Le Parlement a adopté définitivement mardi soir, via un vote de l'Assemblée, le projet de loi instaurant un «droit à l'erreur», qui permettra, sous réserve d'être «de bonne foi», d'éviter des sanctions de l'administration au premier manquement.
Approuvé par la majorité LREM-MoDem ainsi que les députés UDI-Agir et socialistes, ce projet de loi «pour un Etat au service d'une société de confiance» traduit ainsi une promesse du candidat Emmanuel Macron. Les Insoumis, qui ont défendu en vain une motion de rejet, les communistes et, «à contre-coeur», les LR, se sont prononcés contre.
Sauf en cas de «mauvaise foi» ou «fraude», «une personne ayant méconnu pour la première fois une règle» ou «ayant commis une erreur matérielle» ne peut faire l’objet d’une sanction «si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire par l’administration», stipule le texte adopté.
Quant aux entreprises, elles pourront demander à une administration de les contrôler pour s'assurer qu'elles sont en conformité. Les conclusions rendues seront ensuite opposables, à la manière d'un rescrit.
Le texte comprend aussi la mise en place à titre expérimental d'un «référent unique» qui aura la charge de faire traiter les demandes des usagers par les différentes administrations concernées, la simplification de la procédure d'implantation des éoliennes offshore ou la réduction des délais de création de places d'accueil de la petite enfance.
Il retire en outre les associations cultuelles du champ des représentants d'intérêts, mesure qui avait provoqué de vifs débats parmi les députés, y compris dans les rangs de la majorité.
Dans l'hémicycle, le secrétaire d'Etat Olivier Dussopt, qui a porté ce texte aux côtés du ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin, a salué au terme de «plus de 100 heures de débats parlementaires» le début d'une «transformation des relations entre les citoyens et l'administration», et non pas «une énième loi de simplification».
Le rapporteur Stanislas Guérini (LREM) a vanté de «vraies révolutions», le MoDem un «quotidien» facilité. Les UDI-Agir ont souligné «le besoin d'une administration qui conseille, pas qui sanctionne», quand les socialistes ont relevé qu'une loi ne peut toutefois «suffire à restaurer la confiance».
De leur côté, les Insoumis ont critiqué que les tâches de l'administration soient accrues parallèlement à «la réduction drastique de milliers d'emplois». Leur orateur Ugo Bernalicis a cité Jaurès, en ce jour anniversaire de sa mort : «L'abondance est le fruit d'une bonne administration».
«Je n'ose imaginer que votre conception du droit à l'erreur soit celle qui a pu s'appliquer à M. Benalla», avec «15 jours» de mise à pied initialement, a-t-il aussi ironisé, alors que la séance de l'après-midi avait été consacrée à deux motions de censure contre le gouvernement, autour de l'affaire concernant l'ex-collaborateur de l'Elysée.
Les communistes ont pour leur part fustigé dans ce projet de loi un allègement des «sanctions d'employeurs négligents et jugés de bonne foi».
Enfin, la droite a estimé que «le compte n'y est pas», la France restant «champion du monde de la complexité administrative». Arnaud Viala a notamment pointé les inégalités d'accès à l'administration sur le territoire.
Le projet de loi avait été adopté en première lecture par l’Assemblée fin janvier, puis par le Sénat en mars, dans des termes différents. Une commission mixte paritaire avait échoué en avril à trouver un accord sur une rédaction commune, et les députés ont eu le dernier mot.
Jugeant souvent le texte «fourre-tout», les sénateurs, à majorité de droite, avaient souhaité un droit à l'erreur pour les collectivités, non retenu in fine.