L'accès principal de Sciences Po Paris était fermé mercredi matin sur décision de la direction en raison de l'occupation d'une partie de l'établissement par plusieurs dizaines d'étudiants de l'école en solidarité avec le mouvement de protestation dans les facultés, a constaté une journaliste de l'AFP.
«On ne laisse pas rentrer les étudiants dans le bâtiment par mesure de sécurité. Les cours qui y étaient prévus ont été reprogrammés ailleurs», a-t-on confirmé à la direction de la grande école, qui a formé nombre de dirigeants dont Emmanuel Macron.
Le mouvement se poursuit sans s'étendre
Blocage reconduit à Nanterre, nouvelle demande d'intervention des forces de l'ordre à Tolbiac, confusion sur le campus de Paul-Valéry à Montpellier... Le mouvement de protestation dans les facultés se poursuivait mardi, sans toutefois s'étendre.
Quatre universités sur environ 70 sont toujours bloquées et neuf sites perturbés (sur environ 400) par des étudiants opposés à la loi réformant l'accès à l'université, a indiqué la ministre de l'Enseignement supérieur Frédérique Vidal sur RFI et France24.
Depuis mardi soir, «le bâtiment principal de l'école de Sciences Po Paris est occupé pacifiquement et de manière reconductible, une décision prise à l'issue d'une Assemblée Générale des étudiants mobilisés», selon un communiqué transmis dans la nuit de mardi à mercredi par l'AG.
«Occuper Sciences Po est fortement symbolique : en tant que fac où a étudié Emmanuel Macron et de nombreux membres de sa majorité parlementaire», souligne le communiqué.
Mardi, dans la matinée, le président de l'université parisienne Panthéon-Sorbonne, Georges Haddad, avait voulu marquer les esprits en décrivant sur CNews le site de Tolbiac aux mains de bloqueurs ayant transformé les lieux, selon lui, en «capharnaüm». «La violence, la drogue, le sexe même (...) il se passe des choses qui sont indignes», a-t-il déclaré.
Le site, occupé depuis le 26 mars par des étudiants et militants, est devenu l'un des lieux emblématiques de la mobilisation contre la loi modifiant l'accès à la fac, accusée par ses détracteurs d'instaurer un système de sélection déguisée.
Qualifiant la situation de «pré-insurrectionnelle» et craignant «le pire», le président a affirmé «attendre désespérément que le centre soit évacué» par les forces de l'ordre.
Le 11 avril, il avait demandé l'intervention de la police pour faire lever le blocage, notamment après la découverte de cocktails Molotov à Tolbiac. Mais la police a pour l'heure exclu une opération aussi sensible dans cette tour de 22 étages.
Lundi, le syndicat étudiant UNI, classé à droite, a annoncé le dépôt d'un nouveau recours visant la préfecture de police. Une audience a été fixée pour mercredi matin devant le tribunal administratif, qui devrait mettre son jugement en délibéré.
Le président de l'université de Rennes 2 n'a de son côté pas exclu mardi de demander le recours à la force publique, au lendemain d'un vote qui a reconduit le blocage jusqu'au 30 avril.
«Sur le volet politique, j'ai déjà pris contact à plusieurs reprises avec le ministre (...) mais, sur le volet de la sécurité, je suis inquiet de l'évolution des conditions dans les bâtiments occupés, et si l'intervention policière est la seule possible, je serai obligé d'y recourir», a déclaré Olivier David à l'AFP.
A l'université de Rouen, l'ensemble des cours pour les UFR lettres et sciences humaines et sciences de l'homme et de la société ont été annulés en raison d'un blocage de quatre bâtiments par 100 à 150 étudiants.
Examens reportés
A Nanterre, autre fac emblématique de la contestation d'où était parti le mouvement étudiant en mai 1968, une assemblée générale réunissant entre 1.600 et 1.700 personnes a voté massivement pour une reconduction du blocage jusqu'à jeudi.
Les examens qui devaient s'y tenir mercredi et jeudi devraient donc être reportés, selon la direction de l'université. Ceux de lundi et mardi ont déjà été décalés à une date non fixée pour le moment.
«Vous muselez des centaines d'étudiants», a dénoncé en AG Charlotte, étudiante en droit. «Vous vous mettez à dos des personnes qui partagent votre opinion», a renchéri une autre, suscitant des applaudissements nourris.
«Les examens qui ont été perturbés se tiendront», a de nouveau assuré mardi Frédérique Vidal, disant rechercher avec les présidents d'université et les recteurs des «solutions» pour qu'ils «puissent se tenir dans la sérénité».
A Montpellier, la plus grande confusion régnait sur le campus de l'université Paul-Valéry, «fermée» depuis samedi par son président Patrick Gilli mais toujours «occupée» par des étudiants.
Dans la matinée, le tribunal administratif a examiné la requête de la présidence qui demande en référé l'expulsion des occupants «sans droit ni titre» alors que le préfet de l'Hérault a assuré lundi qu'une intervention policière «se rapproche». Le tribunal doit notifier sa décision au plus tard mercredi.
Dans les Bouches-du-Rhône, un groupe d'étudiants a tenté de bloquer la faculté de lettre d'Aix-en-Provence à l'aube, sans succès.
«On reste prudents, mais pas alarmistes», a affirmé François Germinet, de la Conférence des présidents d'université (CPU, pro-réforme), interrogé par l'AFP. Selon lui, les premières réponses aux vœux des candidats sur la plateforme Parcoursup, à partir du 22 mai, permettront de «dédramatiser» la situation.