Ce sera l'un des duels emblématiques des législatives : la 18e circonscription de Paris voit s'affronter l'ancienne ministre du Travail Myriam El Khomri et la militante féministe Caroline De Haas, alors que la nouvelle réforme du code du travail souhaitée par Emmanuel Macron est au cœur du débat national.
Adversaires lors de la discussion de la loi portée par Myriam El Khomri -Caroline De Haas avait été à l'origine d'une pétition en ligne qui a réuni plus de 1,3 million de signataires contre le texte-, les deux femmes ont réactivé ce clivage autour du projet du président de la République de modifier la législation du travail par ordonnances.
Caroline De Haas, soutenue par le PCF, EELV, Ensemble! et le socialiste Benoît Hamon, a rédigé avec François Ruffin une lettre ouverte demandant au président Macron d'y «renoncer».
Myriam El Khomri, investie par le PS mais qui veut «participer» de manière «constructive» à la majorité présidentielle, a de son côté affirmé ne pas «voir de difficulté» au recours aux ordonnances, pourvu que le dialogue social ait été au préalable respecté.
Sur le terrain, Caroline De Haas porte son combat contre la loi travail en bandoulière. «Il faut faire en sorte qu'Emmanuel Macron ne fasse pas une loi travail numéro deux», explique la militante en distribuant des tracts à l'angle du boulevard Barbès.
«Insupportable, inimaginable»
Habitante du XIVe arrondissement, Caroline De Haas raconte que ce sont des «écologistes, des communistes qui (lui) ont demandé d'être candidate». «Pour ces militants de gauche, il est insupportable, inimaginable que Myriam El Khomri, qui est l'incarnation des renoncements de ce quinquennat, représente le XVIIIe à l'Assemblée nationale».
Myriam El Khomri assume de son côté son bilan au gouvernement et dit ne pas «avoir peur du débat autour de la loi travail». Mais elle met volontiers en avant son «ancrage dans les quartiers populaires», ses «138 réunions» depuis le mois de janvier, un réseau patiemment tissé au fil des années -elle est élue du XVIIIe depuis 2008.
Cela suffira-t-il à lui assurer la victoire ? Dans cette circonscription détenue par la gauche depuis 1997, la multiplication des candidatures (26 en tout) rend le scrutin difficilement lisible.
Une «primaire» pour En marche!
En embuscade, à la gauche de Mme De Haas, le candidat de La France insoumise, Paul Vannier. Venu le soutenir lundi, Jean-Luc Mélenchon a appelé à battre Myriam El Khomri.
«Il ne faut plus qu'une seule personne puisse se dire de gauche dans ce pays si elle est trahie par les siens comme nous l'avons été par cette femme», a-t-il tonné devant une centaine de personnes, à quelques mètres de la mairie du XVIIIe.
A droite, c'est le candidat LR Pierre-Yves Bournazel qui pourrait tailler des croupières à Myriam El Khomri. Lui aussi se présente «sous les couleurs de la majorité présidentielle». «Je suis un soutien de l'action du Premier ministre (Edouard Philippe), avec qui j'ai travaillé dans le cadre de la campagne d'Alain Juppé», plaide-t-il. Entre les deux candidats, La République En Marche affirme ne pas avoir choisi.
«C'est le cas, presque le seul, où le mouvement se met en situation d'être témoin d'une primaire, entre deux candidats qui l'un comme l'autre sont dans la recomposition souhaitée par le président de la République (...) Pour l'instant, on a recommandé aux comités locaux de ne pas se mettre en situation de se diviser car je trouve que ce serait malsain», a confié à l'AFP la présidente par intérim de la REM, Catherine Barbaroux.
Malgré cette recommandation, la sénatrice de Paris Bariza Khiari, déléguée nationale En Marche!, a apporté publiquement son soutien à Myriam El Khomri mardi. Pierre-Yves Bournazel est pour sa part soutenu par la conseillère de Paris MoDem Fadila Mehal.
Dans cette circonscription du nord de Paris, Emmanuel Macron a obtenu 37,1% des voix au premier tour de la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon 24,4%, François Fillon 16,5% et le socialiste Benoît Hamon 13,1%.