Bisphénols, phtalates, solvants, parabènes... Une vaste étude publiée mardi montre que six «polluants du quotidien» dont on connaît encore mal les effets «sont présents dans l'organisme de tous les Français», alors que le gouvernement présente sa feuille de route contre les perturbateurs endocriniens.
Pour la première fois, Santé publique France a mesuré les niveaux d'imprégnation de la population française par six familles de substances polluantes présentes dans l'environnement et a cherché à identifier les sources d'exposition probables - produits ménagers, cosmétiques, emballages alimentaires, etc.
«Nous nous sommes intéressés à ces substances parce qu'il y a une préoccupation sanitaire, mais en aucun cas on ne peut prédire si les valeurs retrouvées représentent un risque sanitaire pour la population», car on manque encore de connaissances sur le sujet, a précisé à l'AFP Clémence Fillol, responsable de la surveillance biologique à Santé publique France.
L'organisme public rappelle toutefois que certains de ces produits sont des perturbateurs endocriniens ou des cancérogènes avérés ou suspectés.
Les substances recherchées sont les bisphénols (A, S et F), les phtalates, les parabènes, les éthers de glycol, les retardateurs de flamme bromés et les composés perfluorés.
Pour la plupart des substances, les niveaux d'imprégnation retrouvés sont «comparables à ceux d'autres études menées à l'étranger, notamment aux Etats-Unis et au Canada». Ils étaient toutefois plus faibles pour les parabènes et les retardateurs de flamme.
Ces résultats s'inscrivent dans le cadre d'Esteban - Etude de santé sur l'environnement, la biosurveillance, l'activité physique et la nutrition -, un programme de recherche lancé en 2014 pour suivre l'état de santé de la population française, et en particulier son exposition aux polluants.
Les mesures ont été réalisées entre 2014 et 2016 sur un échantillon représentatif de la population générale, composé d'environ 1.100 enfants et 2.500 adultes habitant en France continentale.
Les participants ont également répondu à des questionnaires sur leurs habitudes de vie, qui permettent de faire des hypothèses sur les sources d'exposition aux polluants.
Les résultats montrent notamment que «l'utilisation de produits cosmétiques et de soins augmente les niveaux d'imprégnation des parabènes et des éthers de glycol» et que «plus le logement est aéré» fréquemment «plus les niveaux d'imprégnation» en composés perfluorés et en retardateurs de flamme bromés «sont bas».
Santé publique France souligne aussi que «des niveaux d'imprégnation plus élevés sont retrouvés chez les enfants» comparativement aux adultes, ce qui peut s'expliquer par le fait qu'ils touchent et portent davantage les objets à la bouche, qu'ils sont plus exposés aux poussières domestiques ou que leur poids est relativement plus faible par rapport à leurs apports alimentaires.
Cette étude permet «d'établir pour la première fois des valeurs de référence d'imprégnation dans la population générale», explique Santé publique France.
C'est-à-dire qu'elle permettra de suivre l'évolution dans le temps de cette exposition et de déterminer si un groupe donné est surexposé à un polluant par rapport au reste de la population.
Deux autres volets de l'étude, portant sur l'exposition aux métaux et aux pesticides, seront publiés ultérieurement, a précisé Santé publique France.