Le mouvement contestataire se montre désuni face aux réformes sociales du gouvernement. Une situation qui profite de fait au président.
Un introuvable front commun ? Depuis la rentrée, les manifestations et les grèves contre la réforme du Code du travail se sont multipliées sans toutefois parvenir à mobiliser en masse. La faute à un mouvement syndical qui n’a jamais réussi à s’exprimer d’une seule voix. Pour tenter d’y remédier, l’ensemble des fédérations se réunit pour la deuxième fois mardi au siège de la CFDT, avec l’objectif de se mettre d’accord sur une action commune pour le mois de novembre.
Un mouvement fracturé
Si le front syndical rencontre des difficultés à afficher une posture commune face au gouvernement, c’est parce qu’il existe de vrais désaccords sur la méthode la plus efficace pour faire valoir leurs revendications.
D’un côté, la CGT privilégie une stratégie d’opposition frontale, qui consiste à s’appuyer sur la rue pour peser sur le gouvernement. Une tactique qui a pu sembler efficace lors de la première mobilisation de rentrée, le 12 septembre, avec 223.000 personnes dans les rues, mais qui a montré des signes de faiblesse lors de la dernière journée d’action, le 19 octobre, avec seulement 37.000 manifestants.
L’autre stratégie, celle de la CFDT, consiste à privilégier l’option du dialogue et de la négociation. Et entre les deux, l’attitude de FO vient compliquer la donne. Car après avoir refusé de manifester, le syndicat a finalement accepté, sous la pression de sa base, de descendre dans la rue. A travers ces désaccords, «une concurrence se joue pour savoir quel syndicat apparaîtra comme le leader du mouvement», explique le politologue Rémi Bourguignon.
L’opposition politique n’est également pas au rendez-vous, ce qui tend à affaiblir indirectement le front syndical. Jean-Luc Mélenchon, qui avait organisé sa propre journée d’action le 23 septembre, a ainsi regretté sur son blog que les syndicats n’aient pas pris «l’initiative» de la lutte contre les ordonnances, allant même jusqu’à craindre «une victoire de Macron par K.O». Une sortie qui ne risque pas de favoriser l’unité.
La Méthode Macron
Cette désunion du mouvement syndical montre plus largement qu’Emmanuel Macron semble être parvenu à contenir le mouvement grâce à une méthode bien particulière. En présentant en amont les ordonnances aux partenaires sociaux, lors de réunions bilatérales, «il n’y a eu aucun temps d’échange où l’on a réuni tous les acteurs ensemble, ce qui a empêché l’élaboration de revendications groupées», souligne Rémi Bourguignon.
Une tactique qui a sans aucun doute permis de faire passer les ordonnances sans trop de difficultés. Mais avec les prochaines négociations qui vont s’ouvrir, notamment sur la réforme de l’assurance chômage, le camp syndical espère encore trouver une fenêtre de tir pour essayer d’imposer sa méthode et sa vision des concertations.