Affaibli par la démission fracassante de Nicolas Hulot, dont le remplacement s'annonce épineux, et plus qu'hésitant sur la mise en place de l'impôt à la source, l'exécutif doit affronter une opposition revigorée, qui entend bien profiter de ces atermoiements.
Interviewé samedi sur France Inter, le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin a admis que «l'arrêt» du prélèvement à la source n'était pas exclu, évoquant les potentiels effets «psychologiques» de la réforme censée entrer en vigueur début 2019. M. Macron a laissé transparaître cette semaine son hésitation face à ce bouleversement fiscal, déclarant avoir «besoin d'une série de réponses très précises» avant sa mise en place, alors que M. Darmanin insistait régulièrement sur le fait que la réforme irait à son terme.
Ce possible revirement, peu habituel pour un exécutif habitué à avancer au pas de charge, intervient au moment où plusieurs sondages montrent les dégâts dans l'opinion du départ du ministre de la Transition écologique.
Les cotes de confiance d'Emmanuel Macron et d'Edouard Philippe tombent au plus bas depuis leur entrée en fonction dans le baromètre Harris interactive du mois d'août publié vendredi, à 36 et 34% d'opinions positives (-6 et -8 points). Idem dans une enquête BVA où le président de la République chute lourdement à 34% tandis que le Premier ministre descend à 38% (-5 points chacun).
Le remplacement de M. Hulot, qui doit intervenir avant mardi soir, s'annonce délicat. Et rien n'a filtré sur l'ampleur du remaniement.
Aucun des écologistes pressentis «n'ira dans ce gouvernement s'il n'y a pas (un) big-bang» dans l'organisation des pouvoirs publics, a prédit un des candidats potentiels, Pascal Canfin, directeur général de l'ONG WWF.
Selon des propos rapportés par le JDD, Dany Cohn-Bendit aurait été approché par le patron de la République en marche Christophe Castaner. Mais «être ministre ce n'est pas ma tasse de thé», a confié à RMC l'ancien député européen, qui pourrait rencontrer M. Macron pour en discuter dimanche.
Un proche de François de Rugy a lui souligné samedi auprès de l'AFP la légitimité d'une nomination du président de l'Assemblée, «quatrième personnage de l'Etat», «engagé pour l'écologie depuis 25 ans». D'autres noms circulent comme celui du secrétaire d’État à la Transition écologique Sébastien Lecornu, de Chantal Jouanno, présidente de la Commission nationale du débat public ou encore de la députée de la majorité Barbara Pompili.
Les menaces de Bern
Coup de canif supplémentaire dans l'édifice macroniste: l'animateur français Stéphane Bern a menacé vendredi de quitter la mission sur le patrimoine que lui a confiée M. Macron s'il estimait finalement n'être qu'un «cache-misère» ou un «pantin», mettant directement en cause le ministre de la Cohésion des territoires Jacques Mézard et sa loi ELAN (Evolution du logement, de l’aménagement et du numérique).
Ces vents mauvais font bien entendu les affaires de l'opposition. «Hulot qui l’abandonne, Bern qui menace de le faire, Hollande qui le fustige, les sondages qui confirment la dégringolade de sa popularité. Macron songerait à faire appel à Cohn-Bendit. Désespoir? inconscience? incompétence? Le temps de Jupiter est bien révolu mais pas son humour!», a ironisé sur Twitter la députée LR Valérie Boyer.
En déplacement vendredi à Cherbourg au côté de son ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve, François Hollande a multiplié sans le nommer les piques à l'encontre d'Emmanuel Macron, ironisant sur ceux touchés par «le narcissisme, une terrible maladie». Il a aussi pointé l'indécision du chef de l'Etat sur le prélèvement à la source. A un moment, «il faut sauter le pas, il faut le faire», a dit l'ancien président.
Pour pousser ses arguments, le PS a promis de proposer un contre-budget lors des débats à l'Assemblée.
La France insoumise a de son côté réaffirmé cette semaine son vœu de faire des élections européennes un «référendum anti-Macron». Selon elle, «la décomposition du régime Macron est commencée».