Deux jours après la fronde des «Insoumis» lors des perquisitions, le temps des questions : Jean-Luc Mélenchon était interrogé jeudi par la police dans les enquêtes sur ses comptes de campagne présidentielle et sur les assistants d'eurodéputés de son parti, assurant qu'il répondrait «dans le détail».
Arrivé vers 10H30 pour une audition libre dans les locaux de la police anticorruption (Oclciff) à Nanterre, Jean-Luc Mélenchon a de nouveau dénoncé devant les journalistes «une opération de police politique» et «une escalade judiciaire».
«Tout à fait tranquille»
Quarante-huit heures après son coup de sang devenu viral, il a toutefois annoncé qu'il se plierait au jeu des questions-réponses, se disant «tout à fait tranquille, car le ridicule va être du côté de ceux qui ont déployé tous ces moyens pour rien». «Moi, j'ai décidé, un, que je venais, et deux, que je répondrai aux questions qu'on me pose, ce qui montre que, contrairement à ce qui a été dit hier, nous ne faisons pas d'obstruction», a-t-il déclaré à la presse. «Je suis un homme bavard donc je vais raconter dans le détail tout ce qui intéresse la police et la justice», a-t-il ironisé.
Visé par deux enquêtes préliminaires sur des emplois présumés fictifs d'assistants au Parlement européen et sur ses comptes de campagne de la présidentielle 2017, Jean-Luc Mélenchon est au cœur d'une tempête politique après s'être opposé avec virulence aux perquisitions menées mardi chez lui et au siège parisien de LFI dans le cadre de ces procédures.
Sur des vidéos de l'opération, M. Mélenchon appelle ses proches à«enfoncer la porte» pour entrer au siège parisien du mouvement où une perquisition est en cours. On le voit également bousculer un représentant du parquet ainsi qu'un policier qui s'interpose. Mercredi, Edouard Philippe s'est dit «choqué» par «la très grande violence» manifestée selon lui contre les policiers. «Je ne crois pas que nous gagnions quoi que ce soit à remettre en cause l'indépendance de la justice», a insisté le Premier ministre. «Oui il y a eu violence, quatre plaintes sont déposées par mes amis car il y a eu une bousculade dans laquelle ils ont été précipités à terre», a assuré jeudi M. Mélenchon.
«Nous faire peur»
Plusieurs syndicats de police ont dénoncé son attitude «inacceptable», Alliance et Alternative Police-CFDT appelant Christophe Castaner à porter plainte tandis que SGP Police-FO réclamait «des excuses publiques» au chef de file de LFI. «Les policiers ne sont pas respectés par les élus aux prises avec la justice», a déploré l'Unsa-Police, refusant que les forces de l'ordre jouent le rôle de «bouc émissaire». M. Mélenchon a concédé que le ton était «monté». «La France insoumise n'est pas traitée comme tout le monde (...) on veut nous faire peur, nous intimider», a-t-il justifié jeudi.
Selon la législation, une perquisition dans le cadre d'une enquête préliminaire n'est possible qu'avec l'accord écrit de l'occupant du domicile ou du représentant légal dans le cas d'une personne morale. Ou, s'il n'est pas d'accord ou absent, en présence de deux témoins majeurs qui ne font pas partie des forces de l'ordre mais qui sont désignés par l'officier de police judiciaire.
Selon une source proche du dossier, Manuel Bompard, coordinateur des campagnes de LFI, a bien été contacté au début de la perquisition au siège du parti et a assisté à cette opération - autorisée par un juge des libertés et de la détention (JLD) - avant qu'elle ne dégénère. Mardi, M. Bompard avait affirmé avoir été «empêché d'assister à la procédure administrative» et qu'«aucun PV» n'avait été soumis à sa signature.
«Il n'a jamais été question pour nous d'empêcher une quelconque perquisition. Nous voulions au contraire y être présent pour collaborer car nous savons notre probité», a déclaré à l'AFP le député LFI Adrien Quatennens. Visé par une plainte pour diffamation d'un journaliste du Monde, Jean-Luc Mélenchon ne s'était pas rendu aux convocations de la juge. Selon l'avocat du plaignant, la magistrate a demandé la levée de son immunité parlementaire dans cette affaire.