Renseignement, interventions, surveillance, secours, protection… Un rapport parlementaire réclame plusieurs améliorations pour éviter d’autres attaques.
Sans avoir connu de «gros ratés», la France n’était «pas prête» à faire face à des attaques de cette ampleur. La commission parlementaire chargée d’évaluer les moyens mis en œuvre par l’Etat lors des attentats de 2015, de l’attaque de Charlie Hebdo au massacre du Bataclan, a présenté ce mardi ses conclusions. Après 200 entretiens, et autant d’heures d’auditions, ses auteurs proposent leurs solutions pour améliorer la lutte contre le terrorisme, et tenter ainsi d’éviter un nouveau bain de sang.
Une agence nationale du renseignement à mettre en place
Samy Amimour, assaillant du Bataclan, est allé en Syrie en 2013 malgré une interdiction de sortie du territoire. Saïd Kouachi, tueur à Charlie Hebdo, a vu sa surveillance levée peu avant le drame. D’après le député Sébastien Pietrasanta, rapporteur de l’enquête, les attentats ont montré l’«échec global du renseignement». En cause, le manque de coordination entre les services. La commission propose donc la création d’une agence nationale de lutte contre le terrorisme, s’inspirant du TIDE (Terrorist Identities Datamart Environment) américain, afin d’avoir une base de données commune sur tous les suspects. Est aussi réclamé le rapprochement du Service central de renseignement territorial (SCRT), les anciens RG, avec son équivalent à la gendarmerie, la Sous-Direction de l’anticipation opérationnelle (SDAO).
Différentes unités intervention d’élite à rassembler
Avec «courage», les policiers et gendarmes d’élite qui ont affronté les jihadistes ont prouvé leur «efficacité», estiment les députés. Mais ces derniers n’écartent pas les rivalités existant «entre la police et la gendarmerie, et même au sein de la police», pour ce type d’opérations. C’est pourquoi le rapport préconise la fusion du GIGN, du Raid et de la BRI, ou au moins, à court terme, un commandement unifié de ces trois forces rapides. Un moyen d’éviter une possible «course à l’intervention».
Une radicalisation en prison à surveiller de plus près
Le CV de nombreux jihadistes a mis en lumière un phénomène non négligeable : le rôle joué par la prison dans la radicalisation. Alors que l’isolement des détenus islamistes est testé dans plusieurs maisons d’arrêt, la commission souligne que le renseignement pénitentiaire ne mobilise aujourd'hui que 114 personnes. Un chiffre jugé insuffisant par rapport aux 68 000 détenus et 235 000 individus suivies en France. Le Garde des Sceaux, Jean-Jacques Urvoas, l’a lui-même reconnu lors de son audition : «tout est à faire» dans ce domaine.
Des personnels de secours à former à la médecine de guerre
Ils ont agi au mieux au cœur de l’horreur. Mais les secouristes auraient pu évacuer plus vite les blessés s’ils avaient pu avoir accès au périmètre d’action des forces d’intervention. La commission réclame la mise en place de «colonnes d’extraction», avec des médecins agissant sous la protection des forces de l’ordre. De plus, les secouristes devraient être formés à la médecine de guerre et au «damage control», qui consiste à maîtriser les lésions d’un maximum de victimes simultanément, pour en sauver le plus possible.
Un dispositif de protection Sentinelle à repenser dans le temps
Suite aux attentats de janvier 2015, le gouvernement n’a pas hésité à réclamer le renfort de l’armée. L’opération Sentinelle, qui a mobilisé jusqu’à 10 000 soldats sur le territoire au cours des dix-huit derniers mois, est encore assurée par 7 000 d’entre eux. Mais les députés s’interrogent sur la «réelle valeur ajoutée» de cette force de dissuasion. Ils recommandent d’abaisser ce contingent et de gonfler les effectifs de Vigipirate, de 1 000 militaires en 2014.