A l’occasion de la journée mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer, qui se tiendra ce samedi 21 septembre, la Fondation pour la recherche médicale (FRM) lance la deuxième édition de l’événement national médiatique «Une Journée pour se souvenir», dont le journaliste et écrivain Bernard Pivot est ambassadeur pour la première fois cette année.
Ce jour-là, plusieurs chaînes de télévisions, dont CANAL+, rediffuseront symboliquement un souvenir inscrit dans la mémoire des téléspectateurs : leur jingle publicitaire historique, celui dont on se souvient et que l’on ne peut pas oublier afin de ne pas oublier que malheureusement, 900 000 Français n’ont pas cette chance.
Pourquoi avoir choisi de vous engager en faveur de la lutte contre la maladie d’Alzheimer ?
Parce que j’ai 84 ans, que pour le moment cette maladie d’Alzheimer ne m’a pas touché. J’y ai échappé, mes parents aussi, il n’y a pas de personnes atteintes dans ma famille, ce qui est une chance considérable. Cette chance me pousse à intervenir pour que les gens prennent conscience de l’étendue du fléau - près d’un million de personnes sont touchées actuellement par Alzheimer en France - et pour qu’ils aient la générosité d’envoyer un peu d’argent à la Fondation pour la recherche médicale.
Justement, en quoi est-il si important de soutenir les travaux de la Fondation pour la recherche médicale ?
Tout simplement parce que la maladie d’Alzheimer est encore très mal connue par les chercheurs, par les médecins, par les neurologues. Il y a de très nombreuses équipes qui se sont lancées dans la recherche pour identifier les symptômes et pour un jour guérir de cette maladie. Les avancées sont importantes mais très lentes.
Il faut beaucoup d’argent pour alimenter cette recherche, qui un jour aboutira. Il faut être optimiste, un jour on saura pourquoi cette maladie se déclare et comment la juguler. Mais pour le moment, nous n’en sommes qu’au stade des recherches, et donc à inciter le public à apporter sa contribution.
En tant qu’homme public, dont la parole est reconnue et respectée, quel message aimeriez-vous faire passer aux gens pour qu’ils prennent conscience de l’importance d’agir ?
J’ai envie de dire aux personnes qui parfois m’écoutent ou me lisent, que si elles peuvent le faire et comprendre ce qu’elles entendent ou lisent, demain elles n’en seront peut-être plus capables. Il faut profiter du fait d’avoir actuellement une tête bien faite et bien pleine pour s’associer à la recherche contre la maladie d’Alzheimer.
La campagne met l’accent sur la perte de mémoire, l’un des premiers symptômes de cette maladie. Quel est votre rapport aux souvenirs et à la mémoire ?
On me demande souvent de piocher dans mes souvenirs, pour répondre à des questions. Par exemple, quelle a été ma plus belle interview dans «Apostrophes» (une émission littéraire culte créée et présentée par Bernard Pivot de 1975 à 1990, nldr). Mais j’ai envie de dépasser ce stade personnel pour dire que nous ne pouvons pas fonctionner, nous ne pouvons pas vivre sans mémoire. C’est impossible.
Nous avons un art de vivre, de se conduire, une morale que nous puisons sans arrêt dans notre expérience. Celle-ci est valorisée par tous les souvenirs que nous avons accumulés, au fil de nos années. La mémoire est essentielle au bonheur de vivre. Ceux qui la perdent, perdent en même temps ce bonheur de vivre.
Les problématiques liées à la maladie d’Alzheimer ont-elles influencé votre travail d’écrivain ?
Non, mais quand j’ai écrit «Les mots de ma vie», j’ai beaucoup insisté sur l’usage des mots. Si je n’ai pas l’usage des mots, je ne peux pas vous parler. Il n’y a d’intelligence que dans l’utilisation rationnelle, bonne, des mots. Et tous ces mots, le jour où vous êtes frappé par la maladie d’Alzheimer, vont vous échapper.
Ils viendront à votre tête mais dans un désordre absolument effarant, d’une cocasserie noire, terrible. De sorte qu’à ce moment-là, les gens qui sont autour des personnes frappées par cette maladie prennent conscience de l’importance fondamentale des mots dans le fonctionnement de la mémoire.
J’ai également écrit un livre qui s’intitule «La mémoire n’en fait qu’à sa tête», où j’ai puisé des souvenirs que j’ai mis sur le papier. Mais le jour où la mémoire et la tête ne fonctionnent plus ensemble, c’en est fini du plaisir de vivre. C’est un drame terrifiant, non seulement pour la personne atteinte de la maladie d’Alzheimer mais aussi pour tout son entourage.
D’où l’importance, selon ce qu’on peut, de faire un chèque petit, moyen ou gros et l’envoyer à la Fondation pour la recherche médicale. Il sera magnifiquement employé pour détecter les symptômes de la maladie d’Alzheimer et pour un jour, la vaincre.
Jusqu'au 22 septembre, le grand public pourra s’informer sur la maladie et soutenir les travaux de recherche en faisant un don de 10 euros en envoyant SOUVENIR par SMS au 92300 (10 euros prélevés sur facture mobile), par car bancaire directement sur le site de la Fondation Recherche Médicale, ou encore par chèque, à l’ordre de la FRM, envoyé au 54 rue de Varenne, 75007 Paris.