Il est corrosif pour la peau et les poumons, mais se retrouve dans les assiettes : le métam-sodium, un pesticide, aurait intoxiqué pas moins de soixante-dix habitants du Maine-et-Loire entre fin septembre et mi-octobre. Le gouvernement a suspendu ce vendredi son utilisation jusqu'à fin janvier 2019.
Utilisé pour la «désinfection des sols», le métam-sodium dégage un gaz qui tue les champignons, les insectes, les herbes et les vers. Sauf que, déversé dans les cultures maraîchères comme la mâche, ce pesticide «présente des effets irritants, sensibilisants et corrosifs pour la peau, les voies respiratoires et les yeux», rappelle l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses).
«Cette substance est plus nocive que le glyphosate, qui ne tue que les mauvaises herbes. Son but est de tuer toute vie dans le sol», abonde Florence Denier-Pasquier, vice-présidente de l'association Sauvegarde de l'Anjou et secrétaire nationale de France Nature Environnement, dans les colonnes de France Info. «C'est un poison, un couteau-suisse pour stériliser le sol. Sur la même molécule, vous avez un tue-vers, un fongicide [contre les champignons], un désherbant et un antiparasitaire. Tout ce qu'il rencontre succombe», renchérit Bernard Jégou, chercheur à l'Inserm.
Présent dans cinq produits en France
Autorisé au niveau européen jusqu'en 2022 (au moins), le pesticide est, en France, présent dans cinq produits phytosanitaires, approuvés par l'Anses. Sur la fiche technique de l'un d'eux, repérée par France Info, la liste des risques est longue : «nocif en cas d'ingestion et par inhalation», «provoque des brûlures de peau et des lésions oculaires graves», «susceptible de provoquer le cancer», «de nuire à la fertilité ou au fœtus», «très toxique pour les organismes aquatiques»...
Preuve de sa nocivité, l'utilisation du pesticide est particulièrement encadrée, tant pour préserver la santé des riverains que celle des agriculteurs, qui doivent systématiquement porter des protections respiratoires, des combinaisons ou encore des bottes pour manipuler le produit.
Dans un rapport remis en décembre 2017 au gouvernement français, le métam-sodium est décrit comme l'une des «substances les plus utilisées et identifiées comme les plus préoccupantes» avec le metsulfuron méthyle et le sulcotrione. Depuis cette date, son interdiction a été proposée par plusieurs parlementaires par voie d'amendement.
La résurgence dans l'actualité des risques du métam-sodium pourrait accélérer son bannissement. Quitte à mettre à mal la rhétorique du ministre de l'Agriculture, Didier Guillaume, qui a déclaré – à tort – vendredi, soit trois jours après sa prise de fonctions, que c'était «aux scientifiques de faire la preuve ou non qu'il y a des conséquences à l'usage des pesticides ou pas». Tout est dans le «ou non» et le «ou pas».