Après une nouvelle journée d’action des gilets jaunes, samedi dernier, le grand débat national s’ouvre ce mardi. Annoncé par Emmanuel Macron, le 10 décembre, lors de son allocution télévisée, il doit se poursuivre jusqu’au 15 mars prochain.
Pendant deux mois, les citoyens pourront exprimer leurs attentes, et une plate-forme sera dédiée à partir de la semaine prochaine sur le site granddebatnational.fr. L’objectif affiché est de taille : répondre à la grogne sociale qui secoue le pays depuis la mi-novembre et trouver – enfin – une issue à la crise.
Une organisation complexe
Si elle sera animée notamment par deux membres du gouvernement, la grande consultation se déroulera au plus près des citoyens. L’exécutif a ainsi souhaité faire des maires un rouage essentiel du débat, en leur demandant d’en faciliter le bon déroulement sur le terrain. Les communes devront par exemple mettre à disposition des locaux pour accueillir les réunions publiques. Des cahiers de doléances, mis à disposition des administrés dans les mairies depuis le mois de décembre, viendront eux aussi nourrir le débat.
Toujours dans un souci de toucher le plus grand nombre de participants, le site internet permettra aux personnes d’envoyer directement leurs revendications. Celui-ci permettra également de centraliser les dates et les lieux des rendez-vous. Politiciens, associations ou même simples citoyens pourront être à leur initiative. Les élus auront la charge de faire remonter la teneur des propos.
Macron donne les contours
Les contours de cette consultation inédite ont été définis dimanche par Emmanuel Macron. Dans sa lettre aux Français, il a listé plus de trente questions, sur quatre grands thèmes : démocratie, fiscalité, pouvoir d’achat et transition écologique. Mais s’il a tenu à insister sur le fait qu’aucun sujet ne sera tabou, le chef de l’Etat a néanmoins déjà placé des barrières qu’il ne faudra pas franchir. Ainsi, il ne reviendra pas sur la suppression de l’ISF, pourtant largement contestée par les gilets jaunes. Même chose concernant la remise en cause du droit d’asile, bien qu’une ouverture ait été laissée concernant des quotas annuels d’immigration. La peine de mort, l’IVG et le mariage pour tous ne seront pas non plus au programme. Après le 15 mars, l’exécutif a indiqué qu’il se donnerait un mois pour faire des propositions.
Un enjeu primordial
Emmanuel Macron a également pris soin d’affirmer dans sa lettre que le débat ne serait «ni une élection, ni un référendum». Une précaution utile, car il fait face à une opposition vindicative. Chez les gilets jaunes, la défiance ne faiblit pas, et beaucoup d’entre eux parlaient même d’«enfumage» sur les réseaux sociaux, à propos de sa lettre.
«Si le grand débat ne fonctionne pas, il y aura une sanction immédiate dans les urnes lors des européennes (en mai)», estime le politologue Philippe Moreau-Chevrolet. «Cela marquerait alors un coup d’arrêt pour sa politique et pourrait provoquer une crise extrême pour son parti». Et l’initiative s’annonce d’autant plus risquée que, selon de récents sondages, seulement 29 % des Français pensent que le grand débat aboutira à des mesures utiles.