Après le Brexit et l'élection aux Etats-Unis de Donald Trump, c'est au tour de la campagne présidentielle en France d'être perturbée par les «fake news».
Bien qu'encore mal définies, ces informations non-vérifiées, fausses voire mensongères et principalement diffusées sur les réseaux sociaux, ont été mises en lumière et combattues par la presse.
Retour sur cinq moments où les fausses informations qui se sont immiscées dans les campagnes électorales françaises et internationales.
Un Brexit sous influence
Dès 2016, ces fausses informations ont affecté la campagne du Brexit au Royaume-Uni. Bien que leur impact sur le vote pour la sortie de l'Union européenne est non quantifiable, de nombreux médias occidentaux ont souligné leur rôle.
Alors que tous pariaient globalement sur un «remain», ces derniers ont découvert le 24 juin 2016 le poids des réseaux sociaux dans la décision électorale. Le coupable principal : Facebook. Le réseau de Mark Zuckerberg a été accusé de propager de «fausses nouvelles» incitant à la sortie de l'UE.
Ces fausses informations ont même parfois été relayé par les comptes officiels comme en témoigne le tweet publié par le camp du «Leave», annoncant un vote sur deux jours.
ATTN: This image is a SCAM that has been set up by the 'IN' campaign. You need to #Voteleave today pic.twitter.com/Kq14R1rT2D
— Vote Leave (@vote_leave) 23 juin 2016
D'ailleurs, un article de la rédactrice en chef du Guardian, Katharine Viner, publié le 12 juillet 2016 et intitulé «How technology disrupted the news», accuse clairement Facebook de perturber le jugement des électeurs en permettant le partage en masse d'informations inventées. Très partagé, il engendrera de nombreux débats dans les médias.
Hillary Clinton discréditée par les réseaux sociaux
Pendant la campagne présidentielle américaine, Facebook a été une nouvelle fois accusé de ne pas avoir empêché la propagation de fausses informations.
Au lendemain de la victoire de Donald Trump, le Washington Post a publié une longue enquête sur la disqualification de Hillary Clinton par les «fake news», tout au long de la campagne électorale.
Selon le quotidien, le but de ces fausses informations était de décrédibiliser la candidate démocrate en la décrivant comme «une criminelle cachant ses problèmes de santé potentiellement mortels et se préparant à confier le contrôle de la nation à une fantomatique cabale de financiers globaux».
Derrière ces faux articles, se trouveraient aux commandes la Russie et ses réseaux d'extrême-droite. Dès novembre 2016, le quotidien The Guardian avait signalé que les soutiens du président américain Donald Trump les plus actifs sur les réseaux étaient en réalité des salariés russes.
Toutefois, dans un article publié le 18 janvier dernier, des chercheurs de l'université de Stanford et de New-York, ont noté que même si les fausses informations sont très présentes sur les réseaux sociaux, elles sont loin d'avoir autant d'impact que les médias traditionnels.
Jean-Luc Mélenchon et sa Rolex à 18.000 euros
Et la France n'est pas en reste. Tout au long de la campagne présidentielle, de nombreux «fakes news» ont pollué le débat électoral. Dès le mois d'avril 2016, un montage montrant le candidat de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon avec une Rolex au poignet, d'une valeur de 18.000 euros, faisait son apparition sur les réseaux sociaux. Avant d'y être largement partagé les jours suivant.
"Un bon communiste !" pic.twitter.com/n1Dgi90fD5
— Stalker (@_Stalker_69_) 20 mars 2017
Cette information sera par la suite démentie par le principal intéressé. «Je n'ai pas de Rolex et je n'en désire point. J'informe mes lecteurs que ce genre de rumeurs à mon sujet va se développer à mesure que je talonnerai Hollande et que je progresserai». En réalité, il s'agissait d'une montre Seiko dont le prix varie entre 70 et 200 euros selon le modèle.
François Fillon, blanchi par la Justice
Partagé près de 25.000 fois sur Facebook, un article publié sur le blog lescrutateur.com le 11 avril dernier annonce que le candidat Les Républicains François Fillon a été «blanchi par la justice». Face à cette annonce, de nombreux internautes accusent les médias de ne pas relayer l'information.
#Crosscheck - #Fillon soi-disant blanchi, la #philo supprimée des programmes : les dernières informations démenties https://t.co/zB2baTJWQf pic.twitter.com/ckbst7ce5a
— République du Centre (@larep_fr) 21 avril 2017
Une vérification est donc menée par différents médias dans le cadre du projet Crosscheck, visant à verifier les contenus douteux et lutter contre la désinformation.
A l'issue, les seize médias participant au programme confirme que l'ancien Premier ministre est toujours poursuivi pour «détournement de fonds publics» dans l'enquête concernant les possibles emplois fictifs de son épouse et de ses enfants, en tant qu'assistants parlementaires.
Emmanuel Macron, le candidat préféré de l'Arabie saoudite
Bien qu'aucun candidat ne soit épargné par les rumeurs, le candidat du mouvement En Marche! semble être le grand favori des «fake news».
Après lui avoir avoir attribué le projet d'instaurer une nouvelle taxe pour tous les propriétaires de logements en France, une autre rumeur affirmait que la campagne du candidat était financée à plus de 30% par l'Arabie saoudite.
Et il semble que tout soit parti d'une site créé spécialement pour l'occasion. Reprenant la Une du journal belge Le Soir, l'article publié le 25 février présentait l'ancien ministre de l'Economie comme le «candidat préféré de l'Arabie saoudite à l'élection présidentielle» et reprenait même le témoignage d'un député socialiste belge, Philippe Close. Bien réel, ce dernier s'était même empressait de démentir.
FAKENEWS - Hier j’ai appris avec étonnement que mon nom était cité dans un article relatif au financement de la campagne @EmmanuelMacron pic.twitter.com/dPZqbyzmv8
— Philippe Close (@PhilippeClose) 28 février 2017
Après l'analyse des canaux de diffusion, le spécialiste de la propagation des informations sur les réseaux sociaux Nicolas Vanderbiest s'est rendu compte que de faux comptes Twitter avait envoyé le faux article à la presse. Et parmi eux, celui d'une journaliste Lina Vincent, dont le fil d'actualité ne relaye que des messages pro-russes, pro-iraniens, ou encore anti-saoudiens.
Emmanuel Macron et son compte offshore au Bahamas
D'autres rumeurs ont également pollué la campagne d'Emmanuel Macron. Lors du débat de l'entre-deux tours, mercredi 3 mai, la candidate frontiste Marine Le Pen a ainsi insinué que le candidat d'En Marche! possédait «un compte offshore au Bahamas», tandis que des documents l'accusant d'évasion fiscale circulaient sur les réseaux sociaux.
Le candidat a déposé plainte contre X, dès le lendemain, pour «faux, usage de faux et propagation de fausse nouvelle destinée à influencer le scrutin».
Cartographie animée du #MacronGate sur son prétendu compte caché. Comme ça vous avez tous les éléments. pic.twitter.com/XNeUjnAJA7
— Nicolas Vanderbiest (@Nico_VanderB) 4 mai 2017
Par ailleurs, le chercheur belge Nicolas Vanderbiest a estimé sur FranceInfo qu' «il y a un taux de concordance de plus de 40% entre les comptes qui ont relayé cette rumeur et ceux que j'ai identifiés comme relayant régulièrement les contenus de Russia Today et Sputnik».
Et à moins de quarante-huit heures du second tour, les «fake news» continuent d'animer les réseaux sociaux. Prenant à partie une fois encore le candidat d'En Marche!, certains comptes Twitter proches de l'extrême-droite ont divulgué dans la nuit de vendredi à samedi des mails internes au mouvement, melangés avec des faux.