Quelque 10.500 «foulards rouges» ont défilé dimanche à Paris, selon la préfecture de police, de la place de la Nation à la Bastille pour «défendre la démocratie et les institutions» face aux violences qui ont émaillé la mobilisation des «gilets jaunes».
Le chiffre est finalement conforme à l'espoir d'avoir 10.000 participants «minimum» affiché par les organisateurs de cette «Marche républicaine des libertés».
Alors que la tête du cortège scandait «Oui à la démocratie, non à la révolution !» sous une banderole «Stop aux violences», les manifestants, avec dans leurs rangs une proportion élevée de tempes grises et de sympathisants de La République en marche (LREM), arboraient quelques drapeaux français et une poignée de drapeaux européens, ont indiqué nos confrères de l'AFP.
A l'arrivée place de la Bastille, les participants ont essuyé les huées et invectives de quelques dizaines de «gilets jaunes» postés sur les marches de l'opéra, sous deux banderoles : «Macron Destitution», et «Tout brûle déjà».
Les «foulards rouges» ont répondu à l'«appel à la majorité silencieuse qui reste terrée chez elle depuis dix semaines», plaidé par l'initiateur de la «Marche républicaine des libertés», Laurent Soulié.
C'est depuis sa page Facebook «STOP. Maintenant, ça suffit« que cet ingénieur toulousain de 51 ans a lancé mi-décembre l'idée de cette marche, «comme une bouteille à la mer», quand il a compris que «le mouvement n'allait pas s'apaiser».
Il a ensuite été rejoint par le collectif des «foulards rouges», né fin novembre pour protester contre les blocages, à condition que le défilé ne soit pas une manifestation de soutien au président Macron mais, plus largement, à la République.
«La colère a été entendue, les revendications étaient légitimes mais nous dénonçons la forme, les violences systématiques, la haine contre les élus, les journalistes. Aujourd'hui, on n'est plus dans une contestation sociale», a déclaré Laurent Soulié, initiateur de la marche, lors d'un point presse.
LREM en retrait
Nombre des «foulards rouges» interrogés par l'AFP avant la manifestation disaient avoir partagé certaines revendications des «gilets jaunes», mais rejeter la violence «contre les institutions».
«Les 'gilets jaunes' organisent des choses à côté, toujours à côté, comme s'ils ne voulaient pas reconnaître le droit des institutions», a ainsi témoigné Eddy Frogeais, 49 ans, un Breton salarié d'une association. Il souhaite aujourd'hui «une trêve» dans les manifestations pour que le dialogue «se mette en place».
Caroline Garcin, une ancienne infirmière de 41 ans originaire de Montpellier et qui vit aujourd'hui de l'allocation adulte handicapée, dit avoir retrouvé avec les «foulards rouges» «une France éveillée, apaisée et respectueuse». Elle refuse «d'être prise en otage», «qu'on dise que notre pays est une dictature» et n'accepte pas «qu'on appelle au lynchage et à tuer du flic».
Si Laurent Soulié est un sympathisant assumé de La République en marche (LREM), le parti présidentiel et la majorité se sont tenus à l'écart de cette initiative, qui lui est sympathique mais entre en collision avec l'esprit d'apaisement voulu pour le grand débat national qu'a lancé la semaine dernière Emmanuel Macron.
«On a forcément des sympathies pour ceux qui disent qu'ils veulent le retour au calme, mais on est dans le moment du grand débat», a expliqué samedi à l'AFP la ministre des Affaires européennes Nathalie Loiseau: «Et même quand une cause est sympathique et juste, on doit penser à ne pas compliquer les choses».
Du côté des «foulards rouges», on s'efforce de dissocier le souci de libérer la parole de ceux qui ne se sentent pas «gilets jaunes», et un quelconque soutien au chef de l'Etat. Les députés LREM qui ont prévu de participer à la marche le feront à titre individuel.
«Je pense aller à la manifestation sans écharpe, sans marquage, sans rien, dans un bon état d'esprit, quelques instants pour montrer qu'il y a aussi des gens qui sont aux côtés du gouvernement», annonce ainsi la députée de Paris Olivia Grégoire.
Enfin, plusieurs «foulards rouges» ont fait état de «menaces» sur les réseaux sociaux, où un appel à une contre-manifestation a été lancé.