Les députés se penchent, pendant trois jours, sur un projet de loi qui vise à améliorer la situation des troupes françaises. Le spécialiste de l’histoire des armées, Michel Goya, revient sur cette loi de programmation militaire 2019-2025.
Ce projet de loi est-il un véritable effort de la part d’Emmanuel Macron envers les armées ?
Oui, c’est un effort important. Il n’y a pas eu d’effort budgétaire aussi important depuis les années 1980. C’était quelque chose d’indispensable pour trouver une solution à la crise dans laquelle étaient les armées. Le quotidien des soldats est encore compliqué aujourd’hui, en matière de logements, d’infrastructures, de tenues… C’est quelque chose qui est essentiel. Notre armée est une armée de volontaires, 70% des militaires sont en CDD. S’ils ne sont pas contents de leurs conditions de vie et de travail, ils ne vont pas renouveler leurs contrats.
Entre la hausse des effectifs, l’amélioration du quotidien des militaires… Des points n’ont-ils pas été abordés ?
C’est une loi de rattrapage, on recrute encore relativement peu. On investit, on essaie de solder tous ces grands programmes lancés à la fin des années 80 qu’on avait eu beaucoup de mal à financer (l’avion Rafale…). Surtout, cette loi permet d’investir dans la génération du début des années 2000, avec le programme Scorpion pour l’Armée de Terre, et de lancer des pistes pour l’avenir. Avant tout, c’est un programme de rééquipement. Ce ne sont pas des choses spectaculaires, mais on investit dans des choses qui manquaient comme les avions ravitailleurs, par exemple.
Il existe cependant des inconnus : aucune loi de programmation militaire n’a été respectée. Il est difficile de prévoir sur plusieurs années un financement dans une environnement qui est changeant, on ne sait pas ce que sera l’état économique de la France dans les années à venir. Les lois de programmation ont toujours été revues à la baisse, elles sont systématiquement attaquées par Bercy. Les opérations extérieures vont, en outre, être financées par le budget des Armées. C’est plus cohérent mais ça attaque le budget. Il va, ensuite, falloir aborder le renouvellement de notre frappe nucléaire, ce qui va coûter très cher.
Le plan est donc ambitieux mais difficile à appliquer ?
C’est normal, encore une fois. Je ne connais pas de militaire qui ne soit pas satisfait de ce plan. Mais il existe des inconnus, comme la croissance économique, par exemple.
Cette loi est-elle un moyen pour le président d’améliorer les relations entre le gouvernement et les armées ?
Une loi de programmation sur cinq ans ne sert pas à redorer l’image d’Emmanuel Macron auprès des armées. Elle faisait, en effet, partie du programme de campagne du candidat En Marche. Ce n’était pas une surprise. Ce qui a été surprenant c’est que dans le premier budget de l’ère Macron on commençait par une réduction des moyens. C’est ce qui avait provoqué la crise. Maintenant, «wait and see» («Faire preuve de patience»), comme on dit.