Commerces attaqués, manifs agitées, vidéos chocs… Les antispécistes et les professionnels de la viande se livrent un affrontement sans précédent.
La guerre serait-elle déclarée ? Le ton monte entre les anti et les pro-viande depuis plusieurs semaines, alors que les actions coup de poing dénonçant l’exploitation animale prolifèrent en France.
A Metz, Bordeaux, ou encore Saint-Etienne, des dizaines de défenseurs des animaux ont ainsi organisé, en milieu de semaine, une «nuit debout» devant des abattoirs du pays. Au même moment, éleveurs, bouchers et charcutiers se sont réunis dans les Yvelines pour défendre «la liberté de manger de la viande».
Un face-à-face qui montre que, ce qui n’était encore qu’un phénomène discret il y a quelques mois, tend à devenir un véritable débat de société, voire un conflit larvé.
Du happening au vandalisme
Au-delà des actions pacifiques qu’ils revendiquent, comme le récent festival vegan à Calais, les antispécistes (opposés à toute hiérarchie entre espèces) multiplient les initiatives chocs. Que ce soit en publiant des images sanglantes enregistrées dans des abattoirs, ou en élaborant des mises en scène macabres devant les commerces (faux banquets, expositions d’animaux morts...).
Après avoir vu leurs magasins vandalisés par des #vegans, les #bouchers demandent une protection de l'État pic.twitter.com/zXKRPppNEc
— CNEWS (@CNEWS) 26 juin 2018
D’autres, plus radicaux, s’attaquent directement aux enseignes. Depuis janvier, la Confédération française de la boucherie, boucherie-charcuterie, traiteurs (CFBCT) a ainsi recensé «douze commerces caillassés» et tagués, ainsi que des «dizaines» de détériorations (faux sang, autocollants…). Rien qu’à Lille, six personnes ont été interpellées, mi-septembre, pour avoir vandalisé neuf boutiques. Des violences qui ont même poussé des bouchers du Nord à faire appel à des vigiles pour sécuriser leurs magasins.
«Il y a une atmosphère de crispations entre deux camps qui sont, par nature, inconciliables», relève Marianne Celka, auteur de «Vegan Order» (éd. Arkhê). A tel point que la sphère politique s’en mêle. Le week-end dernier, c’est le ministre de l’Ecologie lui-même, François de Rugy, qui a dénoncé une «dérive très inquiétante» de la part des militants de la cause animale. Ces derniers, à l’instar de membres de l’association «Boucherie Abolition», répliquent en parlant d’une «honteuse campagne de victimisation des bouchers».
L’opinion dans le viseur
Au-delà de ces violences, le militantisme pro-animal a gagné en visibilité ces dernières années. Notamment grâce à des associations comme L214 ou Peta, qui cherchent à alerter l’opinion via les réseaux sociaux. Avec succès, car «l’exploitation des animaux ne fait plus consensus, elle n’est plus un signe de progrès», assure Marianne Celka.
En plus d’une baisse de la consommation de viande, quatre Français sur cinq soutiennent la fin de l’élevage intensif, selon un récent sondage Ifop. Alors que la quasi-totalité de la population se dit carnivore, l’enjeu à l’avenir pourrait bien être, davantage que la viande elle-même, la manière dont elle est produite.