La nouvelle version du compte pénibilité esquissée par le Premier ministre Edouard Philippe exclura quatre critères de pénibilité par rapport à la première mouture. Une perspective qui satisfait le patronat tandis que les syndicats protestent.
Décrite par le Premier ministre dans un courrier adressé samedi 8 juillet aux principales organisations syndicales et patronales, la première modification du compte pénibilité proposée par le gouvernement Philippe est d’ordre lexicale : en effet, quelques mois avant son élection à la présidence de la République, Emmanuel Macron avait affirmé en mars 2017 qu’il comptait supprimer le terme «pénibilité», qui «induit que le travail est une douleur». Cette promesse du candidat Macron sera donc respectée, car le compte pénibilité sera rebaptisé «compte prévention».
Quatre critères de pénibilité supprimés
Concrètement, six des dix critères de pénibilité seront toujours pris en compte, soit le travail de nuit, répétitif, en horaires alternants, en milieu hyperbare (où la pression est supérieure à la pression atmosphérique), ainsi que le bruit et les températures extrêmes. L’employeur sera aussi tenu, même après la mise en place de la réforme, de mesurer et de déclarer le degré d’exposition de ses salariés à ces conditions de travail.
Les principales modifications concerneront les salariés. Ainsi, la manutention de charges lourdes, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et les risques chimiques seront rayés du compte prévention. Selon le patronat, ces quatre critères étaient difficilement mesurables et sortiront donc du compte des points.
Les 800.000 salariés qui ont ouvert un compte pénibilité conserveront leurs points. En revanche, ceux qui ont ouvert des droits concernant l’un des quatre facteurs supprimés par la réforme ne cumuleront plus d’avantages dès 2018.
Une retraite anticipée sous conditions
Les salariés exposés pourront toujours prétendre à la retraite anticipée, mais à certaines conditions. En effet, le compte prévention prévoit la mise en place d’ «une visite de fin de carrière», pour que les employés fassent «valoir leurs droits».
Il faudra impérativement que cette visite a posteriori révèle «une maladie professionnelle» et «un taux d’incapacité permanente [qui] excède 10%» pour que le salarié puisse partir en retraite. Le gouvernement n’a pour l'instant pas défini à combien d'années avant l'âge légal de la retraite se tiendrait cette visite.
Les entreprises exemptées des taxes pénibilité
Le principal changement qui touchera les entreprises concerne également le financement de ce compte prévention. Dès sa mise en place, les employeurs seront exemptés des deux cotisations pénibilité dont ils doivent actuellement s'acquitter. Cette charge patronale devrait être transférée vers la branche accidents du travail/maladies professionnelles de Sécurité sociale, qui affiche actuellement un excédent estimé à 900 millions d’euros. Ce surplus devrait permettre de financer la réforme «à court terme», a précisé Matignon à l'AFP.
Invitée ce dimanche 9 juillet au Grand Rendez-vous CNews-Europe 1-Les Echos, la ministre du Travail Muriel Penicaud a expliqué que cette réforme avait pour objectif de «libérer les PME d’une obligation franchement usine à gaz», reprenant une expression chère au Medef.
D'ailleurs, l'organisation patronale a salué les esquisses de ce nouveau compte pénibilité, tandis que la CFDT a dit «regretter» la suppression des taxes employeurs. Toujours selon la ministre du Travail, le compte prévention «entrera en vigueur à compter de l’année 2018».