Cernée par les affaires, à la tête d'un parti en difficulté financière et qui peine à rassembler, Marine Le Pen se lance dimanche à Fréjus (Var) dans la bataille des européennes, en espérant profiter de l'essor de ses alliés continentaux.
«Chaque coup qu'ils me portent renforce ma détermination», assurait la présidente du Rassemblement national (RN, ex FN) vendredi dernier à Chalons-en-Champagne.
Une allusion aux juges financiers parisiens qui l'ont mise en examen en 2017 dans l'affaire des emplois fictifs du RN au Parlement européen, et l'ont à nouveau convoquée en octobre.
Cette affaire a aggravé les difficultés financières du parti, déjà très endetté. Les juges ont ordonné fin juin la saisie de 2 millions d'euros d'aide publique due au RN, craignant que le parti n'utilise cet argent pour rembourser ses dettes au lieu de payer d'éventuels dommages au Parlement européen. Le préjudice approche les 7 millions d'euros.
«Nous risquons la mort» si la justice le 26 septembre confirme le gel de l'aide publique, a averti Marine Le Pen, qui a fait appel de la confiscation.
Le parti risque en outre un nouveau procès sur le financement de ses campagnes en 2014 et 2015. Le parquet de Paris a réclamé le renvoi devant le tribunal d'un ancien vice-président, Jean-François Jalkh, d'un proche de Marine Le Pen et d'un mouvement satellite du RN.
«Ce sont des persécutions» dignes d'un «régime totalitaire», cingle un proche de la finaliste de la présidentielle 2017.
A court d'argent, Marine Le Pen fera une rentrée a minima à Fréjus : pas d'université d'été mais un simple discours. Et les adhérents désireux de l'entendre devront payer leur déplacement.
Le RN imprimera quand même des tracts montrant Marine Le Pen à côté de son allié italien devenu ministre de l'Intérieur, Matteo Salvini.
«Minorité de blocage»
Longtemps son inspiratrice, Marine Le Pen table désormais sur l'expérience de son ami au pouvoir pour l'aider aux Européennes de mai.
«Partout en Europe, nos idées arrivent au pouvoir», devrait insister dimanche la dirigeante du RN, qui juge «enthousiasmant» la progression des nationalistes et des populistes sur le continent.
L'objectif n'est pas tant «d'avoir un ou deux députés européens de plus», après avoir raflé la mise en 2014 (25% des voix), que de trouver des «convergences» au Parlement européen pour former «une minorité de blocage».
Le combat contre l'immigration, dénominateur commun des nationalistes en Europe, sera le thème dominant. Marine Le Pen s'est rendue mercredi dans un petit village du Var qui doit accueillir un centre de demandeurs d'asile, pour y dénoncer, sous les chahuts, une «submersion migratoire imposée par l'Union européenne».
Comme son allié italien et le Premier ministre national-conservateur hongrois Viktor Orban, Marine Le Pen se place dans le camp des «nationaux», face aux «mondialistes» incarnés à ses yeux par Emmanuel Macron, qui «panique».
Mais contrairement au FPÖ, parvenu au pouvoir en Autriche avec les conservateurs, ou à la Ligue italienne, le RN peine à trouver des alliés.
A défaut d'avoir convaincu le souverainiste Nicolas Dupont-Aignan, Marine Le Pen promet une liste «de rassemblement» où pourrait figurer l'ancien ministre LR Thierry Mariani, qui tarde à se décider.
Le nom de l'essayiste Hervé Juvin est cité pour la conduire. Inconnu du grand public, cet ancien associé d'Eurogroup Consulting sera présent à Fréjus.
D'autres noms circulent pour la tête de liste : le député des Pyrénées-orientales, Louis Aliot, intéressé aussi par la mairie de Perpignan, et le chef de file des eurodéputés RN, Nicolas Bay, pas ravi de l'hypothèse Hervé Juvin.
Quant au chef de LR Laurent Wauquiez, qui refuse toute alliance mais concurrence le RN sur le terrain des idées, Marine Le Pen n'a de cesse de dénoncer sa duplicité. Elle a qualifié d'«hypocrites» les élus LR ayant voté mardi des sanctions contre M. Orban, membre du même groupe qu'eux au Parlement européen.