinez, «la colère peut se transformer en plus de colère». Et menacer les trains de Noël, dont la SNCF dira jeudi ceux qui circuleront.