Le gouvernement planche sur une extension à d'autres secteurs que le BTP des contrats de chantier, ou contrats de projet, un dispositif à mi-chemin entre le CDI et l'intérim qui offre une souplesse à l'employeur et quelques garde-fous pour le salarié. Que prévoit précisément ce type de contrat ?
Qu'envisage le gouvernement ?
Le projet de loi d'habilitation permettant au gouvernement de réformer le travail par ordonnances, révélé mercredi par Le Monde, entend «favoris(er) et sécuris(er), par accord de branche ou, à défaut, à titre expérimental en fonction du secteur ou des effectifs de l'entreprise, le recours aux contrats à durée indéterminée conclus pour la durée d'un chantier». Le recours au CDI de projet «est effectivement un sujet qui va être discuté entre la ministre du Travail et les partenaires sociaux», a confirmé jeudi le porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner.
CDI ou CDD ?
Sans date de fin précise, contrairement à un CDD, ce contrat à durée indéterminée a pourtant vocation à s'arrêter au terme de la mission pour laquelle le salarié est engagé. Ce qui n'est pas le cas d'un CDI classique, prévu généralement pour durer.
L'employeur peut ainsi ajuster la durée effective du contrat aux besoins du chantier et s'adapter aux éventuels contretemps (retard de livraison, aléas climatiques...). Cela lui permet de ne pas recourir au CDD, plus rigide et qui donne lieu à des indemnités de précarité. A la fin de la mission, le salarié peut être licencié.
Quel intérêt pour le chef d'entreprise?
«Il y recourt lorsqu'il n'a pas le personnel suffisant en interne, pour mener à bien un chantier. C'est un outil auquel les entreprises sont très attachées. Les PME comme les grands groupes l'utilisent de façon assez importante», explique-t-on à la direction des affaires sociales de la Fédération nationale des travaux publics (FNTP).
En revanche les artisans du bâtiment, dont les chantiers sont plus courts (une semaine, un mois), n'y ont pas recours car «ce n'est pas dans leur ADN». «Nous faisons travailler nos salariés en interne et parfois utilisons l'intérim», développe Patrick Liébus, président de la Capeb.
Quels garde-fous pour le salarié ?
Si la loi ne prévoit rien, la convention collective du bâtiment a mis en place des dispositions en faveur du salarié. L'employeur a notamment l'obligation de chercher à le recaser sur un autre chantier. Si le salarié est licencié, il bénéficie pendant un an d'une priorité pour être réembauché.
La Cour de cassation a rappelé que le licenciement doit impérativement intervenir à la fin effective du chantier. En d'autres termes, l'employeur ne peut pas licencier un salarié, même si sa mission est terminée, dès lors que d'autres continuent de travailler sur le chantier.
Qu'en pensent les partenaires sociaux ?
Lors des réformes du travail de 2013 et 2015, le Medef avait systématiquement milité pour la création de contrats de projet, voulus notamment par les professionnels du numérique. En 2013, l'organisation patronale avait proposé un CDI de projet de 9 mois minimum mais cette mesure avait été retirée au dernier moment du projet d'accord, à la demande des syndicats.
Quatre ans plus tard, la CGT continue de s'opposer à «l'instauration de contrats de mission, de projet ou de chantier, pour l'ensemble des salariés d'un secteur d'activité», y voyant «la fin du CDI pour toutes et tous». La «généralisation» du CDI de chantier est également une «ligne rouge» pour FO, selon son secrétaire fédéral Michel Beaugas, qui dénonce une «précarité non compensée par une prime quelconque».