Le Premier ministre Edouard Philippe lance, ce mardi 3 septembre, le Grenelle des violences conjugales. Alors que les associations ont recensé, pour cette année, au moins 100 féminicides, le but est d'apporter des mesures concrètes pour faire reculer ce fléau. Et les chiffres entourant ce phénomène montrent qu'il y a urgence.
220.000 femmes victimes de violences
En France, chaque année, environ 220.000 femmes adultes sont victimes de violences physiques et/ou sexuelles de la part de leur conjoint ou ex-conjoint.
Parmi elles, 3 femmes sur 4 déclarent même avoir subi des «faits de violences répétés» et 8 sur 10 auraient également été soumises à des atteintes psychologiques et/ou des agressions verbales.
12 % des Françaises ont déjà été victimes de viols
Selon une étude de l'institut Ifop pour la Fondation Jean Jaurès, réalisée auprès de 2.167 femmes de 18 ans et plus, 12 % ont été victimes d'un ou plusieurs viols au cours de leur vie.
Elles sont également 43 % à déclarer avoir subi des gestes sexuels sans leur consentement.
149 meurtres par conjoints recensés en 2018
Dans son dernier rapport, divulgué en juillet dernier, la Délégation d’aide aux victimes (DAV) a rendu public les chiffres des homicides au sein du couple de l’année 2018.
Pour l'année dernière, ce bilan s’établit ainsi à 149 homicides, dont 121 femmes et 28 hommes (contre 151 en 2017 et 157 en 2016).
21 enfants victimes collatérales l'an passé
A ces 149 victimes, s'ajoutent également 21 enfants tués dans le cadre de ces morts violentes au sein du couple.
La Délégation d'aide aux victimes produit depuis 2006 l'étude nationale sur les morts violentes au sein du couple recensées sur une année civile.
Ces données sont les plus fiables, puisqu’elles croisent les statistiques de la police et de la gendarmerie, les éléments remontés des enquêtes de terrain et les éléments issus des procédures.
47,7 % des décès au sein de couples mariés
L'an passé, 47,7 % des décès liés aux violences conjugales sont survenus au sein de couples mariés, contre 22,1 % au sein de couples en concubinage.
La présence d’alcool dans le sang au moment de la commission du crime a été constatée dans 29,5 % des affaires. Celle de stupéfiants dans 12,1 % des affaires.
Hommes ou femmes, la dispute reste le premier motif de passage à l'acte.
31,8 % des féminicides commis par arme à feu
En 2018, 31,8 % des féminicides ont été commis par arme à feu et 31,30 % l'ont été avec une arme blanche. Les coups ne sont avérés «que» dans 7 % des cas.
On dit souvent « morte sous les coups de son conjoint ».
En réalité le « mode opératoire » le plus largement recensé est l’arme à feu (31,8%)
Ensuite l’arme blanche (31,30%)
Mais les « coups » aussi, comme la strangulation, l’incendie, la projection dans le vide...— MarleneSchiappa (@MarleneSchiappa) September 1, 2019
Dans ce contexte, Marlène Schiappa, secrétaire d'Etat à l'Egalité femmes-hommes et à la lutte contre les discriminations, a indiqué que la statistique communément admise selon laquelle «une femme meurt tous les trois jours tuée sous les coups de son compagnon ou ex-compagnon» était inadaptée.
23 % des victimes de féminicides avaient, en 2018, entre 40 et 49 ans
Toujours selon le dernier rapport de la Délégation d'aide aux victimes, l'année dernière, 23 % des victimes de féminicides avaient entre 40 et 49 ans. Il s'agit de la tranche d'âge la plus représentée.
Hommes ou femmes, dans l’immense majorité des cas (124 affaires sur 149, soit 83,2 %), le meurtre est commis au domicile du couple, de la victime ou de l’auteur.
530 millions d'euros alloués à l'Egalité femmes-hommes
En 2019, 530 millions d'euros sont dédiés à l'Egalité femmes-hommes indique le secrétariat d'Etat dédié.
Toujours selon le secrétariat d'Etat à l'Egalité femmes-hommes et à la lutte contre les discriminations, il y a eu, en 2019, une hausse de 30 % des subventions allouées aux associations qui traitent de violences conjugales (79 millions au total en 2019).
Le #GrenelleViolencesConjugales sera un temps d’engagement politique fort de la part du gouvernement avec de nouvelles mesures #Réagir3919
@MarleneSchiappa nous explique les objectifs de ce Grenelle pic.twitter.com/MtXMsfzWuY— Secrétariat d’État chargé de l'Égalité (@Egal_FH) September 2, 2019
Récemment, Marlène Schiappa a lancé un fonds spécial d’un million d’euros pour les associations locales de terrain baptisé «Fonds Catherine contre les féminicides».
Pourquoi «Catherine» ? Parce qu’il y a, en France, autant de femmes victimes de violences que de femmes qui s’appellent «Catherine» (environ 220.000 comme évoqué plus haut).
Les associations réclament un milliard d'euros pour faire face aux féminicides
Evoquant souvent l'Espagne, pays en pointe dans la lutte contre les féminicides, les associations intervenant dans le champ des violences conjugales indiquent qu'il faudrait mettre sur la table la somme d'un milliard d'euros pour faire baisser significativement le nombre de femmes tuées en France.
Un chiffre que Marlène Schiappa tient toutefois à nuancer. Il s'agit, a-t-elle rappelé, d’une déclaration d’intention sur cinq ans en faveur de l’Egalité femmes-hommes au global, donc un milliard divisé par cinq et cette somme (non dépensée, souligne-t-elle) concerne aussi bien le sport féminin que les formations en entreprise.
3,6 milliards euros de dépenses engendrées par les violences conjugales
c'est, selon les associations, ce que coûteraient, au global, les violences conjugales à la société.
Elles se basent sur une étude qui, en 2015, s'était essayée à chiffrer l'impact financier de ces violences.
Selon les chercheurs de différentes structures de recherche dont le Centre d'Études Européennes de Sciences Po, les répercussions économiques de ces violences et leurs incidences sur les victimes en France pour l'année 2012 ont ainsi été estimées à 3,6 milliards d'euros, en hypothèse basse.