Le Premier ministre Edouard Philippe est attendu ce samedi 26 octobre en Guadeloupe où de nombreux pays sont réunis en sommet afin de partager leurs connaissances sur les sargasses, ces algues brunes nauséabondes qui polluent le littoral caribéen. Mais que sait-on exactement de cette plante devenue incontrôlable ?
Une algue connue depuis très longtemps
Si la sargasse fait beaucoup parler d'elle ces dernières années, elle n'a pourtant rien de nouveau. Cette algue aux tons sombres, connue depuis très longtemps, est à ce point légendaire qu'elle a même donné son nom à une mer, la mer des Sargasses, située au large des Bermudes et de la Floride.
Dans son voyage à destination des Indes orientales par l'ouest, le navigateur génois Christophe Colomb les avait d'ailleurs décrites le premier. La plupart des espèces qui appartiennent à la famille sargassum vivent ainsi amarrées aux fonds marins, mais deux types particuliers, sargassum fluitans et sargassum natans, flottent à la surface des océans.
Ces algues forment des radeaux mobiles qui peuvent atteindre des volumes impressionnants de plusieurs centaines de mètres carrés sur plusieurs mètres de profondeur, se déplaçant dans l'Atlantique.
Autre particularité : elles ont une capacité de prolifération hors du commun qui s'explique par le fait qu'un simple morceau coupé peut donner naissance à une nouvelle algue entière.
[Un exemple de sargasses en Martinique]
Jusqu'à présent, l'homme s'était habitué à la plante, d'autant qu'elle restait somme toute assez localisée. Mais aujourd'hui, il n'arrive plus à la dompter, l'algue s'étendant bien plus au sud, allant jusqu'à former une nouvelle mer des sargasses indépendante.
C'est ainsi que, depuis une quinzaine d'années environ, les sargasses s'échouent en grande quantité et de plus en plus souvent sur les plages des Antilles.
Puis, une fois sur le littoral, elles pourrissent et mettent à mal des organismes primordiaux pour l'écosystème (coquillages, coraux...). Surtout, lorsqu'elles s'échouent, elles dégagent de l'hydrogène sulfuré, un gaz très toxique dangereux pour l'homme.
Pourquoi prolifèrent-elles seulement aujourd'hui ?
Actuellement, les spécialistes ne s'expliquent toujours pas pourquoi les sargasses ont autant proliféré, au point d'échapper à l'homme.
Selon eux, il n'y aurait toutefois pas une raison unique pouvant expliquer le développement hors de contrôle des sargasses sur l'arc antillais mais plutôt un ensemble de facteurs.
Si les scientifiques pensent que la température joue un rôle déterminant, la composition de l'eau, les différents nutriments ou encore les vents et les courants marins pourraient aussi expliquer le phénomène.
Du 23 au 26/10 @CRGuadeloupe & #État organisent la conférence internationale sur les #sargasses
L'occasion de mieux comprendre le phénomène à l'échelle de la #Caraïbe,mais aussi de présenter ls projets déjà mis en œuvre & d’apporter des réponses fonctionnelles & opérationnelles pic.twitter.com/q6mkipxIHp— Préfet de Guadeloupe (@Prefet971) October 22, 2019
Certains chercheurs estiment aussi que l'explication est à trouver du côté du fleuve Amazone. En charriant énormément de matières en suspension, celui-ci constitue autant de nutriments potentiels pour certains organismes, dont les algues.
Enfin, une des raisons débattues est aussi l'augmentation de l'activité agricole et de la déforestation.
Seule certitude, loin d'être la plus réjouissante, tout porte à croire que les sargasses vont perdurer.
Le principal enjeu va donc consister à apprendre à vivre avec et trouver des mesures pour protéger les sites les plus fragiles.
Ce sont les échouages qui sont dangereux, pas l'algue en elle-même
Dans ce contexte, le but des scientifiques est déjà de comprendre le phénomène dans toute sa globalité. Pour ce faire, ils ont recours aux satellites pour détecter et suivre au mieux les sargasses.
Cela permet, le cas échéant, d'alerter les pouvoirs publics et de mettre en place les actions adéquates.
Pour autant, prévoir à l'avance les échouages des sargasses n'est pas envisageable. Connaître les périodes où ces échouages ont le plus de chances de se produire est un objectif plus raisonnable.
Les chercheurs tiennent néanmoins à souligner que les sargasses ne constituent pas, en elles-mêmes, un fléau dont il faut absolument se débarrasser.
L'algue devient un problème lorsqu'elle s'échoue sur le littoral. En pleine mer, elle n'est ni toxique, ni nocive et a même un rôle écologique. A telle enseigne que la sargasse en mer sert de refuge à nombre d'espèces de poissons, voire de nid à d'autres spécimens.