La cour d'assises de la Haute-Loire a condamné en appel à vingt ans de réclusion la mère de la petite Fiona et son ex-compagnon, les considérant aussi coupables l'un que l'autre des coups fatals portés à la fillette de cinq ans.
En première instance en 2016, la cour d'assises du Puy-de-Dôme avait dissocié les peines, acquittant Cécile Bourgeon pour les faits criminels - les violences ayant entraîné la mort de Fiona - et l'avait condamnée uniquement à cinq ans de prison pour avoir fait croire à un enlèvement de l'enfant. Berkane Makhlouf avait, lui, déjà écopé de 20 ans de réclusion.
«Les mensonges, les contradictions, les silences, les incohérences, la variabilité n'ont pas permis d'appréhender le contexte exact du décès. Pour autant, le positionnement (des accusés) ne suffit pas à créer un doute raisonnable (...) Si ce n'est menti, ils n'ont pas tout dit», a déclaré le président de la cour, en lisant les motivations de l'arrêt rendu dans la nuit de samedi à dimanche au Puy-en-Velay.
Car après 25 jours de procès cumulés, rien de nouveau ou presque n'a émergé sur les faits eux-mêmes. Les anciens partenaires se sont accusés l'un l'autre d'avoir porté des coups à l'enfant, sans les lier à son décès.
La cour, qui a reconnu cette fois que Fiona a été victime de «maltraitance», a également prononcé un «retrait total de l'autorité parentale» de Cécile Bourgeon sur ses deux autres enfants.
«Je ne suis naturellement pas surpris par cette décision au regard des graves évènements qui ont émaillé cette audience et qui avaient justifié lundi que nous sollicitions le renvoi», a réagi l'un des conseils de Cécile Bourgeon, Me Renaud Portejoie.
Avant d'annoncer qu'il allait former «un pourvoi en cassation dès lundi». «Il y aura donc un troisième procès», a-t-il assuré. Ou plutôt un quatrième : le premier procès en appel avait avorté en octobre à la suite d'une querelle entre avocats.
Lundi, les avocats de Cécile Bourgeon avaient aussi tenté - en vain cette fois - d'obtenir un nouveau renvoi autour d'une curieuse histoire d'apéritif pris par le président de la cour, Étienne Fradin, avec certains conseils dans un hôtel du Puy-en-Velay.
Verdict «juste pour Fiona»
«Elle a la peine qu'elle mérite. C'est un soulagement pour moi et c'est juste pour Fiona», a réagi le père de la fillette, Nicolas Chafoulais, à l'annonce du verdict.
«Apaisé ? Non. Ma fille n'est pas revenue», a-t-il poursuivi, gagné par l'émotion. La dépouille de la fillette n'a jamais été retrouvée depuis sa disparition en mai 2013.
«On a pu faire triompher la vérité sur le mensonge et la manipulation. Les jurés ont compris ce que Nicolas Chafoulais avait compris, c'est-à-dire une femme coupable. C'est une grande victoire juridique», s'est aussi félicité l'un des ses conseils, Me Charles Fribourg.
La cour a suivi le raisonnement de l'avocat général Raphaël Sanesi de Gentile, qui avait estimé que l'ancien couple «tortionnaire» avait agi de concert dans la mort de la fillette, victime d'une «violence continue» pendant «les jours et les heures précédant sa mort». Mais elle est allée en deçà des trente ans requis.
«Ces violences ont été activées par les deux, par la répétition dans le temps et par leur localisation sur la tempe gauche de Fiona (...) Il y a eu un coup, deux coups, un troisième coup», avait-t-il tonné en tapant du pied sur le sol pour simuler les «traumatismes crâniens et abdominaux» «répétés» subis par la fillette blonde, dont la disparition avait ému la France entière.
Le représentant du ministère public ainsi que les avocats des parties civiles avaient demandé aux neuf jurés - tous féminins - de s'appuyer davantage sur la parole de Berkane Makhlouf pour rendre leur verdict. En première instante, celle-ci avait été jugée «trop tardive et variable» par rapport aux déclarations de la mère de la fillette.