Le fonctionnement des services des urgences, régulièrement critiqué, se trouve plus que jamais dans le collimateur des autorités.
Car le bilan n’est guère encourageant, entre le manque d’effectifs chronique et les erreurs médicales régulières, en passant par les tensions au travail. Tout récemment, le décès de Naomi Musenga à Strasbourg (Bas-Rhin) a relancé la polémique. Un drame a priori imputable à une «erreur humaine», selon la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, mais qui interpelle et souligne les failles d’un système de santé à bout de souffle.
Des services submergés
Pointés du doigt par les professionnels, les dysfonctionnements au sein du Samu sont légion. A commencer par la surcharge de travail des équipes. Avec plus de 30 millions d’appels par an, de 2 à 4 minutes chacun, le service est «sursaturé d’activité». Au risque de «banaliser l’urgence», estiment les professionnels, qui appellent à le réformer avec plus de «capacités humaines». Pas assez nombreux et donc soumis à un stress intense, les opérateurs manqueraient aussi parfois de formation, selon un rapport du Sénat de 2017.
«C’est un travail exigeant, difficile […] Mais il n’y a pas de critères de sélection, certains sont formés dans des écoles, d’autres par des associations ou sur le tas», explique Patrick Pelloux, président de l’Association des médecins urgentistes de France. A cela s’ajoute le surmenage chronique des soignants, qui regrettent une politique du chiffre et des conditions de travail déplorables. «Ça devient une usine à humains», affirmait récemment sur France 2 une infirmière aux urgences de Toulon.
Dans ce contexte, viennent s’ajouter les violences, qui peuvent éclater à tout moment dans les établissements. L’AP-HP, qui gère 39 hôpitaux en Ile-de-France, a ainsi enregistré l’an dernier plus de 3 000 «événements indésirables» (injures, coups…). Autant de problèmes que le mouvement social des soignants dénonce depuis des mois. Mardi, ce sont quelque 600 grévistes qui ont défilé en blouse blanche dans la capitale, pour exprimer leur «ras-le-bol d’un système en décrépitude» et réclamer davantage de moyens.
Des remèdes à l’horizon ?
Face à ces difficultés, certains préconisent une refonte globale du système de santé. «Il y a urgence à tout repenser de fond en comble», assénait fin avril le président du conseil national de l’ordre des médecins, Patrick Bouet. Tandis que des solutions ont été promises par Emmanuel Macron «dès 2018 pour les services les plus critiques» (à commencer par les urgences), Agnès Buzyn a, de son côté, demandé aux urgentistes de dresser, d’ici au 1er juillet, une liste de propositions pour «harmoniser» et «encadrer» les pratiques.
Si la ministre a écarté tout financement supplémentaire, elle a précisé qu’il n’y aura «pas d’économies» sur l’hôpital ni cette année, ni dans les «trois années qui viennent». L’instauration d’un numéro unique destiné aux urgences est notamment au cœur des discussions. Quant au directeur de l’AP-HP, Martin Hirsch, il a annoncé hier un coup de pouce de 30 millions d’euros sur trois ans pour renforcer la vidéosurveillance et les contrôles d’accès dans ses hôpitaux. Une mesure concrète qui pourrait ouvrir le chemin à d’autres.