Le youtubeur star Cyprien, qui compte des millions d'abonnés, est depuis peu la cible d'accusations de conflits d'intérêts par des internautes.
Tout est parti d'un tweet viral, diffusé par le compte «L'Elite voit tout» et relayé plus de 5.000 fois depuis lundi. Il évoque un système d'aides à la création dont Cyprien, de son vrai nom Cyprien Iov, aurait selon lui abusé.
Cyprien à reçu 50 000€ de subventions de la part du CNC via son entreprise « Périple Production ». Pour obtenir une subvention du CNC il faut soumettre un projet à un jury qui est composé entre autre de Cyprien. #CyprienLeaks pic.twitter.com/5R1vX93HZT
— L’Elite voit tout (@EPrivilegie) 22 octobre 2018
Le plus célèbre des youtubeurs français fait partie de la commission du Fonds d'aides aux créateurs vidéo sur Internet, créée en 2017 par le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) et destinée à soutenir financièrement les projets de vidéastes en ligne. Or, lors de la séance du 28 avril 2018, elle a accordé 50.000 euros de subventions à la société de production de Cyprien, «Périple». Ce qui constitue un conflit d'intérêts pour ses détracteurs, accusant le youtubeur d'être à la fois juge et partie.
Car, selon le règlement du CNC (article 122-8), les membres de la commission sont «soumis à une obligation d'impartialité» et «ne peuvent prendre part aux délibérations lorsqu'ils ont un intérêt personnel à l'affaire qui en est l'objet». Une règle que Cyprien a respectée, étant absent lors de l'étude de son dossier. Techniquement, donc, le conflit d'intérêts n'est pas caractérisé.
De son côté, le CNC, contacté par Le Monde, écarte tout conflit d'intérêts : «Ceux qui s’interrogent ne connaissent pas le fonctionnement : le principe des commissions est de mettre des experts dans les commissions, et au sein de celles-ci, Cyprien, ou tout autre auteur ou réalisateur, a parfaitement le droit de présenter un dossier. Cyprien n’est pas du tout un cas unique», infirme-t-on au sein du centre.
le copinage en ligne de mire
Une mise au point insuffisante pour éteindre la polémique. En effet, plusieurs internautes ont pointé du doigt l'éventualité d'arrangements négociés entre figures emblématiques du secteur, de petits accords passés sous le manteau. Avec un exemple à l'appui, mentionné sur le fameux fil Twitter : «la commission du 14 avril 2018», à laquelle Cyprien avait assisté, aurait atttribué «50.000 euros à "Solange te parle"». Or, cette autre youtubeuse a fait «partie de la commission du 22 juin qui a donné 50.000 euros à Cyprien». La preuve, selon les accusateurs, d'un échange de bons procédés sur fond d'entente tacite.
A noter que ce débat autour de l'entre-soi n'est pas nouveau. Comme le révèle Le Monde, le site Gamekult avait calculé, dans une enquête publiée en 2012, que 27 % des subventions allouées par le fonds d'aides au jeu vidéo revenaient directement ou indirectement à des membres du jury. Ce qui avait conduit la Cour des comptes a alerté, en octobre de la même année, sur les risques de conflit d'intérêts liés au «copinage» entre créateurs.