L'annonce du départ de Florian Philippot du Front National a provoqué une crise ouverte au sein du parti de Marine Le Pen. A tel point que la question de l'avenir du parti se pose.
Mais ce n'est pas la première fois que le parti fondé par Jean-Marie Le Pen se retrouve dans une situation délicate. Retour en cinq dates sur l'histoire tumultueuse du parti d'extrême droite.
Janvier 1999 : Bruno Mégret provoque la scission
En 1999 aboutit la première grande crise qu'a connu le FN, et qui a failli signer l'arrêt de mort du parti. En 1998, Jean-Marie Le Pen, menacé par une condamnation à l'inégibilité, annoncé qu'il confiera s'il le faut la tête de liste du parti aux élections européennes à sa femme Jany.
Mais Bruno Mégret, alors cadre majeur du FN, estime que «ce n'est pas une bonne idée». En réalité, il espère prendre la place le cas échéant. Ce qu'il tente de faire par la force en août 1998, se portant candidat pour mener la liste FN.
Jean-Marie Le Pen réagit immédiatement, déclarant qu'il n'y a «qu'un seul numéro au FN, c'est le numéro un», et déononçant «une poignée de lieutenants et de quartiers-maîtres félons».
Mégret et ses alliés, qui espèrent prendre la main sur le parti qu'ils estiment menacé par les sorties de Jean-Marie Le Pen sur les chambres à gaz, entre autres, appellent alors à un congrès du FN, lors duquel il est élu président du parti, rebatisé Front National - Mouvement national.
Jean-Marie Le Pen obtiendra devant la justice que Mégret rebaptise le parti, que ce dernier nommera Mouvement National Républicain (MNR).
Suite à cette scission, le FN n'obtiendra que 6,69% des suffrages lors des élections européennes. Il faudra attendre la présidentielle de 2002, et la qualification de Jean-Marie Le Pen pour le second tour, pour le voir revenir au premier plan.
Novembre 2008 : Carl Lang et Jean-Claude Martinez suspendus
En Novembre 2008, Jean-Marie Le Pen fait face à une nouvelle crise à l'approche des élecctions européennes de 2009. Carl Lang a en effet décidé de se présenter contre Marine Le Pen, officiellement investie par le FN. Dans le même temps, Jean-Claude Martinez se présente contre Louis Aliot, proche de Marine Le Pen dont il est aujourd'hui le compagnon.
A l'époque, Carl Lang, cadre historique du FN reproche à Marine Le Pen de vouloir «éliminer systématiquement tous ceux qui ne font pas acte d’allégeance à sa personne».
La réaction de Jean-Marie Le Pen ne se fait pas attendre : «Monsieur Lang se souvient-il de l’écriteau qui ornait jadis son bureau de secrétaire général: "Tu dois tout au FN, le FN ne te doit rien". Non Carl, le parti ne te doit rien et ton attitude est pitoyable. Tu seras jugé sévèrement par tous ceux qui n’ont pas eu ta chance, qui méritaient pourtant de l’avoir, et qui ont toujours su rester fidèles».
Le président du FN demande alors au bureau exécutif du parti de suspendre les deux frondeurs, ce que ce dernier fait dans la foulée.
Carl Lang crée dans la foulée le Parti de la France (PDF), pour lequel Jean-Claude Martinez sera la tête de liste pour la circonscription Sud-Ouest, dans laquelle il obtient 0,92 % des suffrages.
Août 2015 : Jean-Marie Le Pen exclu
Le 20 août 2015, Jean-Marie Le Pen esr exclu du FN à l'issue d'une crise qui a duré plusieurs mois. Celui qui est alors président d'honneur du parti avait été convoqué par sa fille, Marine Le Pen, pour répondre de quinze griefs devant la plus haute autorité du parti, réunie en formation disciplinaire au siège de Nanterre.
On lui reproche d’avoir tenu des propos incompatibles avec la ligne du parti sur BFM-TV, RMC et à l’hebdomadaire Rivarol. Il avait notamment affirmé qu'il n'avait jamais tenu le maréchal Pétain pour un traître.
L'exclusion du fondateur du parti est l'aboutissement d'une longue lutte entre le père et la fille, cette dernière voulant dédiaboliser le FN, et effacer l'image d'un parti raciste et xénophobe qu'entretenait Jean-Marie Le Pen.
Une page de l'histoire du FN se tourne alors.
Décembre 2016 : Marion Maréchal Le Pen face à Philippot
En décembre 2016, à quelques mois de l'élection présidentielle et des législatives, Marion Maréchal-Le Pen se prononce contre le remboursement de l'interruption volontaire de grossesse (IVG). Dans la foulée, Marine Le Pen la recadre, suivie par Florian Philippot, qui qualifie celle qui est alors députée du Vaucluse de «seule et isolée».
Ce recadrage suscite une vague de soutiens envers Marion Maréchal-Le Pen, plus populaire au sein du parti que Florian Philippot. Et Marion Maréchal-Le Pen réplique, estimant à son tour que ce dernier est «minoritaire». Elle égratigne même Marine Le Pen, affirmant qu'il n'y avait pas eu «de débat en interne» sur l'IVG, critiquant ainsi la gestion du parti.
Quelques mois plus tard, au lendemain de l'élection présidentielle, Marion Maréchal-Le Pen annoncera qu'elle quitte la politique.
Mais si Florian Philippot reste, il a beaucoup perdu dans cette affaire, s'attirant l'hostilité de la branche la plus conservatrice des militants. Cette crise sonnera comme le début de sa disgrâce, qui aboutira à son départ du FN.
La démission de Philippot
Suite à la crise ouverte avec Marion Maréchal-Le Pen, Florian Philippot se retrouve affaibli. Et les désaccords avec Marine Le Pen s'accentuent lorsqu'il lance son association, Les Patriotes, le 15 mai, sans même attendre la fin des législatives. Ce qui lui vaut de nombreuses critiques au sein du FN, y compris de la part de Marine Le Pen. «J’ai trouvé que le calendrier était étonnant. Disons que ça aurait pu attendre. Ça crée des incompréhensions», déclare cette dernière. Le 15 septembre, elle le rappelle une nouvelle fois à l'ordre, appelant à se que «tous les dirigeants du FN» se recentre sur la refondation du FN.
Dans la foulée, Philippot affirme qu'il ne quittera pas la présidence des Patriotes, et se dit même prêt à quitter le FN si ce dernier abandonne la sortie de l'Euro.
Mercredi, Marine Le Pen retire à Florian Philippot son rôle de vice-président du FN chargé de la stratégie et de la communication, ainsi que la présidence des Patriotes. Il se retrouve alors vice-président sans délégation.
Le message est clair, et dès le lendemain Florian Philippot annonce sa démission. «Je suis venu pour la dédiabolisation du FN, je suis venu pour que les outrances du passé soient terminées, a-t-il expliqué, estimant que «la refondation du parti est un retour en arrière terribl». «Le FN est rattrapé par ses vieux démons», a-t-il ajouté.
Marine Le Pen s'est montré pour sa part impitoyable avec Florian Philippot. «Tous ceux qui ont souhaité mener une aventure solitaire ont disparu, ça a été le cas de Bruno Mégret, de Carl Lang et ce sera le cas de Florian», a-t-elle déclaré.