Loin de faire bloc comme en 2002 contre le Front national, les syndicats célèbrent lundi le 1er mai en ordre dispersé.
A moins d'une semaine du second tour de la présidentielle, la traditionnelle journée internationale des travailleurs aurait pu souder, comme il y a quinze ans, l'ensemble des organisations salariales contre le Front national. Mais cette fois elles ont échoué à faire l'unité le temps d'un défilé, faute d'entente sur les mots d'ordre.
«On n'est plus en 2002. Avec la CFDT il y a une différence d'appréciation de fond sur l'analyse des raisons qui amènent le FN» une nouvelle fois au second tour, a expliqué dimanche Philippe Martinez, numéro un de la CGT, dans Le Parisien.
«Une situation plus grave qu'en 2002»
Du coup, la CFDT et l'Unsa, qui ont appelé à voter pour Emmanuel Macron le 7 mai pour «battre» la candidate du FN, organisent, de leur côté, des rassemblements dont un à Paris, avec les étudiants de la Fage (Fédération des associations générales étudiantes). Laurent Berger, numéro un de la CFDT, et Luc Bérille, son homologue de l'Unsa, ont invité les militants à 11h devant le métro Jaurès (19e arrondissement) pour «rejeter la vision réactionnaire et identitaire du Front national».
«Nous sommes dans une situation plus grave qu'en 2002, parce qu'elle est structurelle», estime Véronique Descacq, numéro deux de la CFDT.
Conscient des réticences à voter Macron, Laurent Berger a prévenu que le bulletin en faveur du candidat d'En Marche! ne valait «pas acceptation de son programme». «Nous combattrons M. Macron lorsque nous serons en désaccord, notamment sur sa conception du dialogue social», a-t-il dit.
Mais la CGT, FO, FSU et Solidaires ne sont pas du même avis, et manifesteront ensemble dans de nombreuses villes. A Paris, ce sera à 14h30, de place de la République à celle de la Nation.
Ces centrales, déjà unies pour s'opposer à la loi travail, ont appelé à «faire barrage» à Marine Le Pen, sans pour autant inviter ouvertement à voter pour son adversaire. M. Martinez s'est défendu d'opter pour le «ni-ni». «Ce n'est pas la position de la CGT. Cela veut dire qu'il faut aller voter, c'est clair».
Comme d'habitude, Force ouvrière, elle, s'est abstenue de donner une consigne de vote.
«On ne peut pas faire abstraction du fait qu'Emmanuel Macron représente tout le quinquennat : le travail le dimanche, le CICE, la loi travail, c'est lui», explique Eric Beynel, porte-parole de Solidaires.
A ses côtés place de la République, il y aura Philippe Martinez (CGT), Jean-Claude Mailly (FO), Bernadette Groison (FSU).
Voix discordantes
Mais aux côtés des centrales nationales, des voix discordantes issues de leurs rangs appelleront «à battre les deux candidats». «Nous sommes contre le fascisme et contre la finance», explique Romain Altmann, secrétaire général CGT Info'Com.
En 2002, où le second tour opposait Jacques Chirac à Jean-Marie Le Pen, les organisations syndicales avaient fait bloc le 1er mai. Ce jour-là, environ 1,3 million de personnes, dont 400.000 à Paris (selon le ministère de l'Intérieur) avaient battu le pavé dans le calme dans toute la France à l'appel de la CGT, la CFDT, FO, la FSU et l'Unsa pour «faire barrage par leur vote à Jean-Marie Le Pen».
L'an dernier, en pleine contestation de la loi travail, ils étaient 84.000 personnes dans toute la France, de sources policières, avec des incidents à Paris. Cette année, plus de 9.000 policiers, gendarmes, et militaires de l'opération sentinelle seront engagés dont 2.000 dédiés notamment à la sécurisation de la manifestation, selon la préfecture de police.
D'autres mobilisations, qui ne sont pas à l'initiative de syndicats, sont également prévues dans la matinée comme celles de jeunes appelant à manifester «contre Le Pen et Macron» place de la République ou de militants d'Alternative libertaire.