En première lecture à l’Assemblée nationale ce lundi, la loi-antigaspillage, portée par la secrétaire d’État Brune Poirson, avait été votée presque à l’unanimité au Sénat en septembre dernier. Pourtant, une mesure n’est pas passée du côté des sénateurs : la mise en place des consignes pour les bouteilles en plastique.
Dans son projet de loi sur l’économie circulaire, la secrétaire d’État Brune Poirson souhaite mettre en place ce système pour les bouteilles en plastique et les canettes de boisson. L’objectif serait d’améliorer la collecte en incitant les Français à déposer leurs bouteilles en plastique dans des points de collecte pour qu’elles soient recyclées. L’Union européenne impose aux pays membres un taux de 77% de plastique recyclé d’ici 2025 et de 90% d’ici 2029, alors que la France n’atteint aujourd’hui que 57%.
LES ÉCOLOGISTES ET SÉNATEURS REJETTENT LA MESURE
Un «non-sens écologique», avaient dénoncé les sénateurs lors de l’examen du projet de loi au Sénat en septembre, ne validant que la consigne pour réemploi. Même son de cloche du côté des associations de défense de l’environnement et de lutte contre le gaspillage : si le retour de la consigne des bouteilles en verre est défendue par les écologistes, encourager le recyclage des bouteilles n’est pas une solution efficace et durable dans la lutte contre le plastique.
Pour ZeroWaste France, «la consigne sur les emballages jetables pourrait entretenir l’idée que le recyclage est suffisant pour résoudre les problèmes environnementaux liés à la surconsommation et que les ressources sont infinies, puisqu’elles sont recyclées.» Les ONG souhaitent plutôt favoriser les emballages réutilisables et durables plutôt que le recyclage des emballages à usage unique. Aujourd’hui, les bouteilles recyclées ne comportent en moyenne que 25% de plastique recyclé.
des GAGNANTS ET des PERDANTS
Les collectivités territoriales se sont également opposées à cette mesure. Aujourd’hui, ce sont elles qui s’occupent de la collecte des déchets recyclables jetés dans les poubelles jaunes, et revendent ces déchets à des sociétés spécialisées dans le recyclage. Le prix d’une tonne de déchets plastique s’élève à environ 250 euros, ce qui représente une grande source de financement pour les collectivités.
Les sénateurs ont pointé du doigt le risque de lobbying des industriels de la boisson, au détriment des collectivités. Les villes ont investi beaucoup d’argent dans la filière du recyclage. Si les bouteilles consignées retournent en magasin, elles ne passeront plus par les services de recyclage des collectivités. Pour l’association des petites villes de France (APVF), le retour de la consigne «va à l’encontre du système actuel de collecte et rend obsolètes les investissements des collectivités».
Les industriels de la boisson soutiennent quant à eux le projet de loi. Ils payent aujourd’hui l’«éco-contribution», une taxe qui finance le recyclage. La consigne remplacerait donc cette taxe. Les consommateurs payeront quelques centimes de plus lors de l’achat de leurs bouteilles, et pourront récupérer cette somme en rapportant la bouteille en magasin. S’ils ne le font pas, cette somme d’argent reviendra aux industriels.
Face aux vives oppositions à cette mesure, le gouvernement propose une expérimentation dans les territoires volontaires avant une éventuelle application sur l'ensemble de l'hexagone en 2023.