Alors que les élections européennes de mai 2019 approchent, la probabilité de voir des gilets jaunes candidats est de plus en plus grande. Le RN, le PCF et les Patriotes veulent en intégrer sur leur liste, tandis que certains manifestants souhaitent quant à eux se présenter sous leur propre bannière.
Au sein de certains partis politiques, les gilets jaunes attisent les convoitises, après six semaines de manifestations soutenues par une grande partie de l'opinion publique. C'est le cas notamment au Rassemblement national (RN), où le député européen Nicolas Bay s'est dit prêt à «accueillir» des membres du mouvement sur la liste du parti d'extrême-droite aux européennes. «Nous tendons la main à tous ceux qui souhaiteraient prolonger leur combat», a-t-il déclaré sur Sud Radio le 21 décembre. Quelques jours auparavant, l'eurodéputé avait en effet indiqué que leur «mobilisation correspondait exactement à l'offre politique que nous représentons».
Mais le RN est loin d'être le seul sur le coup. Les Patriotes, le parti présidé par Florian Philippot, leur ouvre également la porte. «On vise à constituer une liste hybride, mi-Patriotes mi-gilets jaunes», explique au journal l’Opinion l'ancien bras droit de Marine Le Pen au FN. Le député européen a assuré ses arrières, en déposant le 30 novembre auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (Inpi) la marque «Les Gilets Jaunes» (pas encore validée par l'institut pour l'instant). «L’idée n’est pas sortie de mon chapeau depuis trois semaines, je voulais déjà donner cette coloration sociale au Front national», ajoute-t-il.
Les communistes «ouverts» aux gilets jaunes
De l'autre côté de l'échiquier politique, le PCF espère lui aussi pouvoir enrôler des gilets jaunes. Son nouveau secrétaire national, Fabien Roussel, a déclaré mercredi 26 décembre sur RTL qu'il souhaitait une «liste ouverte» à des militants du mouvement, soutenue par le Parti communiste. En effet, pour Ian Brossat, tête de liste du PCF pour ces élections européennes et partisan d'un rassemblement à gauche, cette dernière doit «renouer» avec «ces ouvriers, ces employés qui font vivre le pays et qui ne sont pas respectés comme ils le devraient».
Si tous ces partis multiplient les appels du pied, c'est qu'ils ont peur de voir une liste estampillée «gilets jaunes» se présenter face à eux en mai prochain et rogner sur leur électorat. En effet, selon un sondage Odoxa pour Franceinfo publié le 21 décembre, les gilets jaunes recueilleraient 8 % des intentions de vote. C'est le RN qui pâtirait le plus de leur présence, en perdant trois points (de 24 % à 21 %), tout en restant malgré tout en tête des suffrages, devant La République en Marche-MoDem (19 %), La France insoumise (10,5 %) et Les Républicains (8 %).
Une liste estampillée «gilets jaunes» en pleine structuration
Alors que les gilets jaunes s'étaient initialement rassemblés autour de la défiance envers le monde politique, les voir constituer une liste aux européennes ne paraît plus être une hypothèse saugrenue. C'est Jean-François Barnaba, militant de l'Indre, qui avait lancé l'idée le 4 décembre sur France Inter. Il avait rapidement été suivi par Hayk Shahinyan, figure du mouvement en Seine-Maritime. Suite à l'allocution d'Emmanuel Macron le 10 décembre, il avait annoncé sur France 2 qu'une liste «gilets jaunes» se présenterait aux prochaines européennes. «Nous sommes en train de nous organiser. Nous avons envie d'investir le champ politique», avait-il affirmé, en réponse aux annonces du chef de l'Etat sur le pouvoir d'achat.
Depuis, son association, appelée «Gilets jaunes, le mouvement», est en pleine structuration. Elle a annoncé la création d'un comité central et peut se targuer de quelques ralliements, comme celui d'Ingrid Levavasseur, une aide-soignante emblématique du mouvement. Le 20 décembre, Hayk Shahinyan et plusieurs autres gilets jaunes se sont en outre retrouvés à Paris pour élaborer leur stratégie électorale. L'écrivain Alexandre Jardin était présent pour les conseiller, lui qui a été séduit par une initiative politique visant à «modifier en profondeur un système où tout le pouvoir est à Paris et où le citoyen n'existe pas pendant la durée d'une législature».
Tapie et Lalanne au soutien
Celui qui avait tenté de se présenter à la présidentielle de 2017, sans parvenir à réunir les 500 parrainages requis, n'est pas la seule personnalité à graviter autour du mouvement. L'ex-ministre Bernard Tapie a lui aussi proposé son aide au mouvement le 19 décembre sur France Inter, estimant que celui-ci doit «se structurer sinon il risque de s'essouffler ou d'être récupéré par un parti».
Bernard Tapie ouvre les portes des locaux d'impression de La Provence aux #giletsjaunes, mouvement qu'il souhaite voir s'organiser : "Il faut les aider parce que si ça n'existe pas, on pourrait craindre que ça recommence sous une autre forme encore plus violente" #le79inter pic.twitter.com/Jexn5Oegg0
— France Inter (@franceinter) 19 décembre 2018
Sans compter l'initiative du chanteur Francis Lalanne, qui a annoncé le 17 décembre le lancement d’un «rassemblement gilet jaune citoyen», en vue du scrutin du 26 mai 2019. La question est maintenant de savoir si ces projets vont converger ou bien se faire concurrence, et donc peut-être empêcher les gilets jaunes de pouvoir présenter leur propre liste, qui nécessite 79 candidats pour être créée.